Les services hôteliers s’avèrent être un terrain de bataille intéressant en ce qui concerne l’emploi transfrontalier des marques de commerce. La question principale est de savoir s’il est possible d’« employer » une marque de commerce d’hôtel au Canada si aucun établissement physique n’existe dans ce pays. Dans une récente décision de la Commission de l’opposition des marques de commerce [Miller Thomson LLP c Hilton Worldwide Holding LLP. (2017 COMC 19)], l’enregistrement de la marque de commerce WALDORF-ASTORIA a été radié pour défaut d’emploi parce que les « services hôteliers » (les seuls services décrits dans l’enregistrement) supposent que les consommateurs devraient pouvoir louer une chambre d’hôtel située au Canada, ce que cette chaîne d’hôtels de luxe en particulier n’a pu faire pendant plusieurs années.
Hilton Worldwide a soutenu que les Canadiens pouvaient, à partir de leur domicile, faire des réservations en ligne ou par téléphone dans des hôtels WALDORF-ASTORIA situés dans d’autres pays. Des milliers de Canadiens ont en fait réservé des séjours en ligne pendant la période pertinente de trois ans. Il a également été soutenu que le programme de fidélisation de l’hôtel portant la marque a accueilli 400 000 membres canadiens pendant cette même période, et que ces membres pouvaient profiter d’importants avantages dans le cadre de ce programme (comme l’obtention de séjours gratuits) à partir du Canada. La Commission a établi que même si ces services étaient accessoires à l’exploitation d’un hôtel, il ne s’agit pas de « services hôteliers » comme tels. Elle a également refusé d’établir une distinction entre les services décrits comme étant des « hôtels » et « l’exploitation d’un hôtel », lesquels auraient une portée moins large aux dires de Hilton Worldwide. La Commission s’est également appuyée sur la jurisprudence antérieure dans le domaine hôtelier et a accordé un certain poids au fait que le Manuel des produits et des services du Canada prévoit expressément les termes « services hôteliers », « réservation d'hôtels », « services de réservation de chambres d'hôtel » et « gestion hôtelière ». La Commission était d’avis qu’un consommateur à qui l’on a dit qu’il recevra des « services hôteliers » au Canada s’attendra, logiquement, à la présence physique d’un hôtel.
Les requérants qui n’incluent pas expressément de services accessoires, comme des services de réservation et des programmes de fidélisation, dans leur demande d’enregistrement d’une marque de commerce canadienne pourraient se voir incapables d’établir l’emploi de leur marque, ce qui pourrait entraîner la perte de droits relativement à la marque déposée. Cela ne signifie pas nécessairement que les propriétaires de marques de commerce d’hôtels ne peuvent pas invoquer des droits acquis par l’emploi au Canada. Comme il existe des avantages clairs à la possession d’un enregistrement de marque de commerce, y compris dans le contexte d’un litige, il vaut la peine d’ajouter ces services accessoires dans votre demande canadienne. Si une demande prioritaire au sens de la Convention ne comprend pas expressément des services accessoires à l’exploitation d’un hôtel, ceux-ci peuvent être ajoutés sur une base non prioritaire au moment de produire la demande canadienne. Il peut s’avérer plus facile d’établir l’emploi par Internet de ces services accessoires.
La décision de la Commission a été portée en appel devant la Cour fédérale du Canada et une décision devrait être rendue plus tard en 2018.