Le lundi 22 novembre, la Chambre des communes du Canada se réunira pour la première fois depuis les élections générales fédérales. Préparé pour les entreprises, les organisations et les particuliers qui ont un intérêt pour le fonctionnement de nos institutions démocratiques, ce guide de base décrit les étapes qui précèdent et qui suivent la reprise des activités parlementaires.
Contexte
La dernière séance de la Chambre des communes s’est tenue le 23 juin. Le Sénat, qui siège souvent plus tard que la Chambre des communes pour examiner les projets de loi adoptés par la Chambre, s’est réuni pour la dernière fois le 29 juin. Les deux chambres ont ensuite ajourné jusqu’aux dates de retour prévues au cours de la troisième semaine de septembre.
Suivant la dissolution du Parlement le dimanche 15 août, une élection générale — au cours de laquelle les Canadiens ont eu la chance de déterminer qui les représentera à la Chambre des communes — a été fixée pour le 20 septembre. Lorsque les résultats des 44es élections générales ont été comptabilisés, le Parti libéral du Canada, dirigé par le très honorable Justin Trudeau, avait remporté 160 sièges.
Comme l’explique notre publication complémentaire intitulée Forming Government in Canada: Realities and Myths (disponible uniquement en anglais), quel que soit le résultat des élections, un premier ministre reste en poste jusqu’à sa démission, son décès ou sa destitution. Le premier ministre Trudeau continue donc d’assumer ses fonctions et rencontrera le nouveau Parlement tout en dirigeant un gouvernement minoritaire.
Le Cabinet
Comme les premiers ministres canadiens et les premiers ministres provinciaux n’ont pas de mandat fixe, ils n’ont pas besoin de prêter à nouveau serment s’ils sont réélus. Il arrive toutefois qu’un premier ministre choisisse quand même de prêter à nouveau le serment d’office. Cependant, ce choix est purement symbolique.
Le pouvoir exécutif est conféré à la Couronne et administré par le premier ministre et le Cabinet. Afin de mener à bien les affaires du gouvernement, le premier ministre choisit un certain nombre de personnes pour diriger les ministères fédéraux, chacun(e) d’entre eux/elles étant généralement (mais pas obligatoirement) un(e) membre élu(e) de la législature appartenant au parti au pouvoir. Une fois assermentés pour diriger les ministères et assumer d’autres responsabilités, ces ministres forment collectivement le « Cabinet ». Le Cabinet élabore des politiques, administre la fonction publique et met en œuvre (au nom du gouverneur général) une forme de mesure législative subordonnée connue sous le nom de règlements.
Il est de tradition qu’un premier ministre en exercice procède à un remaniement ministériel après des élections générales, ce qui a été fait par le premier ministre Trudeau le 26 octobre.
Tous les ministres ne sont pas égaux. Avant 2015, il était fréquent que les ministres « de second plan », connus à différentes époques sous le nom de ministres d’État ou de secrétaires d’État, soient nommés pour aider d’autres ministres et, en reconnaissance de leurs rôles secondaires, soient légèrement moins payés. Depuis les élections générales de 2015, la pratique consistant à nommer des ministres d’État pour aider les ministres ayant plus d’expérience a été poursuivie en privé, mais publiquement, le terme « ministre d’État » a été abandonné, et tous les ministres sont maintenant payés le même salaire.[1] Les cinq ministres « de second plan » (c’est-à-dire les ministres d’État) de novembre 2015 étaient tous des femmes, dont trois ont été nommées pour aider des hommes occupant des postes supérieurs.[2]
Le premier Cabinet Trudeau, formé en novembre 2015, était composé de 30 ministres, en plus du premier ministre. Au moment de la dissolution de la législature en août 2021, le Cabinet comptait 34 membres, plus le premier ministre. Depuis le 26 octobre, le Cabinet est maintenant composé du premier ministre et de 38 autres membres. Parmi eux, six femmes et deux hommes sont en principe des ministres d’État[3] nommés pour aider des ministres de plus haut rang (qui sont presque tous des hommes).[4] Le Cabinet fédéral n’atteint la parité que si l’on ne tient pas compte du fait que les décrets du conseil désignent six femmes ministres d’État pour aider les hommes au sein du Cabinet.
Lettres de mandat
Il est désormais habituel (bien que ce ne soit pas une obligation légale) que le premier ministre remette à chaque ministre une « lettre de mandat » qui définit ce qui est attendu du ministre, y compris les objectifs politiques à atteindre. Par souci de transparence, le premier ministre Trudeau publie les lettres de mandat qu’il émet. Les lettres de mandat de son prédécesseur, le premier ministre Stephen Harper, sont restées confidentielles. Les lettres de mandat émises à la suite du remaniement ministériel du 26 octobre ne sont pas encore publiques.
Assermentation des députés
Les premiers ministres n’ont pas de mandat fixe : un premier ministre en exercice n’a donc pas besoin de prêter à nouveau serment après chaque élection. En revanche, tous les membres de la Chambre des communes doivent le faire.
Lorsque les résultats de l’élection sont finaux, le directeur général des élections en donne avis à la Gazette du Canada et envoie une liste certifiée des députés élus au greffier de la Chambre des communes.
Avant de prendre place à la Chambre, les députés élus doivent prêter ou affirmer le serment d’allégeance à la Couronne, dont le texte figure dans la cinquième annexe de la Loi constitutionnelle de 1867. Les députés signent tous un livre appelé le registre de prestation, sur lequel figure le même serment. Le serment et la signature peuvent avoir lieu avant que le greffier ne reçoive la liste certifiée, et ont généralement lieu avant le jour d’ouverture d’une législature. Comme expliqué précédemment, le serment est prêté chaque fois qu’un député est élu ou réélu.
Ouverture de la législature
Le gouverneur général, sur avis du premier ministre, décide de la date à laquelle le Parlement sera convoqué pour se réunir pour la première fois. Dans ce cas, le Parlement a été convoqué pour se réunir le 22 novembre. Avant que les députés et les sénateurs puissent s’occuper d’autres affaires, la Chambre des communes doit d’abord élire un président. Ensuite, les députés et les sénateurs assisteront à la lecture cérémonielle des raisons pour lesquelles le Parlement a été convoqué (discours du Trône).
Élection d’un président de la Chambre
Selon une tradition de longue date, le premier jour d’une nouvelle législature commence par des rituels symboliques qui précèdent la lecture du discours du Trône. Les parlementaires débutent les motions cérémonielles, et se font ensuite interrompre pour se faire informer (conformément à une coutume séculaire) qu’ils doivent d’abord élire un président avant que le discours ne soit lu.
L’huissier du bâton noir, au nom du Sénat, se rend à la Chambre des communes et, après être éventuellement admis, convie les députés à se rendre immédiatement au Sénat. Lorsque les députés, conduits par le greffier de la Chambre des communes, arrivent dans la salle du Sénat, ils y trouvent un suppléant du gouverneur général. Le suppléant ne prend pas la parole; c’est le Président du Sénat qui s’adresse aux députés au nom du suppléant. Le Président du Sénat informe les députés que le gouverneur général n’a pas jugé bon de déclarer les causes de la convocation du Parlement actuel avant que le président de la Chambre des communes n’ait été choisi conformément à la loi.
Les députés retournent ensuite à la Chambre des communes où ils élisent un président par scrutin secret. Le député d’arrière-ban avec le plus d’ancienneté préside l’élection.
Discours du Trône
Après l’élection du président, les députés retournent au Sénat où le gouverneur général lit le discours du Trône. Habituellement, cela se produit le jour suivant l’élection du président, mais en 2019, cela s’est produit plus tard le même jour.
Les députés sont conduits au Sénat par l’huissier du bâton noir, le sergent d’armes, le président et le greffier. À la barre du Sénat, le président élu de la Chambre se tient sur une petite estrade, enlève son chapeau de président et récite un court discours revendiquant les droits et privilèges de la Chambre. Le Président du Sénat, au nom du gouverneur général, récite la réponse. Après l’échange de ces déclarations rituelles, le gouverneur général ouvre officiellement la première session du Parlement en lisant le discours du Trône.
Un discours du Trône ouvre chaque session du Parlement, et pas seulement la première session qui suit une élection générale. Il est normalement prononcé au Sénat en présence des membres des deux Chambres. Le discours est rédigé par le gouvernement et le premier ministre détermine en dernier ressort son contenu. Le discours expose généralement l’opinion du gouvernement sur la situation du pays et donne une indication des projets de loi que le gouvernement a l’intention de présenter.
Le plus récent discours du Trône a été énoncé le 23 septembre 2020, au début de la deuxième session de la 43e législature. Ce discours présentait les grandes priorités du gouvernement, notamment la protection des Canadiens contre la COVID-19, l’aide aux victimes de la pandémie, un programme de résilience pour la classe moyenne, la réconciliation, la lutte contre le racisme systémique et la place du Canada dans le monde.
Comités
Dans le cadre des fonctions du Parlement, des comités parlementaires sont formés séparément par la Chambre des communes et le Sénat.[5]
Ces comités examinent en détail les projets de loi ainsi que les lois existantes, et surveillent les activités de l’appareil gouvernemental en menant des enquêtes sur des programmes et des politiques spécifiques, en examinant les dépenses passées et prévues et en examinant les nominations non judiciaires.
Il faut plusieurs jours de séance — qui s’étendent parfois sur plusieurs mois — pour que les comités de la Chambre des communes soient constitués et commencent à fonctionner. Le premier comité à être nommé est le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, qui agit comme comité de sélection et qui prépare les listes de membres pour tous les autres comités.
La Chambre peut nommer le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre le jour même du discours du Trône (comme ce fut le cas en 2015), ou attendre plusieurs jours de séance (comme ce fut le cas en 2019, où le comité a été nommé lors du cinquième jour de séance). Il peut ensuite s’écouler plusieurs jours de séance supplémentaires (par exemple, en 2019, six jours de séance échelonnés sur sept semaines) avant que le comité ne tienne sa première réunion et n’élise un président et des vice-présidents. Selon le Règlement, le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre est censé faire rapport à la Chambre sur la sélection des membres des comités dans les dix jours de séance suivant sa nomination. (Les whips des partis soumettent le nom des membres des comités au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, qui les inclut dans son rapport.) En général, la Chambre adopte le rapport le même jour. Si le délai de dix jours de séance est respecté, l’ensemble du processus prend du temps. Au cours de la 1re session de la 42e législature, le discours du Trône a été lu le 4 décembre 2015 et les comités ont été sélectionnés le 29 janvier 2016. Au cours de la 1re session de la 43e législature, le discours du Trône a été lu le 5 décembre 2019 et les comités ont été sélectionnés le 5 février 2020.
La première réunion de chaque comité doit avoir lieu dans les 10 jours de séance suivant l’adoption du rapport du comité de sélection (Comité de la procédure et des affaires de la Chambre), et est généralement consacrée à l’élection du président et des vice-présidents. En 2015 et 2019, de nombreux comités ne se sont pas mis au travail avant la mi-février ou la fin février. (Il est toutefois possible pour la Chambre de nommer un comité sans attendre le rapport du comité de sélection.)
Selon le règlement de la Chambre, la taille des comités est de dix membres, mais au cours de la 43e législature, afin d’atteindre la proportionnalité, la Chambre a fixé la taille des comités à 11 (comités présidés par des députés de l’opposition) et 12 (comités présidés par des députés libéraux). La représentation des partis au sein des comités est à peu près proportionnelle à la position des partis à la Chambre. Le président et les vice-présidents d’un comité sont élus par ses membres, bien que les articles du Règlement prévoient que les présidents des comités doivent être issus du parti au pouvoir, à l’exception d’un petit nombre de comités qui doivent être présidés par des députés de l’opposition officielle.
[1] Voir les décrets suivants : C.P. 2015-1225, déléguant l’honorable Kirsty Duncan auprès du ministre de l’Industrie; C.P. 2015-1226, déléguant l’honorable Bardish Chagger auprès du ministre de l’Industrie; C.P. 2015-1227, déléguant l’honorable Carla Qualtrough auprès du ministre du Patrimoine canadien et le ministre de l’Emploi et du Développement social; C.P. 2015-1228, déléguant l’honorable Patricia Hajdu, auprès du ministre du Patrimoine canadien; C.P. 2015-1229, déléguant l’honorable Marie-Claude Bibeau auprès du ministre des Affaires étrangères.
[2] Un ministre a été à la fois nommé pour détenir un portefeuille complet et affecté comme ministre d’État pour aider un autre ministre.
[3] Voir : C.P. 2021-0915, déléguant l’honorable Marci Ien auprès du ministre de l’Emploi et du Développement social et le ministre du Patrimoine canadien; C.P. 2021-0916, déléguant l’honorable Kamal Khera auprès du ministre de l’Emploi et du Développement social; C.P. 2021-0917, déléguant l’honorable Helena Jaczek auprès du ministre de l’Industrie; C.P. 2021-0918, déléguant l’honorable Gudrid Hutchings auprès du ministre de l’Industrie; C.P. 2021-0919, déléguant l’honorable William Blair auprès du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile; C.P. 2021-0920, déléguant l’honorable Ginette Petitpas Taylor auprès du ministre du Patrimoine canadien; C.P. 2021-0921, déléguant l’honorable Karina Gould auprès du ministre de l’Emploi et du Développement social; C.P. 2021-0922, déléguant l’honorable Randy Boissonnault auprès du ministre de l’Industrie et le ministre des Finances.
[4] Les ministres d’État actuel ont été délégués auprès de l’honorable Seamus O’Regan, l’honorable Pablo Rodríguez, l’honorable François-Philippe Champagne, l’honorable Marco Mendicino et l’honorable Chrystia Freeland.
[5] Il existe également quelques comités mixtes comptant des membres des deux Chambres.