Le 3 novembre 2022, l’Énoncé économique de l’automne de 2022, déposé au Parlement, a confirmé que les nouvelles exigences en matière de déclaration fiscale pour les fiducies s’appliqueront aux années d’imposition se terminant après le 30 décembre 2023. Cela signifie que, à moins d’être exemptées, comme il est expliqué plus loin, les fiducies existantes dont l’année d’imposition se termine le 31 décembre seront maintenant assujetties aux nouvelles exigences en matière de déclaration pour 2023.
Dans son budget fédéral de 2018, le gouvernement fédéral avait initialement annoncé des mesures afin d’exiger des déclarations et des renseignements additionnels de la part des fiducies sur une base annuelle. Ces modifications visaient principalement à accroître la transparence des fiducies ainsi que celle des renseignements concernant leur propriété effective et leur contrôle juridique. Le texte qui suit résume les plus récentes propositions législatives se rapportant aux exigences supplémentaires en matière de déclaration pour les fiducies.
Législation actuelle
Le paragraphe 150(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu[1] (la « LIR ») énonce les exigences relatives à la production de déclarations de revenu pour diverses catégories de contribuables, y compris les fiducies. Le paragraphe 150(1.1) de la LIR prévoit des exceptions à l’application du paragraphe 150(1), selon lesquelles la production d’une déclaration de revenu n’est pas requise. En vertu des règles actuelles, une fiducie est généralement tenue de produire une déclaration de revenu annuelle (communément appelée une « déclaration T3 ») si elle a des impôts à payer pour l’année, ou si elle distribue ou attribue la totalité ou une partie de son revenu ou de son capital à ses bénéficiaires. Une fiducie inactive ou une fiducie n’ayant pas d’impôt à payer pour l’année n’est généralement pas tenue de produire une déclaration T3.
Législation proposée – Applicable aux années d’imposition se terminant après le 30 décembre 2023
Le présent bulletin traite de trois changements importants qui sont susceptibles d’avoir une incidence sur les déclarations des fiducies des clients :
- Premièrement, les fiducies « expresses » (dont il est question plus en détail ci-après) qui résident ou sont réputées résider au Canada devront produire une déclaration T3 même si elles n’ont aucun revenu à déclarer au cours d’une année donnée.
- Deuxièmement, les exigences en matière de déclaration englobent les arrangements de « prête-nom ».
- Enfin, les fiducies qui sont tenues de produire une déclaration T3 doivent fournir les renseignements suivants : (i) le nom; (ii) l’adresse; (iii) la date de naissance (dans le cas des particuliers); (iv) le territoire de résidence; et (v) le numéro d’identification fiscal (NIF) pour certaines personnes (voir les explications ci-après) au cours d’une année donnée.
Les propositions législatives limitent considérablement les exceptions générales qui sont actuellement prévues au paragraphe 150(1.1) de la LIR. Plus précisément, le paragraphe proposé 150(1.2) indique que le paragraphe 150(1.1) de la LIR ne s’appliquera à aucune fiducie expresse qui est résidente ou réputée résidente du Canada. Pour les fins du droit civil québécois, l’expression « fiducie expresse » réfère à une fiducie autre qu’une fiducie établie par la loi ou par un jugement. L’expression « fiducie expresse » n’est pas autrement définie explicitement dans la LIR. La jurisprudence et les commentaires de l’ARC ont confirmé qu’une fiducie expresse désigne généralement une fiducie créée avec l’intention expresse de l’auteur[2] . Par conséquent, toute fiducie expresse qui réside ou est réputée résider au Canada devra produire une déclaration T3, même si elle n’a aucun revenu à déclarer au cours d’une année donnée.
Le paragraphe proposé 150(1.2) mentionne toutefois un certain nombre de fiducies qui continueront d’être exemptées de l’exigence de produire une déclaration T3, notamment :
- les fiducies qui existent depuis moins de trois mois à la fin de l’année;
- les fiducies qui détiennent des actifs dont la valeur est inférieure à 50 000 $ tout au long de l’année d’imposition (si les seuls actifs détenus par la fiducie au cours de l’année sont constitués de l’un ou plusieurs des éléments suivants : des espèces, certains titres de créance ou droits cotés à une bourse de valeurs désignée, des actions du capital-actions d’une société de placement à capital variable, des parts d’une fiducie de fonds commun de placement, des participations dans une fiducie créée à l’égard du fonds réservé connexe et des participations à titre de bénéficiaire d’une fiducie dont la totalité des unités sont cotées à une bourse de valeurs désignée);
- certaines fiducies réglementées (comme les comptes de fiducie généraux d’un avocat);
- les fiducies qui sont admissibles à titre d’organisations à but non lucratif ou d’organismes de bienfaisance enregistrés;
- les fiducies de fonds commun de placement, les fiducies créées à l’égard du fonds réservé et les fiducies principales;
- les fiducies dont la totalité des unités sont cotées à une bourse de valeurs désignée;
- les successions assujetties à l’imposition à taux progressifs;
- les fiducies admissibles pour personne handicapée;
- les fiducies de soins de santé au bénéfice d’employés;
- certaines fiducies à financement public;
- les fiducies régies par des régimes enregistrés, notamment :
- les régimes de participation différée aux bénéfices;
- les régimes enregistrés d’épargne (par exemple, REER, REEE, CELI);
- les comptes d’épargne pour l’achat d’une première propriété;
- les fiducies pour l’entretien d’un cimetière et les fiducies régies par des arrangements de service funéraires.
Un autre changement d’importance aura une incidence sur les clients qui ont recours à la « planification en matière de prête-nom ». Le paragraphe 150(1.3) des propositions législatives prévoit explicitement que les nouvelles règles de déclaration s’appliquent aux arrangements de « prête-noms ». En d’autres termes, une fiducie ayant une structure dans le cadre de laquelle il est raisonnable de considérer que les fiduciaires agissent à titre de représentants des bénéficiaires de la fiducie relativement à toutes les opérations touchant ses biens sera considérée comme une fiducie aux fins de l’article 150 de la LIR. Par conséquent, lorsqu’un prête-nom (comme une société) détient des biens immobiliers et/ou des comptes de placement en fiducie pour le ou les propriétaires bénéficiaires, les nouvelles obligations en matière d’information et de déclaration s’appliqueront à l’arrangement de fiducie.
Il est important de noter que les fiducies qui doivent produire une déclaration T3 devront fournir l’information additionnelle qui est proposée à l’article 204.2 du Règlement de l’impôt sur le revenu (le « RIR ») pour les années d’imposition se terminant après le 30 décembre 2023[3]. Plus particulièrement, ces fiducies ou arrangements de fiducie doivent fournir les renseignements suivants : (i) le nom; (ii) l’adresse; (iii) la date de naissance (dans le cas des particuliers); (iv) le territoire de résidence; et (v) le numéro d’identification fiscal (NIF) pour les personnes suivantes au cours de l’année :
- l’auteur;
- chacun des fiduciaires;
- toute personne qui peut (selon l’acte de fiducie ou un accord connexe) exercer une influence sur les décisions du fiduciaire concernant l’affectation du revenu ou du capital;
- chacun des bénéficiaires.
Aux fins du RIR, une fiducie sera généralement considérée comme ayant satisfait aux exigences supplémentaires en matière de déclaration si les renseignements énumérés ci-dessus sont communiqués pour chaque bénéficiaire dont l’identité est connue ou peut être établie avec un effort raisonnable au moment de la production de la déclaration T3.
Pénalités
Les propositions législatives énoncent qu’un faux énoncé ou une omission dans une déclaration T3, fait sciemment ou découlant d’une faute lourde, entraînera une pénalité égale au plus élevé des montants suivants : (i) 2 500 $; ou (ii) 5 % de la juste valeur marchande totale la plus élevée des biens détenus par la fiducie à tout moment pendant l’année.
À quoi s’attendre?
Bien qu’il subsiste une certaine incertitude quant au moment de la prise d’effet des nouvelles obligations en matière de déclaration et à leur finalité, il est maintenant plus important que jamais pour les fiduciaires d’une fiducie de tenir des documents adéquats et à jour relativement à la fiducie et de s’assurer du respect continu de la LIR.
Pour savoir comment nous pouvons vous aider à vous assurer de respecter vos obligations de déclaration, veuillez communiquer avec un membre de l’équipe des Services aux clients privés.
[1] Loi de l’impôt sur le revenu, S.R.C. 1985 (5e suppl.).
[2] Publications gouvernementales – Questions et réponses de l’ARC – Exigences en matière de déclaration pour les fiducies, 14 janvier 2022
[3] Règlement de l’impôt sur le revenu, C.R.C. 1977, ch. 945.