23. Droit de la sécurité nationale
Le terme « sécurité nationale » n’est pas défini dans les lois canadiennes; il a la signification que lui confère le gouvernement. Par conséquent, les personnes et les entreprises sont vulnérables face aux mesures imprévisibles, voire arbitraires, du gouvernement, lesquelles peuvent réduire les marges de profit, perturber la productivité, et même mettre fin à la viabilité commerciale.
Sur le plan pratique, la sécurité nationale se rapporte à toute mesure ou à tout événement qui pourrait avoir une incidence importante sur la santé, la sécurité ou le bien-être économique des Canadiens, ou sur le bon fonctionnement des gouvernements du pays. La crise de la COVID-19 est un exemple probant de la vulnérabilité de l’intégrité des infrastructures essentielles du Canada et du bien-être des Canadiens. Le gouvernement du Canada a alors accordé une importance accrue à la sécurité nationale dans le cadre de ses activités législatives, réglementaires et politiques. Ces vulnérabilités se présentent particulièrement dans les domaines que nous abordons ci-dessous : investissement étranger; protection des renseignements personnels et cybersécurité; approvisionnement et marchés publics; contrôles à l’exportation, marchandises contrôlées, sanctions économiques et lutte contre la corruption et les pots-de-vin; défense et enquêtes en matière de criminalité en col blanc; et travail et emploi.
Investissement étranger
L’investissement étranger est généralement considéré comme avantageux, tant pour le Canada que pour les investisseurs étrangers impliqués et les entreprises commerciales créées à la suite de cet investissement ou autrement touchées par celui-ci. L’investissement étranger a le potentiel de renforcer la croissance et l’innovation au Canada, de créer des emplois de qualité, d’améliorer le niveau de vie et de contribuer à la promotion de bonnes pratiques en matière de gestion et de conduite des affaires. Pour toutes ces raisons et bien d’autres encore, l’investissement étranger est d’ordinaire accueilli favorablement par le Canada.
Cependant, l’investissement étranger peut – dans certaines circonstances – soulever des inquiétudes liées à la sécurité nationale du Canada. Au cours des dernières années, ces inquiétudes ont donné lieu à un examen plus approfondi et à une plus grande attention de la part du Canada, qui a mis en place des mécanismes permettant d’examiner certaines propositions d’investissement. Les moyens pris dans ce domaine ont considérablement progressé depuis la mise en place en 2009 des procédures d’examen relatives à la sécurité nationale en vertu de la Loi sur Investissement Canada (la « LIC »).
Le gouverneur en conseil (ou le cabinet fédéral) peut examiner un investissement fait ou proposé par un non-Canadien et visant, entre autres, à acquérir le contrôle d’une entreprise canadienne ou à acquérir ou à établir, en tout ou en partie, une entité qui exerce toutes ses activités ou une partie de celles-ci au Canada. Lorsque le ministre responsable a des motifs raisonnables de croire qu’un investissement peut porter atteinte à la sécurité nationale, un examen peut avoir lieu, que l’investissement soit assujetti ou non à un examen de l’avantage net ou à un avis en vertu de la LIC.
La version actualisée des Lignes directrices sur l’examen relatif à la sécurité nationale des investissements émise le 24 mars 2021 en vertu de la LIC informe les investisseurs étrangers des facteurs dont le gouvernement tiendra compte dans l’application du processus d’examen relatif à la sécurité nationale, ce qui permet d’avoir une meilleure compréhension des circonstances dans lesquelles le gouvernement du Canada peut procéder à un tel examen. Depuis le 2 août 2022, le Règlement modifiant le Règlement sur les investissements susceptibles de porter atteinte à la sécurité nationale (examen) permet aux investisseurs non canadiens de se soumettre volontairement et officiellement au processus d’examen de sécurité avant la clôture, même si leur projet d’investissement n’est pas autrement assujetti au préavis obligatoire ou à l’examen de l’avantage net.
À la lumière de la Stratégie canadienne sur les minéraux critiques, les demandes d’acquisitions de contrôle d’une entreprise canadienne mettant en jeu des minéraux critiques par une entreprise d’État étrangère ne seront considérées comme étant à l’avantage net du Canada qu’à titre exceptionnel. En outre, tous les investissements, y compris les nouveaux investissements et les investissements minoritaires, quelle que soit leur valeur, qu’ils soient directs ou indirects, avec ou sans contrôle, et à tous les stades de la chaîne de valeur, seront soumis au processus d’examen relatif à la sécurité nationale en vertu de la LIC.
Le ministre canadien de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie a annoncé le 7 décembre 2022 le projet de loi C-34, qui modifiera considérablement la LIC pour la première fois depuis 2009. S’ils sont adoptés, les amendements proposés prévoient, entre autres, de nouvelles obligations de dépôt avant la mise en œuvre d’investissements dans des secteurs d’activité réglementés et un renforcement des sanctions en cas de non-respect.
Pour en savoir plus sur la LIC, veuillez consulter le chapitre « Politique relative aux investissements » du guide Faire affaire au Canada.
Protection des renseignements confidentiels et cybersécurité
La protection des renseignements personnels et la cybersécurité offrent aux entreprises la possibilité de se démarquer, en plus de prévenir les risques opérationnels. Les cadres juridiques et les forces du marché de ces deux domaines évoluent à un rythme accéléré que les instances gouvernementales et réglementaires n’arrivent pas à suivre. Les risques de cyberespionnage économique, les attaques par rançongiciels et les attaques par déni de service distribué (DDoS) menacent de plus en plus les technologies opérationnelles, les infrastructures essentielles et l’actif informationnel des entreprises, ce qui comprend tant les secrets commerciaux que les données personnelles. Les entreprises doivent bien connaître leurs obligations en la matière et réagir aux menaces en se conformant à la législation sur la protection des données, en mettant en place un plan de prévention et des mesures préventives de gestion des risques portant sur les atteintes à la cybersécurité, en enquêtant sur les atteintes à la protection des données et en planifiant les interventions liées à ces atteintes. Les entreprises doivent également demeurer au fait de l’évolution du contexte juridique et réglementaire, ce qui comprend la réaction des gouvernements à ces menaces.
Pour en savoir plus sur la protection des renseignements personnels et la cybersécurité, veuillez consulter le chapitre « Loi sur la protection des renseignements personnels et Loi canadienne anti-pourriel » du guide Faire affaire au Canada.
Approvisionnement et marchés publics
L’approvisionnement et les marchés publics représentent un domaine de droit extrêmement complexe. L’approvisionnement varie d’un territoire à l’autre et est influencé par une multitude de facteurs, dont la common law, les lois, les règlements, les traités nationaux et internationaux, les directives, les politiques et les coutumes.
Bien que la sécurité soit souvent considérée comme une question relevant de la compétence fédérale, tous les niveaux de gouvernement prennent en compte ces questions lorsqu’ils se procurent des marchandises et des services. Les examens de sécurité sont de plus en plus souvent exigés dans le cadre du processus d’approvisionnement et peuvent comprendre des évaluations de la sécurité et des risques du fournisseur et de son personnel, de l’infrastructure physique et technique du fournisseur et de la chaîne d’approvisionnement. Le respect des contrôles à l’exportation et des sanctions n’est pas statique, puisque le gouvernement du Canada intervient à l’égard des risques de sécurité pour le pays et les Canadiens lorsqu’ils se présentent.
Pour en savoir plus sur l’approvisionnement et les marchés publics, veuillez consulter le chapitre « Approvisionnement » du guide Faire affaire au Canada.
Contrôles à l’exportation, marchandises contrôlées, sanctions économiques et lutte contre la corruption et les pots-de-vin
La réalisation d’un examen relatif à la sécurité nationale en vertu de la Loi sur Investissement Canada peut retarder, bloquer ou dénouer une transaction. Le gouvernement canadien a publié des lignes directrices sur l’examen relatif à la sécurité nationale, qui traitent explicitement des préoccupations liées aux contrôles à l’exportation et aux marchandises contrôlées. Cet examen peut donner lieu à des sanctions et à l’application des lois anticorruption. Il est important que les entreprises connaissent bien leurs obligations en la matière afin d’éviter de considérables sanctions pécuniaires et pénales, des retards coûteux ou des interdictions de mener certaines activités commerciales, ainsi qu’une atteinte à la réputation de l’entreprise et de personnes.
Le non-respect des lois et des règlements relatifs aux contrôles à l’exportation, aux marchandises contrôlées, aux sanctions et à la lutte contre la corruption et les pots-de-vin peut entraîner des sanctions très sévères, des retards dans les transactions et une atteinte à la réputation considérable qui peut nuire aux occasions d’affaires futures.
Pour en savoir plus sur les lois relatives aux contrôles à l’exportation, aux marchandises contrôlées, aux sanctions économiques et à la lutte contre la corruption et les pots-de-vin, veuillez consulter le chapitre « Droit commercial international » du guide Faire affaire au Canada.
Défense et enquêtes en matière de criminalité en cols blancs
Les entreprises qui ne respectent pas les exigences légales et réglementaires en matière de sécurité peuvent faire l’objet d’une enquête et d’accusations criminelles. Même les entreprises qui ne sont pas soupçonnées d’avoir commis un acte répréhensible peuvent faire l’objet d’une enquête qui comporte un volet relatif à la sécurité nationale. Lorsque des personnes ou des entreprises faisant affaire au Canada ou à l’étranger font l’objet d’accusations criminelles ou d’une enquête comportant un volet relatif à la sécurité nationale, les enjeux sont particulièrement importants. Outre le risque de peines d’emprisonnement que court le personnel de l’entreprise, cette dernière peut également se voir imposer des amendes et être touchée par une atteinte à sa réputation, ce qui peut mettre en péril la plus-value sur laquelle elle a bâti ses affaires et qui lui permet de conserver ses avantages concurrentiels.
Les cas qui soulèvent des questions de sécurité nationale présentent des défis uniques qui ne se retrouvent pas habituellement dans les litiges ou les enquêtes. Une équipe composée d’experts en matière criminelle, réglementaire et de sécurité nationale s’avère un atout précieux dans une telle situation. De plus, les litiges qui exigent la communication de renseignements protégés peuvent entraîner l’application de l’article 38 de la Loi sur la preuve au Canada.
Les enquêtes criminelles, administratives ou de toute autre nature qui ont trait à la sécurité nationale peuvent provenir de diverses sources liées à des allégations de pratiques de corruption à l’étranger ou au pays, d’infractions en matière d’immigration, de fraude commerciale, de fraude fiscale et de violations de sanctions internationales. Les enquêtes peuvent également faire suite à des atteintes à la vie privée, à des cyberattaques ou au vol de renseignements sensibles.
Travail et emploi
Les employeurs et leurs employés qui travaillent dans un secteur des infrastructures essentielles, qui examinent, possèdent ou transfèrent des marchandises contrôlées, qui font de l’exportation à l’extérieur du Canada ou qui ont accès à des renseignements ou à des biens de l’État qui sont protégés ou classifiés, sont soumis à diverses lois et exigences réglementaires relatives à la sécurité nationale, et ce, même si leurs tâches ne sont pas toujours considérées comme ayant un lien avec la sécurité nationale. Ces exigences peuvent soulever des considérations liées à l’emploi qui ne sont pas abordées dans les contrats de travail type ou qui n’existaient peut-être pas au moment de l’embauche d’un employé. Au Canada, la notion d’emploi « de gré à gré » n’existe pas. La possibilité de fixer de nouvelles conditions d’emploi découlant d’exigences relatives à la sécurité après l’embauche, combinée à l’incidence des lois en matière de protection des renseignements personnels, fait du travail et de l’emploi un domaine où les exigences liées à la sécurité nationale doivent être soigneusement étudiées et traitées.
Pour en savoir plus sur les préoccupations en matière de travail et d’emploi, veuillez consulter les chapitres « Travail et emploi » et « Loi sur la protection des renseignements personnels et Loi canadienne anti-pourriel » du guide Faire affaire au Canada.