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La Cour statue sur le différend frontalier découlant du traité 8

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Bulletin Affaires Autochtones

Le 25 septembre 2017, la Cour suprême de la Colombie-Britannique a statué sur le différend de longue date entre les Premières nations signataires du traité no 8 et le Canada, d’une part, et diverses Premières nations non-signataires du traité n8 et la Colombie-Britannique, d’autre part, concernant l’emplacement de la frontière occidentale visée par le traité no 8. Les demanderesses, un groupe de Premières nations signataires du traité no 8 soutenu par le Canada, affirment que la frontière occidentale prévue au traité no 8 est délimitée par la hauteur des terres situées entre la ligne de partage des eaux des océans Arctique et Pacifique. En revanche, la Colombie-Britannique, avec l’appui du conseil des Dénés Kaskas, allègue que la frontière longe la chaîne centrale des Rocheuses, à l’est de la ligne de partage des eaux des océans Arctique et Pacifique (voir plus bas). La Cour donne raison aux Premières nations signataires du traité no 8 et au Canada (décision répertoriée comme West Moberly First Nations v. British Columbia, 2017 BCSC 1700).

Contexte

Signé en 1899, le traité no 8 est qualifié par la Cour suprême du Canada comme « l’un des plus importants traités conclus après la Confédération » (Première nation crie Mikisew c. Canada [ministre du Patrimoine canadien], 2005 R.C.S. 69, par. 2). Les terres visées par le traité no 8, où vivent 39 communautés des Premières nations, couvrent environ 840 000 kilomètres carrés englobant le nord de l’Alberta, le nord-est de la Colombie-Britannique, le nord-ouest de la Saskatchewan et le sud des Territoires du Nord-Ouest.

La Couronne souhaitait conclure le traité no 8 afin d’accéder au Klondike durant la ruée vers l’or. En échange de la cession de leurs terres, des réserves ont été promises aux Premières nations, ainsi que la préservation de leurs droits de pêche, de chasse et de piégeage, sous réserve du droit de la Couronne de prendre les terres. Mais la frontière occidentale des terres visées au traité est remise en question dès 1909.

La décision de la Cour

Le litige entre les parties repose sur l’interprétation de la phrase « de là franc ouest jusqu'à la chaîne centrale des montagnes Rocheuses, puis vers le nord-ouest le long de ladite chaîne jusqu'au point où elle coupe le 60e parallèle de latitude nord (...) » dans la description des limites du territoire qu’on retrouve dans le traité no 8. Le Canada et les Premières nations signataires allèguent que la phrase signifie que la limite se prolonge le long de la ligne de partage des eaux des océans Arctique et Pacifique, puis le long de la ligne continentale de partage des eaux, jusqu’au croisement du 60e parallèle. La Colombie-Britannique, le conseil Dénés Kaskas et les intervenants (toutes les Premières nations non-signataires), soutiennent que la limite se situe plutôt à l’est de cet emplacement, le long des montagnes Rocheuses (par. 14). Les deux limites figurent sur la carte reproduite plus bas, qui était jointe à la Réponse à la poursuite civile de la Colombie-Britannique.

Pour interpréter le traité, la Cour étudie d’abord les données géographiques de la région au moment de la signature, ainsi que certains éléments tels que la conduite des signataires avant et après la signature, y compris celle de leurs successeurs, notant que « la Cour peut tenir compte de toute conduite postérieure au traité pour découvrir l’intention des parties. » (par. 10).

La Cour relate l’histoire de la Colombie-Britannique, dont la naissance de la ruée vers l’or et le processus de formation des traités, afin de comprendre les circonstances entourant la formation du traité no 8. Puis, la Cour se demande si le libellé du traité a une signification différente de ce qui est représenté sur les cartes, y compris celle jointe au décret 2749, lequel précise l’intention du Canada de conclure le traité. À cette fin, la Cour a reçu et étudié les renseignements obtenus auprès de diverses sources, notamment :

  • Les lois impériales et la législation contemporaine;
  • Les cartes historiques du dix-neuvième siècle;
  • Les comptes rendus de voyage des commissaires aux traités;
  • La Commission McKenna-McBride;
  • Les preuves d’experts relatives à la cartographie historique, à l’exploration, à la cartographie et à la nomenclature des montagnes de la Colombie-Britannique, à la géographie physique, à la linguistique et à l’anthropologie, y compris l’ethnohistoire;
  • Le libellé des traités précédents;
  • Les définitions des dictionnaires historiques;
  • Le témoignage des membres de divers groupes autochtones concernés, y compris les preuves de relations entre les membres des collectivités des Beaver (à l’est des montagnes Rocheuses) et des Sekani (à l’ouest des Rocheuses).

La Cour conclut qu’il n’y a aucune raison de déroger aux cartes qui indiquent la frontière selon la ligne de partage des eaux des océans Arctique et Pacifique. En ce qui concerne la « chaîne centrale » des montagnes Rocheuses mentionnée comme étant la frontière visée par le traité, elle devrait atteindre la latitude de 60 degrés nord (à la limite nord), mais aucune chaîne n’y parvient. En revanche, la ligne de partage des eaux des océans Arctique et Pacifique continue et croise la latitude de 60 degrés nord (par. 149 à 151).

Conséquences

Comme l’indique la Cour, cette affaire ne concerne pas les droits, titres ou intérêts autochtones qui existaient avant la signature du traité ni l’interprétation des dispositions du traité. Le seul enjeu est l’emplacement de la frontière. 

La décision exigera que l’État provincial consulte un plus vaste éventail de personnes en lien avec la conduite de la Couronne dans la région située entre les limites contestées. L’affaire soulève aussi des questions intéressantes sur l’exercice des droits autochtones des membres non-signataires des Premières nations sur des territoires traditionnels situés dans la zone en litige qui, selon la Cour, est couverte par le traité no 8.

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  • Bridget Gilbride, Associée, Vancouver, BC, +1 604 631 4891, bgilbride@fasken.com
  • Reina Mistry, Avocate, Vancouver, BC, +1 604 631 3263, rmistry@fasken.com

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