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Le gouvernement propose de simplifier les procédures de la Commission du droit d’auteur et d’améliorer le système d’avis de droit d’auteur en ligne

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Bulletin Propriété intellectuelle

Dans le cadre du projet de loi C-86, la Loi n2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 27 février 2018 et mettant en œuvre d'autres mesures, le gouvernement fédéral a procédé à d'importants changements de la partie VII de la Loi sur le droit d'auteur régissant le fonctionnement de la Commission du droit d'auteur du Canada et la gestion collective du droit d'auteur. Ces changements ont pour but d'accélérer les processus de prise de décision de la Commission, de réduire la portée de l'application rétroactive des tarifs imposés par la Commission et d'harmoniser les divers régimes de gestion collective prévus par la Loi.

Toutefois, les changements entraîneront un virage radical de l'approche du Canada à l'égard de la réglementation des redevances de droits d'auteur versées pour l'exécution publique et la communication au public par télécommunication de musique jouée en direct ou enregistrée.

Le gouvernement propose également des modifications visant à protéger les internautes canadiens des avis de violation du droit d'auteur exigeant le paiement immédiat de compensation pour la violation alléguée.

Réforme de la Commission du droit d'auteur

L'efficacité et la rapidité du processus décisionnel de la Commission du droit d'auteur ont fait l'objet de vives critiques ces dernières années, tant par les sociétés de gestion que les utilisateurs de contenu. La Commission peut parfois prendre jusqu'à trois ans pour rendre des décisions, et nombreuses sont celles qui établissent des taux ayant un effet rétroactif de plusieurs années. Face à ces critiques, le gouvernement fédéral a lancé l'année dernière un processus de consultation des intervenants qui a mené aux modifications législatives proposées dans le cadre du projet de loi C-86.

Au terme des modifications proposées, les sociétés de gestion qui souhaitent avancer des tarifs pour approbation par la Commission devront déposer ces tarifs 14 mois avant leur date d'entrée en vigueur, et les projets de tarif devront couvrir une période minimale de trois ans. À l'heure actuelle, les tarifs sont déposés neuf mois à l'avance et couvrent seulement une seule année à la fois.

De plus, la Commission devra dorénavant entendre les affaires dont elle est saisie « avec célérité et sans formalisme » et le président aura le pouvoir de désigner un gestionnaire de l'instance relativement à une affaire dont la Commission est saisie.

Le Cabinet fédéral aura aussi le pouvoir d'adopter des règlements établissant des dates d'échéance à l'égard du traitement des affaires devant la Commission.

Le gouvernement introduit également de nouveaux critères que la Commission devra respecter à l'égard de la fixation de redevances justes et équitables, notamment l'établissement d'une norme relative à « un acheteur et un vendeur consentants ». Toutefois, le critère du marché ne sera pas l'unique facteur à considérer dans l'établissement des redevances puisque la Commission doit également tenir compte de l'intérêt public.

Changements à la gestion collective de la musique

Le changement le plus important au régime du droit d'auteur introduit par le projet de loi C-86 est sans doute l'élimination de la réglementation ex ante des redevances perçues pour l'exécution publique et la communication au public d'œuvres musicales en direct et enregistrées.

La SOCAN est une société de gestion qui accorde des licences d'exécution publique d'œuvres musicales au Canada pour le compte des auteurs, compositeurs et éditeurs. Ré:Sonne - Société de gestion de la musique (« Ré:Sonne ») est la société de gestion qui perçoit les redevances relatives à l'exécution publique des enregistrements sonores d'œuvres musicales pour le compte des producteurs de disques et des artistes-interprètes.

À l'heure actuelle, SOCAN et Ré:Sonne doivent faire approuver leurs tarifs par la Commission du droit d'auteur afin de pouvoir percevoir des redevances pour l'utilisation d'œuvres dans leur répertoire, et elles ne peuvent poursuivre en contrefaçon à moins qu'un tarif ne soit homologué par la Commission. Les sociétés de gestion doivent déposer les projets de tarif à l'avance pour donner un avis aux utilisateurs des redevances que SOCAN et Ré:Sonne veulent percevoir. Tout usager visé par le tarif peut contester un projet de tarif et déclencher une audience devant la Commission du droit d'auteur, qui établit alors les taux de redevance et autres modalités du tarif.

Même si aucun usager ne conteste un projet de tarif, la Commission doit tout de même examiner le projet pour établir s'il est équitable avant de l'approuver, et elle peut modifier les taux et modalités proposées si elle le juge nécessaire.

Un tarif, une fois approuvé, constitue une forme de licence statutaire à laquelle un utilisateur éventuel peut choisir d'adhérer en payant les taux applicables.

De plus, un utilisateur ne peut pas actuellement être poursuivi pour l'exécution publique d'une œuvre musicale à moins que cette œuvre ne soit couverte par un tarif.

Les tarifs approuvés couvrent une vaste gamme d'activités, y compris l'utilisation de musique jouée en direct ou enregistrée dans les bars, les restaurants et les magasins, la diffusion d'œuvres musicales à la radio, à la télévision, au câble, par satellite ou par les services de diffusion en continu sur Internet, les concerts, les événements sportifs, les congrès, les foires, gymnases, studios de danse, etc.

Comme conséquence des modifications proposées au projet de loi C-86, la SOCAN et Ré:Sonne ne seront plus obligées de déposer des projets de tarif. Elles pourront accorder des licences d'utilisation de musique à des fins quelconques par des négociations directes avec les usagers éventuels. En ne proposant pas de tarifs, les sociétés de gestion collective n'auront pas à donner de préavis au public des taux qu'elles souhaitent obtenir et la Commission n'aura pas de rôle à jouer dans l'examen du caractère juste et équitable des redevances à moins qu'un utilisateur ou une société de gestion ne demande une procédure de gestion des différends.

Les mêmes taux et modalités ne seront plus nécessairement offerts à tous les usagers. Les sociétés de gestion collective pourront donc soutirer des taux différents d'usagers distincts, d'une licence à l'autre.

Enfin, le gouvernement propose d'abroger la disposition empêchant un utilisateur d'être poursuivi pour violation à moins qu'un tarif n'ait été approuvé. Cela augmentera considérablement le risque d'engager sa responsabilité pour l'utilisation d'œuvres musicales qui ne sont pas représentées par la SOCAN.

Élimination des demandes de paiement en règlement incluses dans un avis de droit d'auteur

Dans le cas où un titulaire de droits d'auteur soupçonne qu'un utilisateur d'Internet viole ses droits d'auteur, il peut envoyer un avis d'allégation de violation du droit d'auteur au fournisseur de services Internet de l'utilisateur. Ce fournisseur doit transmettre l'avis à l'utilisateur et conserver les renseignements qui permettraient de l'identifier si le titulaire des droits d'auteur veut engager une poursuite.

Certains titulaires envoyaient un avis comprenant des liens hypertextes et demandaient à l'internaute accusé de contrefaçon de se rendre sur un site Web et de payer un montant en règlement de l'affaire au moyen d'une carte de crédit, sous peine de faire l'objet d'une action en contrefaçon. En réponse à cette utilisation abusive du système d'avis, le gouvernement a apporté des modifications précisant que les avis qui comprennent de telles demandes de règlement ne seront plus conformes à la Loi sur le droit d'auteur et ne seront pas exemptés de l'obligation de transmission à l'internaute par le fournisseur de services Internet.

Toutefois, puisqu'il n'existe aucune interdiction d'envoyer des avis comportant ces demandes de règlement, il incombera aux fournisseurs de services Internet d'identifier et de filtrer ces avis non conformes.

Conclusion

Comme on pouvait s'y attendre, les modifications à la Loi sur le droit d'auteur sont surtout de nature procédurale et institutionnelle. Peu de changements ont été apportés au droit substantif. On s'attend à des changements plus importants au droit substantif seulement lorsque l'examen de la Loi sur le droit d'auteur actuellement en cours sera terminé.

Par contre, même s'il ne s'agit que de changements procéduraux, cela ne signifie pas pour autant que ces changements n'ont pas d'importance. Plusieurs modifications proposées auront une incidence majeure sur la relation entre les titulaires et les usagers de droits d'auteur. La réforme de la Commission du droit d'auteur sera sans doute bien accueillie par tous les intervenants, mais de nombreuses autres modifications risquent davantage de prêter à controverse et leurs effets sont plus difficiles à prédire à cette étape.

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Auteurs

  • Gerald (Jay) Kerr-Wilson, Associé | Agent de marques de commerce, Ottawa, ON, +1 613 696 6884, jkerrwilson@fasken.com
  • Michael Shortt, Associé | Agent de marques de commerce, Montréal, QC, +1 514 397 5270, mshortt@fasken.com

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