La confidentialité est au cœur de la majorité des ententes de règlement… mais qu'arrive-t-il lorsqu'un employé se vante des détails du règlement sur Internet? Dans la décision Acadia University v Acadia University Faculty Association, 2019 CanLII 47957 (disponible en anglais seulement), l'arbitre William Kaplan a jugé que l'employeur n'était pas tenu de verser la somme à laquelle il avait préalablement consenti en raison de gazouillis écrits par le plaignant, lesquels vont à l'encontre des dispositions de confidentialité de l'entente de règlement. Cette décision illustre l'importance de prévoir une disposition de confidentialité dans une entente de règlement.
Les faits
L'Acadia University Faculty Association (soit, l'association des professeurs de l'Université d'Acadia, en Nouvelle-Écosse) a déposé des griefs suite à la cessation d'emploi pour motif valable d'un professeur agrégé. À la suite des négociations, les parties ont conclu une entente de règlement. Ses modalités prévoyaient que les griefs sont réglés sans admission de responsabilité de part et d'autre. Le règlement prévoyait également que le plaignant garde les modalités de l'entente confidentielles. Le seul commentaire pouvant être fait publiquement était que les griefs ont été suivis par une médiation et ont été résolus.
Après la signature de l'entente de règlement, le professeur est allé sur son compte Twitter pour partager la nouvelle. Il a mis en ligne un gazouillis dans lequel il écrivait être un [traduction] « ancien professeur à qui on a donné raison! » L'un de ses abonnés l'a félicité : [traduction] « bravo […] j'espère que t'as eu ben du cash ». Le professeur lui a alors répondu : [traduction] « Tout ce que je peux dire c'est que je suis sorti avec un grand sourire ». Le professeur a également écrit un gazouillis dans lequel il mentionnait quitter l'université de son plein gré puisqu'il avait [traduction] « obtenu le dénouement qu'il souhaitait ».
Son employeur a fait appel à l'arbitre pour que celui-ci décide si le plaignant avait manqué à l'obligation de confidentialité prévue dans l'entente de règlement. L'arbitre a alors exigé du professeur qu'il supprime certains extraits de ses gazouillis et qu'il se conforme strictement aux modalités de l'entente. Par suite de cette directive, le professeur a cependant continué d'alimenter son fil Twitter de commentaires selon lequel son « indemnité de départ » était retenue par son employeur.
La décision de l'arbitre
Le professeur a clairement enfreint l'entente de règlement. Le seul enjeu en question concernait la conséquence de cette infraction. Après avoir expliqué que les ententes de règlement en droit du travail sont sacro-saintes, l'arbitre Kaplan a conclu que l'université n'était pas astreinte à payer le montant négocié. Il a également ajouté que le règlement avait été conclu sans admission de responsabilité ou de culpabilité de part et d'autre et que les modalités du règlement auraient dû rester confidentielles. En utilisant l'expression « donner raison » et le terme « indemnité » [traduction], les gazouillis laissaient croire que l'université reconnaissait une quelconque faute ou responsabilité alors qu'il était expressément mentionné que ce n'était pas le cas. Par conséquent, l'arbitre Kaplan a conclu que l'université n'était plus tenue de verser le montant prévu dans le règlement.
Principaux points à retenir
Ce dossier nous rappelle l'importance de la confidentialité des règlements lors de conflits de travail. Sa nature confidentielle est un fort incitatif à conclure une entente de règlement, puisque les parties peuvent conserver leurs positions sans établir de précédent sur lequel les futures ententes pourraient s'appuyer.
Les ententes de règlements doivent contenir des dispositions de confidentialité claires et sans équivoque. Les employeurs devraient prendre les mesures nécessaires pour faire appliquer ces dispositions lorsqu'ils constatent que des affirmations sont faites en violation de ces dispositions. Bien que la pénalité imposée en cas d'infraction soit ultimement l'affaire du décideur à qui l'on divulgue cette infraction, ce dossier laisse à penser que le non-versement des fonds est un remède efficace contre les violations de confidentialité de cette ampleur.