À l’aube de la conférence annuelle des membres du International Trademark Association (« INTA »), qui aura lieu du 15 au 19 novembre, l’équipe de propriété intellectuelle de Fasken vous présente la première des deux parties d’un bulletin portant sur les principaux développements en matière de marques de commerce au Canada.
1. Détention de marchandises contrefaites en transit à la frontière canadienne : avez-vous enregistré vos droits?
L’entrée en vigueur de l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (« ACEUM ») le 1er juillet 2020 a donné aux agents de l’Agence des services frontaliers du Canada (« ASFC ») le pouvoir de retenir les expéditions commerciales de marchandises en transit soupçonnées d’être contrefaites et qui passent par le Canada pour arriver à leur destination. Pour permettre à l’ASFC de retenir des marchandises en transit, les propriétaires de marques de commerce enregistrées doivent déposer une demande d’aide dans laquelle ils énumèrent leurs marques de commerce enregistrées, leurs droits d’auteur enregistrés ou non enregistrés et leurs indications géographiques protégées.
2. L’examen accéléré maintenant disponible à l’Office de la propriété intellectuelle du Canada
Compte tenu des délais d’attente importants au stade de l’examen (24 à 30 mois pour les dépôts nationaux), l’Office de la propriété intellectuelle du Canada (« OPIC ») accepte désormais les requêtes d’accélération de l’examen des demandes d’enregistrement pour une marque de commerce lorsque les critères sont satisfaits, et ce, depuis le 3 mai 2021. Une personne souhaitant bénéficier d’un examen accéléré doit soumettre un affidavit ou une déclaration solennelle dans laquelle elle indique, de façon claire, que sa situation correspond à une ou plusieurs des situations suivantes : une procédure judiciaire est attendue ou en cours; elle combat la contrefaçon de produits à la frontière canadienne; un enregistrement de la marque de commerce est nécessaire afin de protéger ses droits sur les marchés en ligne; ou un enregistrement de marque est nécessaire afin de préserver sa revendication de priorité dans un office de propriété intellectuelle étranger. L’examen a lieu dans les 10 à 14 jours, si la demande est acceptée.
3. Un regain d’intérêt pour les demandes relatives à la dépréciation de l’achalandage
La légalisation du cannabis au Canada a eu un effet secondaire involontaire sur les réclamations relatives à la dépréciation de l’achalandage en vertu de la loi canadienne sur les marques de commerce. Dans deux affaires récentes, Subway IP LLC c. Budway, Cannabis & Wellness Store, 2021 CF 583 et Toys "R" Us (Canada) Ltd. c. Herbs "R" Us Wellness Society, 2020 CF 682, des détaillants de cannabis ont été poursuivis avec succès par des propriétaires de marques bien connues dans le domaine de l’alimentation et des jouets, sur le fondement d’une dépréciation de l’achalandage, pour leur image de marque trompeuse et fortement inspirée des marques originales. Ces affaires s’inscrivent dans une tendance impliquant l’utilisation accrue de ce recours dans les litiges, qui est l’équivalent de la plainte pour dilution de marque aux États-Unis.
4. Casse-tête juridique pour certains marchands du marché gris au Canada
La vente de produits du marché gris au Canada ne constitue pas, en soi, une contrefaçon de marque de commerce. Cependant, deux affaires récentes montrent que les importateurs de produits du marché gris n’ont pas carte blanche au Canada, et que les propriétaires de marques de commerce pourraient avoir plus de recours qu’ils ne le croient contre les vendeurs de ce marché. Dans l’affaire TFI Foods Ltd. c. Every Green International Inc. 2021 CF 241, la Cour a conclu qu’une étiquette indiquant faussement que le distributeur du marché gris est le distributeur exclusif peut constituer un acte de commercialisation trompeuse, car la fausse déclaration sur l’étiquette peut nuire à l’achalandage du propriétaire de la marque. De plus, la violation d’un contrat de distribution exclusive de produits de marque peut rendre une partie passible de dommages, tant réels que punitifs. Dans l’affaire Costco Wholesale Canada Ltd. c. Simms Sigal & Co. Ltd, 2020 QCCA 1331, la Cour d’appel du Québec a jugé le grossiste Costco responsable de dommages réels et punitifs parce qu’il a vendu des jeans haut de gamme malgré le fait que le distributeur exclusif de ces jeans l’ait informé de ses droits au Canada. Ces cas démontrent qu’il vaut parfois le coup de reconsidérer les stratégies d’application de la loi contre la pratique de la commercialisation de produits du marché gris au Canada.
5. Les objections de l’OPIC pour cause d’absence de caractère distinctif inhérent continuent de se multiplier
Les lois canadiennes sur les marques de commerce ont fait l’objet d’une réforme majeure en juin 2019. Entre autres nouveautés, les examinateurs ont maintenant le droit de s’opposer à l’enregistrement sur la base d’une absence de caractère distinctif inhérent. Les examinateurs ont exercé ce nouveau pouvoir avec beaucoup de vigueur depuis la réforme, ce qui a entraîné un nombre croissant de rejets préliminaires. Cette vigilance accrue s’explique en partie par le fort intérêt porté à la nécessité de déterminer si les autres importateurs devraient pouvoir, dans le cours normal de leurs activités, utiliser la même marque de commerce en association avec les mêmes produits ou services, et ce, même s’il n’y a aucune preuve d’un intérêt réel de la part de leurs vis-à-vis. Les avocats canadiens doivent maintenant être encore plus créatifs pour contrer ces objections.