Les parties qui négocient des contrats commerciaux pour leur bénéfice mutuel ont souvent tendance à traiter les clauses de règlement des différends comme un élément secondaire des négociations. Des clauses standard tirées de contrats antérieurs se retrouvent parfois dans des contrats importants, sans qu’une attention particulière ait été portée à leurs conséquences. Pour les sociétés d’énergie, le fait de faire affaire avec des sociétés étrangères peut apporter son lot de défis lorsque vient le temps de régler efficacement des différends et de faire respecter des obligations contractuelles.
Les sociétés d’énergie peuvent facilement éviter certains pièges potentiellement coûteux si elles tiennent compte de certains aspects importants au moment de la négociation de contrats internationaux, notamment des aspects suivants :
- Les clauses d’arbitrage sont importantes pour faire respecter des obligations prévues aux termes de contrats internationaux.
Des accords et des traités facilitent la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales. La plupart des pays sont signataires de la Convention de New York, qui prévoit la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales internationales. Les dispositions et les processus prévus dans ces accords améliorent considérablement la capacité des parties à faire respecter des obligations contractuelles bien au-delà de ce que permettent des décisions judiciaires.
- Même si les parties se sont entendues sur le droit national (ou provincial ou étatique) qui régira l’interprétation du contrat, cela ne veut pas dire que ce sera le même droit qui régira le processus d’arbitrage et l’exécution du contrat.
Pour les contrats commerciaux internationaux, le droit qui régira l’interprétation du contrat et le droit qui régira le processus d’arbitrage et l’exécution des sentences arbitrales doivent faire l’objet de choix distincts. Chaque territoire a ses propres lois et règlements qui régissent notamment les différends quant à la nomination d’arbitres, les mesures provisoires et l’examen et l’appel de sentences arbitrales. Le droit qui régira le processus d’arbitrage sera celui du « siège de l’arbitrage ».
Le contrat doit préciser le « siège de l’arbitrage », idéalement une ville et un pays (pour éviter une confusion avec une ville du même nom située dans un autre pays), pour indiquer clairement le droit procédural et judiciaire qui devra être appliqué. Habituellement, le « lieu de l’arbitrage » correspond au « siège de l’arbitrage », mais le « lieu de l’arbitrage » ou le « siège de l’arbitrage » ne correspond pas nécessairement à l’endroit où aura lieu l’audience. Ainsi, il n’est pas rare qu’un arbitrage dont le « siège » est à Hong Kong soit entendu ailleurs qu’à Hong Kong.
Le choix du « siège de l’arbitrage » devrait tenir compte, entre autres, des éléments suivants :
- le « siège de l’arbitrage » doit-il être dans un pays autre que celui de l’une des parties, pour éviter qu’une partie bénéficie de l’« avantage de la glace »;
- les lois locales en matière d’arbitrage et leur application par les tribunaux locaux;
- les tribunaux locaux ont-ils tendance à confirmer les sentences arbitrales en refusant de les annuler;
- l’État est-il signataire d’accords et de traités internationaux potentiellement pertinents en matière d’exécution des sentences arbitrales;
- les tribunaux locaux interviennent-ils indûment dans le processus d’arbitrage;
- y a-t-il des conseillers juridiques locaux compétents qui pourront s’occuper de toute action en justice requise.
- Dans la mesure du possible, inclure toutes les parties concernées.
Les procédures d’arbitrage se limitent presque toujours à un différend entre les parties à un contrat, et il est très difficile d’impliquer des non-signataires. Cet aspect est très important pour les sociétés qui font affaire avec des filiales étrangères qui pourraient ne pas avoir les actifs requis pour exécuter une sentence arbitrale. Si la société mère agit comme garant, les dispositions du contrat concernant le règlement des différends devraient prévoir la possibilité d’impliquer la société mère dans la procédure d’arbitrage de manière à obtenir une sentence pouvant également être exécutée par cette dernière. Sinon, il pourrait être très difficile de faire exécuter la sentence arbitrale par la société mère, et la sentence arbitrale pourrait n’avoir aucun effet.
- Pensez à l’importance d’adopter des règles d’arbitrage précises et de désigner des administrateurs particuliers.
Dans les contrats d’arbitrage internationaux, il est normal, et la plupart du temps souhaitable, de préciser un certain nombre de règles régissant les procédures d’arbitrage se rapportant à de tels contrats. Les parties établissent parfois des règles servant leurs propres fins, mais il leur est également possible d’intégrer par renvoi d’autres règles déjà établies, notamment les règles de la Chambre de commerce international (CCI), du International Center for Dispute Resolution (ICDR) et du Hong Kong International Arbitration Centre (HKIAC).
Le choix des règles est important car, malgré les nombreuses similarités entre les différentes règles institutionnelles, il peut exister des différences importantes qui ne sautent pas aux yeux. Par exemple, certaines règles prévoient des obligations de communication d’information qui sont différentes et plus coûteuses (il pourrait être important pour une partie de savoir si elle devra produire seulement les documents sur lesquels elle souhaite se fonder ou si elle devra produire des documents qui ne l’aideront pas à défendre sa cause). D’autres règles prévoient des procédures spéciales pour les arbitrages accélérés, les mesures provisoires et la nomination urgente d’arbitres. Dans certains cas, la possibilité d’avoir recours à ces mesures peut être très importante.
Bien qu’un petit nombre d’institutions arbitrales (p. ex., la CNUDCI) établissent des règles pour les arbitrages non administrés ou ad hoc, les règles de la plupart des institutions arbitrales (p. ex. les institutions mentionnées plus haut) supposent que l’institution administrera tout arbitrage conformément à ces règles. Ces services ne sont pas gratuits, mais ils peuvent être avantageux parce qu’ils assurent un déroulement efficace des procédures et permettent d’éviter des déplacements à la cour lorsque les parties ne peuvent s’entendre sur le choix d’un ou de plusieurs arbitres. La tarification et le niveau de participation administrative varient également d’une institution arbitrale à l’autre.
- Pensez à qui vous voulez soumettre vos différends
Les parties ont la possibilité de choisir leur(s) propre(s) arbitre(s) ou de s’entendre sur la procédure qui permettra de nommer un ou plusieurs arbitres.
Il n’est pas rare que les parties s’en remettent à un groupe de trois arbitres (habituellement, les parties choisissent chacune un arbitre, et ces deux arbitres s’entendent sur le choix du président du tribunal d’arbitrage). Cette façon de procéder donne souvent de bons résultats. Toutefois, faire appel à trois arbitres peut créer des problèmes en termes de coûts, de temps et d’organisation. Dans les litiges de moindre importance, les parties ont intérêt à faire appel à un seul arbitre et à une seule méthode de nomination. Cette façon de procéder peut également être recommandée dans les litiges de plus grande envergure où la rapidité du traitement et les coûts sont des éléments importants.
En ce qui concerne la sélection des arbitres, ce n’est généralement pas une bonne idée de désigner une personne en particulier dans le contrat, car les parties seraient alors tributaires de l’état de santé ou de la disponibilité de cette personne. Toutefois, dans certains cas, il peut être utile de spécifier les compétences ou l’expérience professionnelles que doit posséder l’arbitre (p. ex. si celui-ci doit être un avocat, un comptable, un ingénieur ou un expert-métreur), ou encore la langue ou les langues qu’il doit maîtriser. Cette façon de procéder peut permettre de réduire les retards et les coûts. Il faut toutefois éviter d’être trop précis quant aux compétences de l’arbitre, car chaque exigence additionnelle réduit le nombre de candidats possibles et vous pourriez avoir des difficultés à trouver une personne qui réponde à toutes vos exigences, qui soit disponible et qui n’est pas en situation de conflit d’intérêts.
Comme on peut s’y attendre, à l’égard des points présentés ci-dessus (et à l’égard d’autres points), les sociétés feront des choix différents selon leurs priorités et selon le contexte des négociations contractuelles. Il faut bien comprendre les solutions envisagées et les examiner en fonction de l’ensemble du contrat commercial. Si les choses tournent mal, le contrat négocié entre les parties ne sera valable que s’il contient des dispositions de règlement des différends.