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De quelle manière un milieu de travail respectueux peut contribuer à réduire les risques de réclamation pour congédiement déguisé

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Bulletin Travail, emploi et droits de la personne | L'Espace RH

En général, lorsque des employés décident de quitter leur emploi, ils sont réputés avoir démissionné. Toutefois, si des employés quittent leur emploi parce que leur employeur a modifié de façon importante certaine des conditions essentielles de leur contrat d'emploi, ils sont réputés avoir fait l'objet d'un congédiement déguisé. Un employé sera notamment réputé avoir fait l'objet d'un congédiement déguisé si son employeur tolère un milieu de travail hostile et intolérable.

Comment un employeur peut-il gérer adéquatement des problèmes de comportement en milieu de travail pour réduire les risques de réclamation pour congédiement déguisé? C'est cette question qui a été soumise à la Cour suprême de la Colombie-Britannique dans l'affaire Baraty v. Wellons Canada Corp., 2019 BCSC 33.

Que s'est-il passé?

Le demandeur était employé par Wellons Canada Corp. (« Wellons ») et y occupait le poste de chef du service des devis. Ce service ne comptait que deux employés, soit le demandeur et un subalterne.

Les relations entre le demandeur et le subalterne étaient loin d'être amicales, au point que le demandeur en vint à se plaindre à la direction et à accuser le subalterne de travailler pour son compte pendant les heures de travail, d'insubordination, d'intimidation physique, de violence verbale et de harcèlement.

Wellons mène une enquête sur les accusations du demandeur et découvre que plusieurs de celles-ci étaient non fondées. L'enquête révèle qu'en une occasion, le subalterne avait injurié le demandeur. À la conclusion de l'enquête, Wellons impose des sanctions au subalterne.

L'enquête révèle également que les deux hommes étaient à blâmer pour leurs relations de travail orageuses. Wellons fait appel à un accompagnateur en gestion de carrière dans l'espoir d'améliorer les relations entre le demandeur et le subalterne, mais sans succès. Par la suite, le demandeur demande que le subalterne fasse l'objet d'un congédiement pour cause, mais Wellons refuse.

À la suite de l'arrivée d'un nouveau directeur général, on envisage la possibilité de regrouper le service des devis et le service des ventes. Suite à des entretiens à ce sujet, le demandeur devient convaincu qu'on avait décidé de le rétrograder. En fait, aucune décision définitive n'avait été prise au sujet du regroupement des deux services. De plus, ce regroupement n'aurait pas entraîné la rétrogradation du demandeur ni occasionné des changements quant à sa rémunération, son titre et ses principales responsabilités.

Frustré par la décision de la direction de ne pas congédier le subalterne et convaincu que Wellons avait décidé de le rétrograder, le demandeur démissionne et dépose une réclamation pour congédiement déguisé.

La décision de la Cour

Un congédiement déguisé peut revêtir deux formes : celle d'un seul acte unilatéral qui emporte la violation d'une condition essentielle du contrat, ou celle d'une série d'actes qui, considérés ensemble, montrent l'intention de l'employeur de ne plus être lié par le contrat. Le demandeur était d'avis que sa cause combinait les deux formes, mais la Cour décide que la situation ne correspond à aucune des deux formes.

En effet, une réclamation pour congédiement déguisé était prématurée puisqu'aucune décision n'avait été prise quant au regroupement du service des devis et du service des ventes. De plus, ce regroupement n'aurait pas eu d'incidence sur la rémunération, le titre ou les principales responsabilités du demandeur, et n'aurait pas donné lieu à son congédiement déguisé.

L'existence d'un milieu de travail intolérable ne pouvait pas être invoquée à l'appui de la réclamation pour congédiement déguisé. Ainsi,le critère du « milieu de travail intolérable » est un critère très élevé consistant à déterminer si, dans les circonstances, une personne raisonnable ne pourrait plus continuer d'exercer ses fonctions. La perception subjective qu'une personne a de son milieu de travail ne sera pas suffisante pour établir un congédiement déguisé. La froideur et les confrontations entre collègues de travail, et même de l'hostilité ou un conflit, ne constituent pas un congédiement déguisé si l'employé est toujours en mesure de faire son travail.

La Cour a observé que dans le cas en l'espèce, le comportement injurieux ne s'était pas répété, et que la direction n'avait pas toléré ce comportement. L'employeur a traité la plainte avec sérieux, il a imposé une sanction au subalterne pour avoir proféré des injures et il a fait appel à un accompagnateur en gestion de carrière pour aider ce dernier et le demandeur. La Cour vient à la conclusion que le comportement du subalterne n'était pas parvenu à un stade où une personne raisonnable ne pourrait pas continuer d'exercer ses fonctions.

Leçons pour les employeurs

Cette affaire permet non seulement de récapituler les dispositions de la loi concernant un environnement de travail empoisonné, mais elle offre également aux employeurs dans tous les territoires canadiens des conseils pratiques sur la façon de réduire les risques de réclamation pour congédiement déguisé :

  • Mettre en œuvre une politique prônant le respect dans le milieu de travail. Il pourrait d'ailleurs s'agir d'une exigence de la loi dans certaines provinces ou territoires. Ceci témoigne également de la volonté de préserver un milieu de travail respectueux, en plus d'aider à assurer une défense relativement à une réclamation pour congédiement déguisé, comme la réclamation déposée par le demandeur en l'espèce. 
  • Traiter les plaintes sérieusement. Si l'employeur reçoit une plainte d'un employé, il est important de prendre cette plainte au sérieux et de mener une enquête à cet égard.
  • Intervenez lorsque des actes répréhensibles sont perpétrés. Si une enquête révèle que le comportement d'un employé crée un environnement de travail hostile, prenez les mesures qui s'imposent, y compris des sanctions, pour indiquer clairement qu'un tel comportement ne sera pas toléré.
  • Réaffirmez l'engagement de l'employeur d'assurer un milieu de travail respectueux. Si des plaintes sont formulées, indiquez clairement à toutes les parties concernées que la volonté de l'employeur est d'assurer un milieu de travail respectueux.
  • Soyez prudent lorsque vous modifiez des conditions d'emploi. Dans certaines circonstances, les employeurs ont le pouvoir de modifier des conditions d'emploi, mais de telles modifications doivent toujours être analysées dans leur contexte particulier afin de s'assurer qu'elles ne donnent pas lieu à un congédiement déguisé. Il est prudent d'obtenir des conseils juridiques sur la question de savoir si des changements modifient de façon importante les conditions essentielles d'emploi d'une personne.

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