Les Nuchatlaht ont récemment interjeté appel de la décision de première instance relativement à leur revendication de titre ancestral. En avril 2024, les Nuchatlaht se sont vu accorder un titre ancestral concernant un territoire d’environ 11 km2 dans la partie nord-ouest de l’île Nootka (The Nuchatlaht v. British Columbia, 2024 BCSC 628). Les Nuchatlaht avaient revendiqué un territoire beaucoup plus vaste d’une superficie totale d’environ 201 km2. Dans le cadre de leur appel, les Nuchatlaht demandent l’obtention d’une déclaration de titre ancestral pour l’ensemble du territoire revendiqué.
La revendication a été élaborée en vue d’un procès rapide
La portée de la revendication des Nuchatlaht était limitée dans la mesure où elle ne comprenait pas de titre sur l’estran ou les fonds marins, excluait tout titre sur les terres détenues en fief simple et ne comprenait pas non plus de revendications de droits ancestraux. En revanche, elle était relativement importante dans la mesure où elle visait un territoire de plus de 201 km2. En raison d’un certain nombre de décisions stratégiques (y compris les limites susmentionnées), ce procès s’est conclu beaucoup plus rapidement que d’autres litiges portant sur des titres et des droits ancestraux. Le procès, qui a duré 54 jours, n’a tenu compte d’aucune preuve fondée sur les récits oraux. Les Nuchatlaht et la Colombie-Britannique se sont exclusivement appuyés sur des preuves d’experts. À titre de comparaison, le procès de l’affaire Tsilhqot’in a duré 339 jours et s’est étalé sur une période de cinq ans, et une affaire récente portant sur la revendication d’un titre ancestral par les tribus Cowichan a nécessité plus de 450 jours pour la démonstration de la preuve uniquement.
Au départ, le tribunal a refusé d’émettre une déclaration de titre ancestral (The Nuchatlaht v. British Columbia, 2023 BCSC 804), considérant que la preuve était insuffisante et ne remplissait pas les critères juridiques requis afin de reconnaître un titre ancestral pour l’ensemble de la zone visée par la revendication. Les éléments de preuve acceptés par le tribunal concernaient l’occupation des terres côtières alors qu’une importante partie du territoire visé se trouvait sur les terres intérieures. Cependant, plutôt que de rejeter l’ensemble de la revendication, le tribunal a invité les Nuchatlaht à présenter leur revendication à l’égard des plus petites parties de la zone revendiquée lors d’une audience future. Au cours de cette audience, tenue en mars 2024, les Nuchatlaht ont continué à faire valoir leur revendication pour l’ensemble du territoire visé, même si celui-ci est composé de parties plus petites. En avril, le tribunal a soutenu qu’il y avait suffisamment de preuves pour émettre une déclaration de titre ancestral pour un territoire de 11 km2, comme l’indique la carte ci-dessous.
Les Nuchatlaht comparent l’approche de la province, dans leur cas, avec l’accord qu’elle a conclu avec la nation Haïda
Les Nuchatlaht ont relevé publiquement d’apparentes incohérences dans l’approche récente de la province relativement au titre ancestral reconnu dans l’accord intitulé Gaayhllxid/Gíihlagalgang “Rising Tide” Haida Title Lands Agreement. Dans le cadre du procès des Nuchatlaht, la province a soutenu qu’il n’existait pas suffisamment de preuves quant à l’occupation des montagnes et des forêts intérieures. Or, l’accord conclu entre la province et la nation Haïda (qui comprend la reconnaissance du titre ancestral de la nation Haïda) vise des territoires qui, aux termes de cet accord, sont analogues à ceux visés dans la revendication des Nuchatlaht. Consultez notre bulletin concernant cet accord en cliquant ici.
La complexité du litige relatif au titre ancestral persiste malgré la portée limitée de la revendication
L’affaire Nuchatlaht montre clairement que les groupes autochtones continuent, en ce qui concerne leurs revendications territoriales, à se heurter à des obstacles en matière de preuves. Les preuves d’experts convaincantes jouent un rôle important dans le cadre de ces revendications. Toutefois, la décision rendue dans cette affaire rappelle que les tribunaux doivent se voir présenter des preuves d’occupation sur l’ensemble des territoires revendiqués.
Dans son jugement de première instance, le tribunal a souligné que les cours d’appel pourraient devoir réexaminer les critères juridiques pour reconnaître un titre ancestral en ce qui concerne les Premières Nations côtières. Le tribunal a reconnu l’argument des Nuchatlaht selon lequel une zone devait être attribuée en fonction des bassins versants – un argument fondé sur le droit international. Le tribunal a conclu qu’en raison de l’état actuel du droit, ce principe n’était pas applicable, mais il a toutefois réitéré que les cours d’appel pouvaient tenir compte de ce facteur et ajuster les critères juridiques applicables aux titres ancestraux.
Suivez l’évolution de cette affaire pour voir si ces questions ou des questions nouvelles seront présentées à la cour d’appel.