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La Cour d’appel fédérale confirme l’exigence d’adaptation aux obligations familiales de l’employé, mais non à ses choix personnels | L'Espace RH

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Bulletin Travail, emploi et droits de la personne

Dans une récente décision sur la discrimination fondée sur la situation familiale, la Cour d'appel fédérale a confirmé que les employeurs sont tenus d'accommoder les obligations parentales de l'employé, mais pas ses choix volontaires, comme les activités parascolaires ou récréatives.

Contexte

Le 2 mai 2014, la Cour d'appel fédérale s'est prononcée sur l'affaire Canada (Attorney General) v. Johnstone (PDF - disponible en anglais seulement), une décision très attendue en matière de discrimination fondée sur la situation familiale.

Mme Johnstone et son mari étaient tous deux des employés de l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) et assujettis à un système complexe de quarts de travail rotatifs qui pouvaient être modifiés à 5 jours de préavis, créant un horaire de travail imprévisible et irrégulier. Étant donné que Mme Johnstone n'arrivait pas à trouver un service de garde adapté à son horaire, elle a demandé à obtenir un horaire fixe à temps plein; l'ASFC a refusé sa demande et lui a plutôt offert un horaire fixe à temps partiel. Bien que l'ASFC ait déjà accepté d'accommoder d'autres employés en raison de leur condition médicale ou de leurs croyances religieuses, l'ASFC avait une politique non écrite selon laquelle elle n'accordait des horaires de travail fixes aux employés ayant des obligations parentales que si l'employé en question acceptait de travailler à temps partiel.

Dans sa décision, la Cour fédérale d'appel a donné raison au tribunal inférieur et a confirmé que le critère visant à déterminer l'existence d'une discrimination fondée sur la situation familiale devrait être semblable à celui qui s'applique aux autres motifs de discrimination interdits. La Cour a affirmé qu'il était important que les deux critères soient semblables pour veiller à ce que tous les motifs de discrimination interdits soient traités de façon égale devant la loi et pour éviter une hiérarchisation des droits de la personne. Cependant, la Cour a également fixé des limites à ce qui peut être considéré comme de la discrimination fondée sur la situation familiale en distinguant les obligations parentales des choix parentaux, et en exigeant que les employés qui demandent un accommodement pour tenir compte de leur situation familiale tentent d'abord de concilier leurs obligations familiales avec leurs obligations professionnelles. La Cour a établi un critère à quatre volets pour déterminer de prime abord l'existence d'une discrimination fondée sur la situation familiale. Ainsi, l'employé doit démontrer ce qui suit :

« [TRADUCTION] (i) qu'un enfant est sous sa garde et sa supervision; (ii) que cette obligation parentale engage sa responsabilité juridique envers cet enfant, contrairement à un choix personnel; (iii) qu'il ou elle a fait des efforts raisonnables pour s'acquitter de ses obligations familiales en cherchant des solutions de rechange raisonnables, et qu'aucune solution de rechange n'est raisonnablement accessible; et (iv) que la règle contestée de l'employeur l'empêche d'une manière qui est plus que dérisoire ou négligeable de s'acquitter de son obligation familiale. »

Si un employé satisfait à ce critère, l'employeur doit répondre en démontrant que sa règle ou sa condition constitue une exigence professionnelle de bonne foi et qu'il ne peut accéder à la demande de l'employé sans subir une contrainte excessive.

En appliquant ces principes aux faits, la Cour a conclu que l'ASFC avait fait preuve de discrimination envers Mme Johnstone en raison de sa situation familiale. Cependant, la Cour n'était pas tenue d'analyser la réponse de l’employeur étant donné que l’ASFC n'a présenté aucune preuve à l’effet que ses pratiques relatives aux horaires de travail constituaient une exigence professionnelle de bonne foi ou qu’elle subirait une contrainte excessive en accédant à la demande de Mme Johnstone.

Portée

Avant que la Cour ne rende cette décision, il existait deux approches contradictoires en matière de discrimination fondée sur la situation familiale au Canada : l'approche générale telle qu'utilisée par le tribunal inférieur dans cette affaire, et l'approche plus restrictive exposée par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique, laquelle exigeait que l'employé fasse la démonstration à la fois de la modification de ses conditions d'emploi et d'une entrave sérieuse à sa capacité de s'acquitter d'une obligation parentale importante.

Bien que la Cour d'appel fédérale ait maintenant établi une approche plus large à l'égard de la discrimination fondée sur la situation familiale, elle a également fixé des limites importantes en ce qui concerne le sens de l'expression « situation familiale ». De ce fait, la Cour a clairement indiqué que les employés doivent d'abord tenter de résoudre eux-mêmes les conflits entre leurs obligations familiales et leurs obligations professionnelles avant de demander l'aide de leur employeur. Il s'agit d'une percée bien accueillie par les employeurs.

Il sera intéressant de voir si l'ASFC demandera l'autorisation d'interjeter appel de cette affaire devant la Cour suprême du Canada, laquelle n'a pas encore eu la possibilité de se prononcer sur la question de la discrimination fondée sur la situation familiale. Nous vous tiendrons au courant de l'évolution de la situation.



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Auteure

  • Stephanie D. Gutierrez, Associée, Vancouver, BC, +1 604 631 3144, sgutierrez@fasken.com

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