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Canada-Administration Trump 2.0 – bulletin 8

Fasken
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Mise à jour 8 : le 24 janvier 2025

Menaces tarifaires et décrets présidentiels ciblant le Canada

Les menaces d’imposition de tarifs douaniers sur les produits canadiens proférées par le président Trump ont fait beaucoup parler cette semaine, mais il ne faut pas passer sous silence deux autres décrets présidentiels signés lundi. Ils pourraient aussi avoir une incidence sur l’économie et le cadre financier du Canada.

Le président Trump a également signé des décrets concernant les taxes sur les services numériques du Canada, l’examen de l’ACEUM et nos subventions au secteur des véhicules électriques et des batteries.

De son côté, Équipe Canada continue d’affiner sa réponse à l’imposition de tarifs par les États-Unis. Elle se penche notamment sur la possibilité d’une riposte « dollar pour dollar », la voie à suivre avec nos exportations d’énergie et de minéraux critiques, et la manière d’éliminer une fois pour toutes les barrières commerciales internes. À lire également dans le présent bulletin : déclarations du président Trump sur le Canada et réactions du monde des affaires, des chefs de l’opposition au fédéral et des candidats à la chefferie du Parti libéral.

Alex Steinhouse, avocat-conseil au sein du groupe RG&DP, fait le point.

Décret du président Trump et menaces d’imposition de tarifs douaniers sur les produits canadiens

C’est en répondant à une question d’un journaliste canadien expatrié à la Maison-Blanche que le président Trump a mis un terme à toute célébration prématurée d’un possible retrait de la grave menace qui pèse sur l’économie canadienne.

Même s’il n’a pas parlé des tarifs sur les produits canadiens dans son discours d’investiture de lundi, plus tard dans la soirée, le président Trump a mordu à l’hameçon lancé par Josh Wingrove sur le calendrier des tarifs. Le président a déclaré que des tarifs de 25 % devraient être imposés au Canada et au Mexique à compter du 1ᵉʳ février parce que ces derniers « permettent à un grand nombre de personnes et au fentanyl d’entrer » aux États-Unis. M. Trump a également profité de l’occasion pour menacer d’imposer des tarifs à la Chine, à l’Union européenne et aux pays du BRICS.

M. Trump a mis l’accent sur ce nouveau calendrier tarifaire, bien que le 1ᵉʳ février ne soit mentionné nulle part dans le décret (en anglais) qu’il a signé ce jour-là. Ce décret ordonne aux nouveaux représentants de l’administration Trump de procéder à des examens commerciaux et de proposer des recommandations de politiques, ce qui pourrait mener à de nouveaux tarifs le 1ᵉʳ avril au plus tôt.

Le lendemain, lors d’un événement sur l’IA, le président Trump a reconfirmé la date du 1er février : « Nous envisageons d’imposer des tarifs de 10 % sur les produits chinois, car ils envoient du fentanyl au Mexique et au Canada. C’est sans doute pour le 1er février, c’est la date que nous regardons. Pour le Mexique et la Chine [M. Trump voulait sans doute parler du Canada], nous parlons d’environ 25 %. »

Et il a insisté de nouveau lors d’un discours virtuel au Forum économique mondial de Davos, jeudi, en déclarant que c’était « très difficile de travailler » avec le Canada au fil des années et que les États-Unis n’avaient pas besoin du pétrole, du gaz, des automobiles ou du bois d’œuvre canadiens : « On n’a pas besoin de leurs voitures, on en fabrique beaucoup. On n’a pas besoin de leur bois, car on a nos propres forêts... On n’a pas besoin de leur pétrole et de leur gaz, on en a plus que quiconque. » Toutefois, le Canada peut encore éviter les tarifs en devenant le 51e État. Le président Trump a également rappelé que les États-Unis demanderont aux membres de l’OTAN d’augmenter leurs dépenses militaires annuelles à 5 % de leur PIB.

Selon M. Trump, cette menace n’a rien à voir avec la renégociation de l’ACEUM. S’il la profère, c’est seulement parce que le Canada et le Mexique ont tous les deux « permis à des millions et des millions de personnes d’entrer dans notre pays alors qu’elles ne devraient pas y être. Ils auraient pu les arrêter, mais ils ne l’ont pas fait ».

Mais toutes les suppositions se valent lorsque vient le temps de démêler les fabulations des faits en ce qui concerne le calendrier. Il n’y a toujours pas de consensus à la Maison-Blanche sur la voie à suivre. Le président continue de recevoir des avis contradictoires de la part de sa garde rapprochée, qui comprend à la fois des conseillers prônant l’approche économique « MAGA » et des conseillers de l’aile économique plus traditionnelle du Parti républicain.

Peter Navarro, conseiller au commerce de la Maison-Blanche, a affirmé (article en anglais) plus tôt ce mardi que le décret constitue « le plan directeur et la base qui serviront à établir les tarifs et les politiques commerciales qui pourraient ou non voir le jour pendant les 100 prochains jours. Il y a des discussions sur le tarif de base universel. Il y a des discussions sur [l’ACEUM], qui doit être réexaminé en 2026 ». Toutefois, M. Navarro a souligné que c’est M. Trump qui tranchera quant à cette décision et le moment de la mise en œuvre.

Peu importe la décision sur l’imposition de tarifs, une professeure et ancienne conseillère au commerce du premier ministre Stephen Harper a fait remarquer (publication en anglais) que le Canada doit continuer de se concentrer sur l’examen de l’ACEUM, qui approche. Cet examen impliquera des questions sur notre système de gestion de l’offre (en particulier en ce qui concerne l’industrie laitière), la chaîne d’approvisionnement partagée de l’automobile, les investissements chinois dans les pays de l’ACEUM, les politiques « Buy American » et le bois d’œuvre.

Taxe sur les services numériques du Canada et secteur des véhicules électriques

Deux autres décrets ont attiré l’attention des Canadiens lundi dernier.

L’un d’entre eux (en anglais) est axé sur un autre différend commercial en plein essor, concernant la taxe sur les services numériques du Canada. Ce décret demande au secrétaire au Trésor et à son représentant au commerce de vérifier si d’autres pays prélèvent des impôts « extraterritoriaux » ou s’ils ciblent de manière disproportionnée les entreprises américaines et de retirer les États-Unis de l’« accord sur l’impôt mondial de l’OCDE ». Ils doivent présenter un rapport d’ici le 21 mars, avec des options pour des « mesures de protection ou d’autres actions » que le président Trump pourrait envisager comme réponse.

La taxe de 3 % sur les services numériques du Canada fait écho à un type de taxe que l’on voit dans 19 autres pays. Elle vise les revenus nationaux des plus grands acteurs du numérique (dans quatre catégories : services de marchés en ligne, de publicité, de médias sociaux et de données d’utilisateur), peu importe ou se trouve leur propriétaire ou leur siège social.

En théorie, la taxe canadienne est temporaire, jusqu’à ce que les membres de l’OCDE s’entendent sur l’imposition des sociétés. Cependant, le Canada a longtemps retardé l’application de sa propre taxe sur les services numériques dans l’attente de cet accord multinational, mais a finalement décidé d’aller de l’avant. La taxe canadienne est entrée en vigueur le 1ᵉʳ janvier 2024 sur une base rétroactive remontant à 2022. Les premiers paiements des grandes plateformes numériques (revenus annuels supérieurs à 20 millions de dollars canadiens), y compris Amazon, Google et Netflix, sont dus en juillet de cette année. On estime que le Canada pourrait recevoir 7,2 milliards de dollars canadiens sur 5 ans.

Le Canada est allé de l’avant en dépit de l’opposition considérable de voix canadiennes et américaines. David Cohen, ancien ambassadeur du président Biden au Canada, et Katherine Tai, ancienne représentante américaine au commerce, ont affirmé publiquement, à plusieurs reprises et depuis longtemps, que cette taxe était une source d’irritation pour les Américains et qu’elle était contraire aux obligations du Canada découlant de l’ACEUM. C’est pourquoi les Américains ont déjà déposé une demande de règlement du différend en ce qui a trait à la taxe. La Chambre de commerce du Canada a mis en garde (en anglais) à plusieurs reprises que la taxe pourrait entraîner des mesures de rétorsion à l’encontre des entreprises canadiennes.

Alors que l’ancienne ministre des Finances Freeland avait déclaré, pas plus tard qu’en novembre 2024, que le Canada ne ferait pas de cette taxe une monnaie d’échange dans les négociations commerciales, le premier ministre Trudeau a adopté un ton légèrement différent cette semaine, laissant entrevoir la possibilité de négocier à ce sujet en privé.

En réaction aux développements de cette semaine, Michael Geist, professeur à l’Université d’Ottawa, a écrit (en anglais) qu’il s’agit d’une nouvelle défaite pour le programme de politique numérique du gouvernement libéral, qui s’est largement concentré sur le souhait de faire payer aux « grandes entreprises technologiques leur juste part ». Que ce soit en raison de ce décret, de la prorogation ou des contestations devant les tribunaux, c’est la fin, ou presque, pour les lois et les politiques des libéraux. Outre cette taxe, la liste des lois et des politiques qui risquent grandement de ne pas voir le jour comprend les réformes du gouvernement en matière de protection de la vie privée et son cadre de gouvernance de l’IA (projet de loi C-27), son cadre de cybersécurité (projet de loi C-26), son plan de sécurité en ligne (projet de loi C-63), les paiements obligatoires pour la diffusion en continu (projet de loi C-11) et les paiements obligatoires pour les liens vers des nouvelles (projet de loi C-18).

Le décret (en anglais) du président Trump sur l’énergie attire également l’attention du Canada. En plus de favoriser l’augmentation de la production de pétrole (lors de son discours d’investiture, le président a déclaré « Drill, baby, drill » et promis de quitter l’Accord de Paris sur le climat), le décret indique qu’il met fin au « Green New Deal » de M. Biden et interrompt immédiatement le versement des subventions accordées au titre de la loi pour diminuer l’inflation et de la loi sur l’investissement dans les infrastructures et les emplois pour les véhicules électriques et les batteries. Des sources indiquent que le président se débarrassera probablement d’un crédit d’impôt de 7 500 $ pour l’achat d’un nouveau véhicule électrique, ainsi que d’autres politiques de M. Biden en faveur des véhicules électriques. 

Compte tenu des efforts considérables déployés par le gouvernement canadien pour attirer et mettre en place une chaîne d’approvisionnement, un secteur et des stocks de véhicules électriques au pays, et du fait que de nombreuses subventions canadiennes seraient liées aux subventions américaines en vigueur, le décret du président Trump a de sérieuses implications (article en anglais) de ce côté-ci de la frontière.

Réponse du gouvernement fédéral

Le premier ministre a convoqué une retraite du Conseil des ministres lundi et mardi pour discuter de la stratégie commerciale entre le Canada et les États-Unis. Lors d’une conférence de presse mardi, le premier ministre a déclaré (en anglais) que des plans d’intervention pour divers scénarios étaient prêts, que tout était sur la table et qu’il soutenait « le principe de l’alignement des tarifs “dollar pour dollar”. C’est quelque chose que nous allons absolument considérer si c’est ainsi qu’ils vont de l’avant ».

Le premier ministre a ajouté qu’en cas d’imposition de tarifs, « l’objectif sera de se débarrasser de ces tarifs le plus rapidement possible » et de soutenir les entreprises canadiennes touchées par la mesure proposée.

On parle d’environ 150 milliards de dollars de pénalités, pour correspondre à 25 % des 600 milliards de dollars de biens importés qui seraient ciblés par le président Trump. Le premier ministre a laissé entendre que la riposte prendrait la forme de tarifs progressifs et graduels et qu’elle pourrait inclure des tarifs à l’exportation ou la restriction des exportations d’énergie et de minéraux critiques vers les États-Unis. Accorder des contrats de marchés publics fédéraux en matière de défense à d’autres alliés, comme la Corée du Sud et le Japon, plutôt qu’aux États-Unis constitue une autre option de riposte (article en anglais).

Les ministres, y compris le ministre des Finances Dominic Leblanc et la ministre des Affaires étrangères Mélanie Joly, continueront de parler à leurs nouveaux homologues à Washington et à les rencontrer dans les jours à venir afin d’essayer de retarder la menace du 1er février ou de l’éviter complètement.

Enfin, en ce qui concerne la fonction publique, le gouvernement fédéral a également annoncé le lancement de séances d’information hebdomadaires avec des intervenants de l’industrie et du marché du travail ainsi qu’avec des représentants provinciaux et territoriaux sur les relations économiques entre le Canada et les États-Unis.

Réunion des premiers ministres

Le premier ministre a également convoqué une réunion virtuelle des premiers ministres mercredi à l’issue de laquelle le premier ministre Ford a déclaré qu’il était tout à fait favorable à des mesures de rétorsion tarifaire « dollar pour dollar » et que de plus en plus de premiers ministres partageaient son avis. Il y a de très fortes chances que le premier ministre Ford déclenche des élections provinciales, peut-être même dès la semaine prochaine.

Cependant, il semblerait que (article en anglais) les fissures soient plus importantes qu’elles ne l’étaient la semaine dernière. Depuis que Danielle Smith, première ministre de l’Alberta, a refusé de signer la déclaration des premiers ministres la semaine dernière, elle n’a fait que prendre davantage ses distances avec le groupe. Elle a rencontré des législateurs américains pendant les festivités de l’investiture et a plaidé en faveur de la coopération plutôt que de représailles. Des membres de la communauté des affaires et du secteur pétrolier albertains l’ont accompagnée (article en anglais) à Washington.

Outre l’augmentation des dépenses pour atteindre l’objectif de l’OTAN et la sécurisation de nos frontières, la première ministre Smith continue de vanter l’importance de la construction de nouveaux oléoducs et gazoducs vers l’est et l’ouest du pays. Cette semaine, le président de l’Union des chefs autochtones de la Colombie-Britannique, le grand chef Stewart Phillip, est revenu sur son opposition antérieure au projet Northern Gateway, qui a été abandonné.

Le premier ministre de la Saskatchewan, Scott Moe, s’est maintenant rangé du côté de la première ministre Smith en s’opposant non seulement à tout plan fédéral visant à appliquer des tarifs ou des restrictions à l’exportation de pétrole et de gaz ou de minéraux critiques, mais aussi à des tarifs compensatoires « dollar pour dollar ».

La Saskatchewan soutient en revanche des contre-tarifs « très ciblés » et « très faibles », pouvant atteindre « quelques milliards de dollars » sur les importations en provenance des États-Unis. Mais M. Moe a ajouté que les contre-tarifs ne seraient pas imposés pour « avoir un impact sur l’économie », mais pour changer « les cœurs et les esprits » des Américains.

Quant au premier ministre du Québec, François Legault, il a soutenu que, même si aucune option n’était écartée, cela ne signifie pas que le Québec consent à ce stade à bloquer ou à taxer ses exportations d’énergie. Son gouvernement a également fait parler de lui en prenant ombrage des propos du chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, qui a donné raison au président Trump en accusant le Canada et le Québec d’être de mauvais voisins qui ne sécurisaient pas correctement la frontière.

Les premiers ministres se sont toutefois entendus sur l’importance de réduire les barrières commerciales internes au Canada. Ils ont convenu de réunir à nouveau le Comité du commerce intérieur, un organe consultatif composé principalement de premiers ministres et de ministres provinciaux, et de veiller à ce qu’il se réunisse régulièrement et fasse des recommandations aux premiers ministres sur des mesures concrètes visant à favoriser le commerce et à renforcer l’économie du Canada.

À l’ordre du jour (article en anglais) figure la suppression de certaines exemptions prévues par l’Accord de libre-échange canadien afin d’améliorer le climat des affaires au pays, compte tenu des incertitudes en ce qui concerne le commerce avec les Américains. Bien que les estimations varient considérablement, cette mesure pourrait faire augmenter le PIB de 50 à 100 milliards de dollars par an.

Les premiers ministres ont également souligné l’importance d’« acheter canadien », notamment en remettant en question les voyages au sud de la frontière.

Qu’est-ce que le monde des affaires en pense?

Le premier ministre a également réuni son Conseil sur les relations canado-américaines pendant la retraite du Conseil des ministres.

À l’issue de cette réunion, certains des membres ont confié (en anglais) aux médias leur point de vue sur la voie à suivre :

  • Jean Charest,ancien premier ministre du Québec :« Des tarifs de 25 %, ça n’a pas de sens, ça ne correspond pas à la réalité. Et je pense que ça illustre le dilemme de l’administration Trump, de poursuivre soit un programme de croissance, soit un programme de tarifs. Et le programme de tarifs va à l’encontre de la croissance économique. »
  • Arlene Dickinson, entrepreneure :« Kevin O’Leary n’est pas autorisé à parler au nom des Canadiens et, honnêtement, je ne crois pas qu’il parle au nom des Canadiens [avec] ce qu’il dit. S’il négociait en notre faveur, je pense que ça irait. Mais ce n’est pas le cas, il négocie contre nous, donc je ne pense pas que ce soit une solution utile en ce moment. »
  • Flavio Volpe, président de l’Association des fabricants de pièces d’automobile du Canada : « À ne pas faire : paniquer. À faire : nous appuyer sur les leçons que nous avons tirées de l’administration [Trump] 1.0... À ne pas faire : réagir chaque fois qu’il dit quelque chose dans les médias. »
  • Wes Hall, entrepreneur : « Lorsque quelqu’un menace votre gagne-pain, vous ne pouvez pas le prendre à la légère. Nous ne pouvons pas rester les bras croisés et dire : “Attendons de voir ce qui se passe et réagissons ensuite.” Nous avons déjà vu ça, c’est la deuxième fois que nous le vivons. Nous avons maintenant un manuel que nous sommes en train d’adapter et de dépoussiérer, et nous allons mettre en œuvre ce qu’il faudra pour protéger notre gagne-pain et notre économie et, surtout, pour protéger les emplois canadiens. »

Selon Goldy Hyder, président du Conseil canadien des affaires (article en anglais), nous ne pouvons pas soutenir une guerre tarifaire « dollar pour dollar » : « [Le Canada] ne représente qu’un dixième de leur économie. Nous sommes devant un géant. Nous ne pourrions pas tenir éternellement de cette façon. Nous devons veiller à ce que les mesures et les contre-mesures prises soient suffisamment efficaces pour avoir l’effet escompté à court terme. À long terme, nous ne pourrions pas survivre. Il faut le dire : ça fera extrêmement mal à notre économie. L’inflation reviendra. »

S’exprimant mardi lors d’un événement organisé par l’Empire Club of Canada, Steve Verheul, ancien négociateur commercial en chef du Canada, a déclaré (en anglais) que le fait que l’Alberta en ait fait à sa tête au cours des dernières semaines « a considérablement affaibli la position du Canada ». Si M. Trump impose les tarifs de 25 % qu’il a promis, « il est clair que nous devrons prendre des mesures de rétorsion ». « Si des représailles sont nécessaires, c’est surtout pour tenter de trouver un certain équilibre dans les négociations. Nous devons mettre certains éléments de notre côté de la table de négociation afin d’avoir plus de poids de même qu’une discussion plus équilibrée. Si nous ne prenons pas de mesures de rétorsion, nous continuerons à payer et à faire des concessions ad vitam aeternam. »

Enfin, dans une discussion devant la Chambre de commerce de Montréal, Laurent Ferreira, PDG de la Banque Nationale, a plaidé en faveur d’un allégement du fardeau réglementaire et fiscal au Canada afin d’accroître la compétitivité et la productivité. Il a proposé de mettre en place un « Buy-Canada Act » relatif à l’approvisionnement, à la recherche et au développement et à l’intelligence artificielle appliquée à la défense et à la sécurité nationale.

Partis d’opposition

Pierre Poilievre, le chef des conservateurs, a demandé au premier ministre de rouvrir immédiatement le Parlement afin d’« adopter de nouveaux contrôles aux frontières, de se mettre d’accord sur les représailles commerciales et de préparer un plan de relance de la faible économie canadienne ». Par ailleurs, le député conservateur Jamil Jivani, un bon ami du vice-président J.D. Vance, a assisté à l’investiture présidentielle.

Jagmeet Singh, le chef du NPD, a levé (article en anglais) quelque peu l’incertitude qu’il a créée la semaine dernière quant à la volonté du NPD de renverser le gouvernement. M. Singh a confirmé une fois de plus l’intention du NPD de voter contre le gouvernement libéral « à la première occasion », peu importe son chef. Si le prochain ou la prochaine chef des libéraux décide de faire réunir la Chambre le 24 mars au lieu de la dissoudre pour déclencher des élections, les premiers votes de censure devraient avoir lieu peu de temps après.

Au cours d’une semaine où le Bloc Québécois a vu un avenir où il pourrait devenir l’opposition officielle après les prochaines élections, Yves-François Blanchet, le chef du parti, s’est rangé du côté des premiers ministres Smith et Moe et s’est distancé du premier ministre Legault, qui veut laisser toutes les options ouvertes. M. Blanchet s’est fermement opposé à l’idée de restreindre les exportations d’énergie, la qualifiant même de « farfelue » : « Si tu brises l’habitude d’approvisionnement des Américains à partir de l’énergie du Québec et du Canada, une fois qu’ils vont s’être trouvés d’autres sources d’approvisionnement, tu vas être dans une position très désavantageuse pour négocier de nouveaux contrats. Sur le long terme, c’est un peu la politique de la terre brûlée », a-t-il lancé.

Bien que M. Blanchet soit favorable à l’idée de répondre aux tarifs américains par d’autres tarifs, il estime que les dirigeants canadiens devraient éviter de parler de « représailles » ou de « guerre commerciale » : « Ce n’est pas comme ça qu’on rassemble les conditions pour négocier correctement, a affirmé M. Blanchet. Les négociateurs américains ne négocieront pas à coups de poing sur la table. Ils vont négocier éventuellement de façon rationnelle. Ça va être la raison qui va prévaloir. »

Course à la chefferie du Parti libéral

Les candidats présumés à la tête du Parti libéral, Mark Carney et Chrystia Freeland, ont tous deux promis (article en anglais) d’imposer des mesures de rétorsion tarifaire « d’une ampleur historique ». À ce sujet, M. Carney a déclaré que si le président Trump mettait sa menace à exécution, cela « exigerait la réponse commerciale la plus sérieuse de notre histoire. Des tarifs de rétorsion “dollar pour dollar” de la part du Canada devraient aller de soi et être appliqués là où leur impact sur les États-Unis se fera le plus sentir. Chaque dollar récolté par les tarifs canadiens devrait être utilisé pour soutenir les travailleurs canadiens dans cette lutte. »

Mme Freeland, qui a annoncé la semaine dernière qu’elle proposait d’abandonner la « taxe carbone » en raison de son impopularité auprès des Canadiens, a fait les manchettes jeudi en affirmant qu’un gouvernement libéral sous sa direction abandonnerait également l’augmentation du taux d’inclusion des gains en capital. Ce revirement de politique serait une réponse au risque accru, induit par la présidence Trump, de voir les investissements canadiens se diriger vers les États-Unis.

M. Carney et Mme Freeland continuent d’obtenir l’appui de différents ministres. M. Carney a d’ailleurs une longueur d’avance à cet égard (il a notamment reçu l’appui d’anciens candidats à la chefferie, dont Mélanie Joly, Steven MacKinnon, Jonathan Wilkinson et probablement François-Philippe Champagne, qui devrait annoncer son soutien dimanche). À l’heure où nous écrivons ces lignes, la ministre Karina Gould, les anciens députés Frank Baylis et Ruby Dhalla ainsi que les députés actuels Chandra Arya et Jaime Battiste sont également en train d’officialiser leur candidature.

Restez informés grâce à nos analyses approfondies, nos bulletins juridiques, nos épisodes de baladodiffusion et nos autres ressources sur notre page Canada-Administration Trump 2.0. Nous mettons fréquemment à jour cette page avec les plus récentes informations pour vous aider à suivre l’évolution de la relation entre le Canada et les États-Unis.

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Auteurs

  • Daniel Brock, Associé | Responsabilité sociale d’entreprise, Toronto, ON | Ottawa, ON, +1 416 865 4513, dbrock@fasken.com
  • Guy W. Giorno, Associé | Droit politique, Toronto, ON | Ottawa, ON, +1 613 696 6871, ggiorno@fasken.com
  • Alex Steinhouse, Avocat-conseil | Relations gouvernementales et stratégie, Montréal, QC, +1 514 397 4356 , asteinhouse@fasken.com

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