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L’invalidité constitutionnelle des ordonnances de saisie-arrêt en Afrique du Sud

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Bulletin Travail, emploi et droits de la personne

Bon nombre d’employeurs en Afrique du Sud se préoccupent des conséquences que peuvent avoir les ordonnances de saisie-arrêt sur leurs employés. Connaissant le salaire net de ses employés, un employeur peut facilement constater à quel point l’endettement d’un employé peut être insoutenable pour ce dernier.

Le jugement rendu le 8 juillet 2015 par la Western Cape High Court de l’Afrique du Sud dans l’affaire The University of Stellenbosch Legal Aid Clinic and Others v The Minister of Justice and Correctional Services and Others (« l’affaire Stellenbosch ») donne aux employeurs l’occasion d’aider leurs employés mal en point.

Soulignons d’abord que ce jugement ne modifie en rien la validité de la dette visée par une ordonnance de saisie-arrêt, et que le créancier judiciaire peut toujours se prévaloir d’autres moyens pour recouvrer les montants qui lui sont dûs.

Ceci étant, la Magistrates’ Courts Act, 1944 (la « Loi ») prévoit deux méthodes pour l’émission d’une ordonnance de saisie-arrêt.

Selon la première méthode, une ordonnance de saisie-arrêt peut être émise par le tribunal à la suite de la tenue d’une audience visant à examiner la situation financière du débiteur judiciaire (lequel aurait reçu préalablement un avertissement écrit). Durant cette audience, le tribunal déterminerait le montant que le débiteur judiciaire serait en mesure de rembourser. Dans un tel cas, le tribunal pourrait décider d’émettre une ordonnance de saisie-arrêt. Le jugement rendu dans l’affaire Stellenbosch n’a aucune incidence sur la validité de ce processus.

Ce jugement porte plutôt sur la seconde méthode, laquelle prévoit que le créancier judiciaire peut obtenir une ordonnance si le débiteur judiciaire lui fournit son consentement par écrit. C’est cette méthode que la High Court de l’Afrique du Sud a abordé dans le cadre de cette affaire.

Finalement, la Loi prévoit qu’une ordonnance de saisie-arrêt doit être émise par un tribunal du district dans lequel l’employeur du débiteur créancier réside, exerce ses activités ou est employé.

Le jugement de la High Court

Le 8 juillet 2015, la division de Western Cape de la High Court a statué que certaines sections de la Loi sont inconstitutionnelles dans la mesure où elles permettent qu’une ordonnance de saisie-arrêt soit fondée sur le consentement du débiteur. Elle a également statué sur l’interprétation de certaines sections de la Loi traitant du territoire de compétence. Le jugement rendu établit l’inconstituionnalité des dispositions de la Loi qui permettent ce qui suit : 

  •  Les ordonnances de saisie-arrêt fondées sur des consentements écrits émis par le greffier du tribunal (et donc sans contrôle judiciaire);
  •  Les ordonnances de saisie-arrêt émises par tout tribunal situé ailleurs que dans le district où l’employeur du débiteur judiciaire réside, exerce ses activités ou est employé.

On ne peut conclure pour l’instant qu’il s’agit du dernier mot sur ce sujet. Il est toujours possible que la décision soit portée en appel. Mais ce qui est à souligner avant tout, c’est qu’une décision en matière d’invalidité constitutionnelle rendue par la High Court doit être confirmée par la Constitutional Court de l’Afrique du Sud pour qu’elle devienne exécutoire. À la lumière des jugements similaires rendus par la Constitutional Court, nous sommes d’avis que celle-ci confirmera la décision de la High Court.

Mesures pratiques

En attendant de savoir s’il y aura appel de la décision, un employeur qui souhaite aider ses employés devrait passer en revue toute ordonnance de saisie-arrêt visant ces derniers. Dans de tels cas, trois avenues possibles méritent d’être explorées.

Premièrement, l’employeur doit vérifier si l’ordonnance a été émise par un tribunal d’un district autre que celui dans lequel le lieu de travail de l’employé est situé. À cet égard :

  • L’ordonnance de saisie-arrêt signifiée à l’employeur par le shérif indiquera le nom du tribunal ayant émis l’ordonnance.
  • Toute ordonnance émise par un tribunal d’un district autre que celui du lieu de travail de l’employé doit être signalée.
  • La High Court a déterminé qu’une ordonnance émise par un tribunal siégant dans un district autre que celui où le débiteur est employé est contraire à la loi et doit être infirmée.
  • Un employé visé par une telle ordonnance peut obtenir de l’aide pour demander au tribunal que l’ordonnance soit déclarée illégale et qu’elle soit infirmée.

Deuxièmement, l’employeur doit déterminer le fondement sur lequel l’ordonnance a été émise. A-t-elle été émise par suite du consentement de l’employé, ou à la suite d’une enquête menée par un tribunal?

  • Aucune mesure n’est prévue par la réglementation pour déterminer les dispositions en vertu desquelles une ordonnance aurait été émise.
  • Il sera donc nécessaire de vérifier auprès de l’employé concerné s’il a signé un formulaire de consentement.
  • Si cela ne peut être confirmé par l’employé, il faut demander au créancier judiciaire (ou à l’avocat de ce dernier) une copie du consentement écrit fourni par l’employé.
  • Si l’ordonnance se fonde sur un consentement écrit, l’employeur peut aider l’employé à déposer une demande auprès du tribunal pour faire déclarer l’ordonnance illégale et l’annuler.

Troisièmement, il est possible de faire annuler ou de modifier une ordonnance de saisie-arrêt si l’on est en mesure de prouver que le débiteur judiciaire ne disposera pas des moyens nécessaires pour subvenir à ses besoins et à ceux des personnes à sa charge une fois que les dettes visées par l’ordonnance auront été acquittées. L’employeur peut explorer cette avenue afin d’aider l’employé concerné si les deux premières avenues indiquées précédemment ne peuvent être empruntées.

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Auteur

  • Nigel Carman, Avocat-conseil | Régimes de retraite et avantages sociaux, Johannesburg, +27 11 586 6017, ncarman@fasken.com

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