Le 17 mai 2012, la Cour suprême du Canada a rendu une décision importante relativement au partage des compétences en matière de relations de travail. Dans Tessier c. Commission de la santé et de la sécurité du travail,[1] la Cour suprême du Canada devait déterminer si l’employeur était régi par les lois fédérales ou par les lois provinciales en matière de santé et de sécurité au travail. L’employeur exerçait de façon régulière des activités de chargement ou de déchargement de navires, communément connues sous le nom de débardage. L’employeur exerçait également des activités de location de grues, d’entretien et de la réparation d’équipement de même que du transport routier intraprovincial. La particularité de ce dossier était que les employés pouvaient travailler indistinctement dans l’un ou l’autre des secteurs d’activités de l’entreprise, rendant celle-ci indivisible.
La Cour suprême a rappelé que le gouvernement fédéral a compétence en matière de réglementation du travail dans deux circonstances. Premièrement, le Parlement a compétence de manière directe lorsque l’emploi s’exerce dans le cadre d’un ouvrage, d’une entreprise ou d’un commerce relevant du pouvoir législatif fédéral. Deuxièmement, le Parlement a compétence lorsque l’emploi se rapporte à une activité faisant partie intégrante d’une entreprise assujettie à la réglementation fédérale. Dans ce deuxième cas, la Cour suprême indique qu’il s’agit de la compétence dérivée.
Contrairement à ce que la jurisprudence et la doctrine pouvaient laisser croire, la Cour suprême a énoncé que le débardage n’est pas une activité qui fait directement tomber une entreprise sous un chef de compétence fédérale eu égard à ses relations de travail. Ainsi, la réglementation fédérale des relations de travail des débardeurs ne sera justifiée que si le débardage forme une partie intégrante du transport maritime extraprovincial, lequel relève de la compétence fédérale.
La Cour suprême a ensuite établi le cadre d’analyse applicable pour déterminer si une entreprise connexe à une entreprise fédérale est une partie intégrante de cette dernière. Essentiellement, la Cour suprême énonce qu’il convient d’examiner généralement le lien entre l’entreprise fédérale et l’activité censée en former une partie intégrante, évaluant dans quelle mesure l’exploitation efficace de l’entreprise fédérale dépend des services fournis par l’entreprise connexe et soupesant l’importance de ces services pour l’entreprise connexe elle-même.
Appliquant ce critère aux faits du dossier, la Cour suprême a conclu que l’employeur ne peut relever de la juridiction fédérale eu égard à ses relations de travail puisque les activités de débardage ne constituent pas une part importante de son exploitation et que la preuve ne permettait pas de conclure que les services de débardage faisaient partie intégrante des sociétés fédérales de transport maritime auxquelles ils étaient destinés.
Cette décision de la Cour suprême du Canada est pertinente pour toutes les entreprises canadiennes qui exercent des activités de débardage et pour toutes les entreprises qui souhaiteraient se qualifier de fédérale pour les fins des relations de travail en vertu de la compétence dérivée.
L’employeur était représenté devant la Cour suprême du Canada par une équipe de Fasken Martineau composée notamment de Sébastien Gobeil et de Maxime-Arnaud Keable. Pour plus de renseignements, vous pouvez rejoindre Sébastien Gobeil au 418-640-2032.
[1] Tessier Ltée c. Québec (Commission de la santé et de la sécurité du travail), 2012 CSC 23