Une campagne de sensibilisation qui s'est échelonnée sur 16 mois a été couronnée de succès avec une victoire de 27 M$ pour les importateurs de téléviseurs, d'écrans de télévision et d'autres articles électroniques accessoires, y compris les lecteurs MP3, les Walkmans et les ipods. Le Décret de remise visant certains téléviseurs (DORS/2014-0088) (« décret de remise 9948 ») pris en vertu de l'article 115 du Tarif des douanes, publié dans la Gazette du Canada, ordonne le remboursement de 27 M$ de droits perçus en 2012 et 2013. En conséquence du décret de remise 9948, le gouvernement fédéral confirme qu'il n'y a pas, en fait, et qu'il n'y a jamais réellement eu de « taxe » sur les importations de « ipods » au Canada.
Le décret de remise 9948 est le résultat d'une campagne soutenue menée par la Canadian Importers 9948 Fair Treatment Coalition (« Coalition des importateurs canadiens pour un traitement équitable 9948 »), coalition d'affaires non constituée en personne morale composée d'importants importateurs et détaillants canadiens et de fabricants internationaux et créée par Fasken Martineau pour le compte de Dominion Customs Consultants Inc. dans le seul but de remédier aux conséquences inéquitables d’une initiative de vérification de l'Agence des services frontaliers du Canada (« ASFC »).
Malgré son appellation mystérieuse, le décret de remise 9948 peut avoir des répercussions insoupçonnées pour les importateurs d'appareils électroniques et, plus généralement, pour tout importateur de biens se fiant aux dispositions de redressement des droits du chapitre 99 du Tarif des douanes.
Qu'est-ce qu'un décret de remise?
L'article 115 du Tarif des douanes autorise qu'une décision politique et discrétionnaire soit prise pour accorder une exonération à un importateur. Elle peut être autorisée lorsqu'il est déterminé que l'interprétation qu’ont faite les autorités du Tarif des douanes crée une grave injustice pour l'importateur. Elle constitue également une avenue pour l'importateur en lui permettant de demander un redressement équitable.
Plus précisément, l'article 115 du Tarif des douanes prévoit ce qui suit :
« sur recommandation du ministre [des Finances] ou du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, le gouverneur en conseil peut, par décret, remettre des droits. »
Les importateurs s'en remettent tous les jours aux fonctionnaires de l'ASFC pour les aider à se conformer en tous points au Tarif des douanes, un code hautement technique et complexe. La réputation du Canada comme juridiction stable, prévisible et équitable pour faire des affaires est renforcée par le recours à l'article 115 comme moyen d'obtenir un redressement équitable dans le cas de décisions préjudiciables fondées sur la confiance envers l'ASFC.
Pourquoi un décret de remise avait-il été demandé?
En résumé, l'ASFC avait imposé de façon rétroactive d'importants droits sur certains articles électroniques qui étaient depuis longtemps importés sans droit de douane au Canada sous le numéro tarifaire 9948.00.00. (« tarif 9948 »). Plusieurs de ces importations électroniques étaient examinées et approuvées en vertu du système des décisions anticipées de l'ASFC. En 2012, pour la première fois, l'ASFC a invoqué certaines exigences de tenue des documents en vertu du Règlement sur les documents relatifs à l'importation des marchandises (le « Règlement ») pour refuser, de façon rétroactive, que ces produits soient admis en franchise de droits. Selon l'ASFC, les importateurs étaient tenus de présenter un certificat d'« utilisation finale » du consommateur final confirmant que les articles électroniques étaient, en fait, utilisés de manière compatible aux conditions du tarif 9948. Tout importateur incapable de présenter ce certificat se voyait imposer des droits avec effet rétroactif. Comme aucun importateur ou détaillant au Canada ne pouvait attester l'utilisation réelle de ces produits, vendus en règle générale à des clients canadiens sur une base individuelle pour leur usage personnel, tous les importateurs ont été tenus de payer des droits rétroactifs et s'abstenir de recourir au tarif 9948 pour leurs importations futures. Après plusieurs mois de mobilisation de la Coalition des importateurs canadiens pour un traitement équitable 9948 auprès des politiciens, ministres et fonctionnaires fédéraux au ministère des Finances et à l'ASFC, les ministres fédéraux de la Sécurité publique et des Finances ont été convaincus que ces exigences de tenue des dossiers n'avaient jamais été conçues en vue d'exiger un certificat d'utilisation finale de la part des clients au détail canadiens.
L'avis des douanes CN 13‑015 intitulé « Précision au Règlement sur les documents relatifs à l'importation des marchandises » (« avis des douanes 9948 ») a été publié le 28 juin 2013 afin de fournir des indications aux importateurs sur l'application du règlement pour les produits destinés aux consommateurs qui sont importés en utilisant le tarif 9948. L'avis des douanes 9948 confirmait plus précisément que les certificats d'utilisation finale pour le tarif 9948 n'étaient pas nécessaires en ce qui concerne les consommateurs. Les importateurs devront plutôt « attester » l'usage auquel une marchandise est destinée. Même si l'avis des douanes a été publié par l'ASFC afin de « préciser » les obligations de tenue des documents pour les importateurs utilisant le tarif 9948, les importateurs continuent d'attendre d'autres indications relativement à cette précision au sujet des exigences en matière de forme et de contenu de la nouvelle « attestation » afin que les biens importés soient admissibles à l'exonération du tarif 9948.
Presque dix mois après la publication de l'avis des douanes 9948, le Conseil du trésor fédéral a approuvé la remise des droits pour un montant de 26 965 456 $ à 23 importateurs, dont plusieurs faisaient partie de la Coalition des importateurs canadiens pour un traitement équitable 9948.
Répercussions du décret de remise 9948 pour les importateurs canadiens
Au sujet du programme d'utilisation finale
Le décret de remise 9948 et les énoncés de politique s'y rattachant sur l'application des exigences de tenue des documents prévues par le règlement peuvent avoir des répercussions importantes à l'avenir sur le programme d'utilisation finale de l'ASFC et les obligations de tenue des documents liées à l'importation de biens au Canada.
Le chapitre 99 du Tarif des douanes renferme un certain nombre de numéros tarifaires, y compris le 9948.00.00, qui ont été classés par l'ASFC comme des numéros tarifaires d'« utilisation finale ». Les numéros tarifaires « d'utilisation finale » renferment le mode conditionnel tel que « pour utilisation dans »; « pour utilisation par »; « pour utilisation sur », etc. L'ASFC a interprété cette « utilisation » comme étant une exigence administrative pour l'application de l'exonération des droits du chapitre 99, laquelle exigence doit être respectée sur une base « d'utilisation réelle » continue pendant quatre ans après l'importation. On ne retrouve aucune source législative pour cette exigence administrative et, dans le cas des biens vendus à des consommateurs à titre individuel, il n'existe aucune façon possible d'administrer un « programme d'utilisation finale ». Il est difficile de déterminer comment l'ASFC pourrait continuer d'exiger une utilisation réelle continue de quatre ans pour des biens importés aux termes des dispositions du tarif « d'utilisation finale » du chapitre 99 du Tarif des douanes ou la forme que prendra l'« attestation » en question à l'égard des produits importés pour la vente à des clients au détail.
Au sujet de l'administration par l'ASFC du Tarif des douanes
Le recours au pouvoir ministériel discrétionnaire pour renverser des décisions administratives de l'ASFC confirme que l'agence ne peut outrepasser son pouvoir. Le recours au Tribunal canadien du commerce extérieur est facilement accessible pour les appels des décisions administratives rendues par l'ASFC, mais il ne constitue pas le seul recours disponible pour les importateurs qui s’estiment lésés. Les ministres du gouvernement et les autres représentants élus se soucient de l'administration de la frontière du Canada, et peuvent prendre les mesures qui s’imposent pour protéger les Canadiens lorsqu’ils le jugent nécessaire.
Coalitions et campagnes
L'exemple 9948 illustre bien que certains défis en matière de commerce sont mieux relevés au moyen d'une campagne menée de concert par plusieurs participants, qui permet de mettre à profit la force du nombre pour faire progresser un dossier au sein du gouvernement. Dans certains cas, la puissance d'un front d'entreprises unies pour une cause commune est plus efficace que les efforts d'une seule compagnie. Pour en savoir davantage sur la nature d'une campagne qui correspond à vos besoins, veuillez communiquer avec Claudia Feldkamp, au +1 416 868 3534 ou à l’adresse cfeldkamp@fasken.com, ou Dan Brock, au +1 416 865 4513 ou à l’adresse dbrock@fasken.com.