La Loi sur la lutte contre le travail forcé et le travail des enfants dans les chaînes d’approvisionnement canadiennes (la « LTFTE ») est entrée en vigueur le 1er janvier 2024. Bien que l’attention portée à la LTFTE ait surtout porté sur son incidence sur les sociétés canadiennes, la LTFTE a aussi des répercussions importantes sur les organismes du secteur public et leurs activités d’approvisionnement.
Dans le présent bulletin, nous traitons de la LTFTE et des principaux points à retenir pour les organismes du secteur public.
LTFTE : Aperçu et portée
La LTFTE est une loi sur la transparence de la chaine d’approvisionnement qui vise à lutter contre le travail forcé et le travail des enfants en exigeant que les « institutions gouvernementales » et les « entités » (c.-à-d. certaines entreprises et, comme il est mentionné ci-après, certaines sociétés d’État mandataires des provinces) préparent et présentent des rapports annuels sur leurs chaînes d’approvisionnement et les questions connexes.
Quelles « institutions fédérales » sont visées?
Le terme « institution fédérale », au sens de la LTFTE, a le sens que lui donne la Loi sur l’accès à l’information (« LAI ») – les entités énumérées à l’annexe I de la LAI et toute société d’État mère et toute filiale en propriété exclusive d’une telle société, au sens de l’article 83 de la Loi sur la gestion des finances publiques. Par conséquent, ces institutions comprennent les ministères fédéraux, les ministères d’État, les sociétés d’État (tant les sociétés mères que les filiales), ainsi que d’autres institutions énumérées (p. ex., l’Agence des services frontaliers du Canada).
Exigences en matière de rapport, pour les institutions fédérales
Les institutions fédérales qui produisent, achètent ou distribuent des marchandises au Canada ou ailleurs doivent déposer un rapport annuel. Ce rapport doit préciser les mesures qui ont été prises durant l’année financière pour prévenir et réduire le risque de recours au travail forcé et au travail des enfants à chaque étape de la production de marchandises produites, achetées ou distribuées par l’institution. Le rapport doit également inclure les renseignements suivants au sujet de l’institution :
- sa structure, ses activités et ses chaines d’approvisionnement;
- ses politiques et ses processus de diligence raisonnable relatifs au travail forcé et au travail des enfants;
- les parties de ses activités et de ses chaînes d’approvisionnement qui comportent un risque de recours au travail forcé ou au travail des enfants et les mesures qu’elle a prises pour évaluer ce risque et le gérer;
- l’ensemble des mesures qu’elle a prises pour remédier à tout recours au travail forcé ou au travail des enfants;
- l’ensemble des mesures qu’elle a prises pour remédier aux pertes de revenus des familles les plus vulnérables engendrées par toute mesure visant à éliminer le recours au travail forcé ou au travail des enfants dans le cadre de ses activités et dans ses chaines d’approvisionnement;
- la formation donnée aux employés sur le travail forcé et le travail des enfants;
- la manière dont elle évalue l’efficacité de ses efforts pour éviter le recours au travail forcé ou au travail des enfants dans le cadre de ses activités et dans ses chaines d’approvisionnement.
Bien que Sécurité publique Canada n’ait pas publié d’orientations particulières pour les institutions fédérales concernant la préparation des rapports, ses orientations pour les entités commerciales sont utiles étant donné la similitude des exigences en matière de rapport.
Exigences en matière de rapport pour les organismes du secteur public considérés comme « entités »
Bien que Sécurité publique Canada ait récemment précisé que les institutions provinciales et municipales ne sont pas considérées comme des « institutions fédérales », certains organismes sous-centraux du secteur public, comme les sociétés d’État mandataires des provinces, peuvent quand même avoir des obligations de faire rapport s’ils répondent à la définition d’« entité ».
Un organisme du secteur public pourrait être considéré comme une « entité » s’il est une société, une fiducie, une société de personnes ou une autre organisation constituée en société qui a un établissement au Canada, y exerce des activités ou y possède des actifs et répond à au moins deux des critères suivants liés à la taille pendant au moins une de ses deux dernières années financières :
- posséder des actifs d’une valeur d’au moins 20 M$;
- générer des revenus d’au moins 40 M$;
- employer en moyenne au moins 250 employés.
Si l’« entité » du secteur public exerce l’une ou l’autre des activités suivantes, elle doit préparer et déposer un rapport :
- production, vente ou distribution des marchandises au Canada ou ailleurs;
- importation au Canada de marchandises produites à l’extérieur du Canada;
- contrôle d’une entité exerçant l’une ou l’autre des activités susmentionnées.
Interdiction d’importation
La LTFTE devrait aussi être examinée à la lumière des récentes modifications apportées au Tarif des douanes qui sont entrées en vigueur le 1er janvier 2024 (projet de loi S-211) et qui élargissent l’interdiction d’importation actuelle du Canada visant les marchandises contaminées par le travail forcé afin d’interdire les marchandises extraites, fabriquées ou produites, en tout ou en partie, par recours au travail des enfants.
Dans le cadre de leurs activités d’approvisionnement, qu’ils agissent à titre d’importateurs ou qu’ils achètent auprès de tiers, tous les organismes du secteur public (qu’ils soient ou non visés par les exigences en matière de rapport à titre d’institutions fédérales ou d’entités) devront s’assurer que les marchandises sont exemptes de travail forcé et de travail des enfants. De telles marchandises ne peuvent être importées au Canada et toutes les personnes ont l’obligation de déclarer à l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) les marchandises illégalement importées en leur possession.
Principaux points à retenir
- Les organismes du secteur public doivent déterminer s’ils répondent aux critères définissant une « institution fédérale » ou une « entité ».
- Les organismes déclarants devraient être en train de préparer leurs rapports annuels pour la date limite de soumission du 31 mai 2024.
- Examiner les répercussions de la LTFTE et de l’interdiction d’importation sur les pratiques d’approvisionnement, y compris l’examen des documents relatifs à l’approvisionnement et des ententes avec les fournisseurs, afin d’assurer une couverture appropriée (p. ex., la mise à jour des politiques d’approvisionnement et des codes de conduite des fournisseurs; l’exigence d’accréditations des fournisseurs; la garantie que les documents relatifs à l’approvisionnement et les ententes avec les fournisseurs permettent des vérifications de conformité et des droits de résiliation).
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