Des modifications importantes au Code de déontologie des lobbyistes (« Code ») entreront en vigueur le 1er juillet 2023. Ces changements auront une incidence sur toutes les entreprises et organisations qui font du lobbying auprès du gouvernement fédéral, y compris celles dont les activités de lobbying visent des subventions, des contributions et des avantages financiers.
Le Code s’appliquera également aux employés et aux cadres dirigeants qui font du lobbying au nom d’un employeur (c’est-à-dire les « lobbyistes salariés »), ainsi qu’aux consultants et aux sous-traitants qui font du lobbying, moyennant paiement, pour le compte d’un client (c’est-à-dire les « lobbyistes-conseils »).
L’interdiction des communications avec des « relations étroites » est clarifiée
La règle 4.1 du nouveau Code interdira aux lobbyistes de faire du lobbying auprès d’un titulaire d’une charge publique[1] « lorsqu’on pourrait raisonnablement penser que ce fonctionnaire a un sentiment d’obligation envers » le lobbyiste en raison d’une « relation étroite ». Dans le nouveau Code, le terme « relation étroite[2] » est maintenant défini comme suit :
Des liens étroits — fondés sur une affection personnelle, sur une confiance ou une loyauté mutuelle, ou sur une interdépendance professionnelle, commerciale ou financière — qui vont au-delà d’une simple connaissance[3].
L’interdiction s’appliquera aux communications avec des « relations familiales étroites » et des « relations personnelles étroites ». Elle visera également certaines relations professionnelles, notamment les :
- « relations de travail étroites, comme des relations professionnelles importantes ou de longue date tissées dans le cadre d’une étroite collaboration au travail »;
- « relations financières étroites, comme le fait de se partager la propriété d’un bien ou de gérer conjointement des investissements partagés »;
- « des relations d’affaires étroites, comme détenir ensemble une entreprise ou un consortium d’entreprises ou collaborer étroitement au sein de cette entreprise ou de ce consortium d’entreprises[4] ».
L’interdiction s’appliquera aussi longtemps que la « relation étroite » existera. En d’autres termes, il ne s’agit pas d’une restriction limitée dans le temps.
Une nouvelle interdiction supplémentaire de lobbying sera imposée
La règle 4.3 du nouveau Code introduit une interdiction supplémentaire qui s’applique aux communications avec des titulaires d’une charge publique non visées par la règle 4.1.
Cette règle, qui agit comme un filet de sécurité, interdira à un lobbyiste de faire du lobbying auprès d’un titulaire d’une charge publique « lorsqu’on pourrait raisonnablement penser que ce fonctionnaire a un sentiment d’obligation envers » le lobbyiste « en raison de circonstances qui dépassent la portée des autres règles » du Code[5].
La règle 4.3 s’appliquera, par exemple, lorsqu’un titulaire d’une charge publique a déjà été l’employé, l’employeur ou le client d’un lobbyiste[6]. Elle s’appliquera également lorsqu’un « membre de la famille proche du fonctionnaire » est actuellement l’employé, l’employeur ou le client d’un lobbyiste[7].
Il est interdit aux lobbyistes d’induire en erreur et de partager des renseignements confidentiels
Les règles 2.1 et 2.2 continueront d’interdire aux lobbyistes de faire des communications trompeuses et de partager des renseignements confidentiels reçus de titulaires d’une charge publique.
- La règle 2.1 impose aux lobbyistes l’obligation positive de prendre « des mesures raisonnables pour ne pas induire en erreur » quiconque, y compris les titulaires d’une charge publique et le public[8]. Les lobbyistes devraient donc s’assurer de l’exactitude et de l’exhaustivité de l’information contenue dans leurs communications.
- La règle 2.2 interdit aux lobbyistes d’utiliser ou de partager (avec quiconque) des renseignements confidentiels reçus d’un titulaire d’une charge publique, à moins que celui-ci n’y consente.
En vertu de la règle 1.1, il sera toujours interdit aux lobbyistes de dissimuler l’identité de leurs clients ou de leur employeur lors de communications avec des titulaires d’une charge publique.
La période de restriction pour le « travail politique » est révisée
La règle 4.2 interdira à un lobbyiste de faire du lobbying auprès d’un titulaire d’une charge publique pendant une période pouvant aller jusqu’à 24 mois après la réalisation d’un « travail politique » pour le bénéfice de ce titulaire d’une charge publique[9]. (Le code actuel, en vigueur jusqu’au 30 juin, prévoit une période de restriction pouvant aller jusqu’à 48 mois[10].)
Dans le nouveau Code, le travail politique est défini au sens large comme un travail « de nature politique ou partisane […] pour le bénéfice d’un fonctionnaire ». Il comprend donc le travail rémunéré et non rémunéré, le travail effectué avant, pendant et après les périodes électorales, ainsi que les activités réalisées pour des candidats à l’élection, des candidats à l’investiture et des candidats à la chefferie[11].
Le travail politique comprend les activités suivantes :
- faire du porte à porte;
- s’occuper de la logistique d’un événement politique ou de campagne;
- coordonner la logistique pour le bureau de campagne;
- élaborer ou coordonner des messages ou des campagnes publicitaires politiques;
- diriger ou coordonner des recherches politiques ou des analyses de données;
- distribuer ou diffuser du matériel pour des campagnes;
- s’engager dans la collecte de fonds, y compris solliciter ou recueillir des dons;
- organiser des activités de financement politique;
- organiser des événements politiques ou les événements d’une campagne;
- effectuer des recherches politiques ou des tâches liées aux analyses de données;
- préparer un candidat ou un fonctionnaire en vue d’une présentation, y compris les discours et les débats;
- servir à titre de chef de campagne;
- servir à titre de porte-parole désigné;
- servir dans un poste d’échelon supérieur dans une course à la chefferie ou campagne électorale;
- faire partie de la direction d’une association de circonscription.
Le travail politique ne comprend pas les activités suivantes :
- assister à un événement de financement ou de campagne;
- adhérer à un parti politique;
- exprimer des opinions politiques personnelles;
- faire une contribution politique;
- afficher personnellement des pancartes électorales;
- publier en ligne du matériel numérique de campagne pendant une période électorale.
Durant la période de restriction, toutes les communications de lobbying avec le titulaire d’une charge publique (qui a bénéficié du travail politique) ainsi qu’avec ses « associés » sont interdites[12].
- Dans le cas d’un député de la Chambre des communes, un « associé » comprend tous les membres de son personnel (y compris les membres du personnel parlementaire et de circonscription).
- Dans le cas d’un ministre[13], un « associé » comprend tous les membres de son personnel (y compris les membres du personnel ministériel, parlementaire et de circonscription). Le secrétaire parlementaire du ministre, le cas échéant, et tous les membres du personnel du secrétaire parlementaire sont aussi des associés.
- Dans le cas d’un sénateur, un « associé » comprend tous les membres de son personnel (y compris les membres du personnel parlementaire et les membres du personnel de circonscription, le cas échéant).
La durée exacte d’une période de restriction dépendra d’un certain nombre de facteurs, notamment du type, du volume et de la nature du travail politique effectué. Une nouvelle disposition du Code permet à la commissaire de réduire période de restriction applicable à un lobbyiste à la suite d’une évaluation de ces facteurs [14].
Les employés et les dirigeants qui font du lobbying ont une responsabilité accrue
En vertu de la Loi sur le lobbying, les employés et les dirigeants qui font du lobbying au nom de leur employeur ne sont pas tenus de déclarer leurs activités de lobbying individuellement. Plutôt, un seul enregistrement doit être déposé, au nom de l’ensemble de l’entreprise ou de l’organisation, divulguant les activités de lobbying de tous les employés et dirigeants de cette entreprise ou organisation[15].
La responsabilité légale de soumettre, réviser et mettre à jour l’enregistrement appartient à l’employé ou dirigeant « rémunéré qui exerce les fonctions les plus élevées au sein d’une personne morale ou d’une organisation[16] ». Dans la plupart des entreprises et des organisations, c’est le chef de la direction qui assume cette responsabilité.
(Quiconque omet de fournir un enregistrement, ou transmet un enregistrement incomplet, tardif ou inexact, pourrait se voir imposer une amende maximale de 200 000 $ et/ou une peine d’emprisonnement maximale de deux ans[17].)
Cela dit, la règle 1.3 impose aux employés et aux dirigeants l’obligation d’informer leur employeur de leurs « activités de lobbying afin de soutenir un enregistrement et des déclarations exacts[18] ». Ainsi, les employés et les dirigeants qui cachent des renseignements à leur employeur peuvent faire l’objet d’une enquête par le commissariat au lobbying.
Une disposition connexe de la règle 1.4 stipule que le chef d’une entreprise ou d’une organisation doit « informe[r] les employés qui font du lobbying au nom de l’employeur de leurs obligations en vertu d[u] Code[19] ». Par conséquent, les chefs d’entreprise devraient s’assurer de mettre à jour leurs procédures, politiques et programmes internes de conformité en matière de lobbying – ou s’ils n’en ont pas en place, de les créer et de les mettre en œuvre – et d’offrir une formation à leurs employés à ce sujet.
Le Code s’applique aux appels au grand public
Le nouveau Code indique clairement que toutes ses interdictions et exigences s’étendent à l’utilisation des appels au grand public. La Loi sur le lobbying définit les appels au grand public comme toute communication directe ou au moyen d’un média à grande diffusion avec le public, qui a pour but de « persuader celui-ci de communiquer directement avec le titulaire d’une charge publique en vue de faire pression sur lui afin qu’il appuie un certain point de vue[20] ».
Par conséquent, toutes les entreprises et organisations devraient s’assurer que leurs appels au grand public, y compris leurs campagnes sur les médias sociaux, les identifient clairement[21] et ne contiennent pas d’informations trompeuses[22]. Elles devraient également s’assurer que les membres de leur personnel qui doivent respecter des restrictions d’après-emploi en matière de lobbying, comme la période de restriction décrite plus haut, ne contribuent pas à de telles campagnes.
Il y a un risque élevé d’application de la loi
Il est fortement recommandé aux lobbyistes de consulter un conseiller juridique avant de répondre aux demandes du régulateur ou de communiquer de façon proactive avec le commissariat. La commissaire au lobbying dispose de vastes pouvoirs d’enquête, dont les suivants :
- ordonner à des personnes de témoigner oralement ou par écrit sous serment[23];
- convoquer et faire comparaître des personnes devant le commissaire[24];
- ordonner la production de documents et pièce utiles à l’enquête[25].
La commissaire dispose également de pouvoirs étendus pour transmettre des cas à la police – et de la capacité de publier des rapports publics. (En outre, les commissions parlementaires mènent désormais fréquemment des enquêtes parallèles – télévisées – sur des questions liées au lobbying.)
Si vous souhaitez obtenir plus d’information sur les modifications au Code de déontologie des lobbyistes, veuillez communiquer avec un membre de notre équipe de droit politique. Vous pouvez également consulter notre autre bulletin sur les nouvelles règles relatives aux cadeaux, aux marques d’hospitalité et aux activités de divertissement offerts aux employés du secteur public.
[1] En vertu de la Loi sur le lobbying et du Code, le lobbying comprend toute communication avec un titulaire d’une charge publique au sujet de l’élaboration, du dépôt ou de la modification d’un projet de loi, d’une résolution, d’une proposition législative, d’un règlement, d’une orientation ou d’un programme du gouvernement fédéral. Le lobbying inclut aussi les communications au sujet de « l’octroi de subventions, de contributions ou d’autres avantages financiers » par ou au nom du gouvernement fédéral et, dans certains cas, « l’octroi de tout contrat » par ou au nom du gouvernement fédéral.
[2] Code de déontologie des lobbyistes (2023) (« Code »), règle 4.2.
[3] Code, section « Définitions ».
[4] Ibid.
[5] Code, règle 4.3.
[6] Code, section « Définitions ».
[7] Ibid.
[8] Une forme de lobbying connue sous le nom d’« appels au grand public » comprend la communication avec les membres du public. Il serait contraire à la règle 2.1 d’induire le public en erreur.
[9] Code, règle 4.2.
[10] Code de déontologie des lobbyistes (2015), règle 9.
[11] Code, section « Définitions ».
[12] Ibid.
[13] Le Code précise que le terme « ministre » désigne aussi les ministres d’État. Un ministre d’État est un ministre subalterne assigné par décret pour aider un ministre. Bien que le rôle de ministre d’État continue d’exister, depuis le 4 novembre 2015, les ministres d’État sont simplement désignés comme des « ministres ».
[14] Code, règle 4.2.
[15] Loi sur le lobbying (la « Loi »), paragraphe 7(1).
[16] Loi, paragraphe 7(6).
[17] Loi, alinéa 14(1)b).
[18] Code, règle 1.3.
[19] Code, règle 1.4.
[20] Loi, alinéas 5(2)j) et 7(3)k).
[21] Code, règle 1.1.
[22] Code, règle 2.1.
[23] Loi, paragraphe 10.4(2).
[24] Ibid.
[25] Ibid.