6. Le financement d’entreprise
L’investisseur étranger qui cherche à réunir des capitaux pour une entreprise canadienne peut choisir entre le financement par emprunt, le financement par actions ou une combinaison des deux.
Financement par emprunt
Le système financier canadien offre des infrastructures stables et efficaces permettant aux établissements de services financiers au Canada de faire des affaires au pays et dans le monde. La Banque du Canada (une banque centrale indépendante) administre une politique monétaire anti-inflationniste et accélère les opérations interbancaires; les banques à charte et les sociétés de fiducie offrent des services de dépôt, de crédit et de paiement; les sociétés d’assurance confèrent une protection contre une vaste gamme de risques.
Les banques
Le système bancaire canadien est stable depuis longtemps. Le Forum économique mondial classe les banques canadiennes parmi les plus stables au monde. Pendant la crise financière mondiale de 2008, le système bancaire canadien a démontré sa robustesse, notamment du fait de sa gestion prudente, d’une saine réglementation et d’une capitalisation élevée.
Les banques canadiennes et étrangères qui exercent leurs activités au Canada sont régies par la Loi sur les banques du Canada. Les banques à charte du pays fournissent des services de dépôt, de transfert de fonds, de crédit ainsi qu’une multitude de services de placement. Les banques canadiennes disposent d’un réseau de succursales très développé au pays et sont également très actives sur les marchés étrangers.
Les banques étrangères sont également actives sur les marchés des capitaux du Canada. Par l’entremise de filiales ou de succursales canadiennes, les banques étrangères au Canada fournissent généralement des services bancaires et des services de prêt aux entreprises plutôt que des services aux épargnants.
Les autres institutions financières
Même si elles sont moins actives à l’échelle internationale que les banques à charte, les sociétés de fiducie et de prêt canadiennes constituées sous le régime fédéral peuvent également accepter des dépôts et offrir des prêts. Bon nombre d’entre elles se spécialisent dans les prêts garantis par hypothèque.
Les sociétés d’assurance-vie gèrent des fonds de placement distincts, notamment des fonds de pension. Elles ne peuvent accepter de dépôts, mais procurent du financement à moyen terme et à long terme.
Les types de prêts
Les prêteurs offrent deux principaux types de prêts aux entreprises : a) les prêts d’exploitation, visant à contribuer au paiement des dépenses courantes d’entreprise, et b) les prêts à terme, pour les dépenses en immobilisations ou les acquisitions. Les prêts d’exploitation sont généralement à court ou à moyen terme et portent généralement intérêt à un taux lié au marché.
Les prêts à terme, souvent assortis d’une échéance à moyen ou à long terme, exigent un remboursement sur une période définie et sont remboursables à la survenance d’un défaut prescrit ou sur demande.
De nombreux prêteurs exigent qu’une sûreté grevant les actifs de l’emprunteur garantisse leurs prêts. Toutes les provinces canadiennes, à l’exception du Québec, ont adopté des lois sur les sûretés mobilières inspirées par l’article 9 du Uniform Commercial Code des États-Unis (Code commercial uniforme). Même si le régime québécois contient des notions et des procédures différentes, il est similaire à de nombreux égards aux règlements des autres provinces. Au Québec, c’est le Code civil qui régit ces questions. La plupart des provinces canadiennes ont également adopté des lois sur le transfert des valeurs mobilières, inspirées de la Uniform Securities Transfer Act des États-Unis, qui régissent le transfert de valeurs mobilières et autres actifs de placement. Les prêteurs qui n’ont pas d’intérêts personnels dans la société peuvent exiger que leurs actionnaires maintiennent un certain niveau de participation au capital. De plus, les prêteurs peuvent également exiger des garanties personnelles de la part des actionnaires de sociétés privées.
Les programmes d’aide gouvernementale
À l’échelon fédéral, la Banque de développement du Canada aide les petites et moyennes entreprises en fournissant du financement, des services de consultation et de titrisation. Le gouvernement fédéral aide les petites entreprises par l’entremise du Programme de financement des petites entreprises du Canada (« PFPEC »). Ce programme est conçu pour aider les petites entreprises à obtenir du financement en leur offrant des garanties pour les prêts qu’elles obtiennent de prêteurs ordinaires. Les gouvernements provinciaux offrent également parfois des programmes d’aide.
Financement par actions
Les sociétés peuvent également se financer en émettant des actions. À cette fin, la société doit se conformer aux régimes de réglementation en matière de valeurs mobilières du Canada.
La réglementation en matière de valeurs mobilières
Au Canada, les 13 provinces et territoires ont leur propre organisme de réglementation en matière de valeurs mobilières.
Bien qu’il n’existe aucun organisme fédéral de réglementation du commerce de valeurs mobilières, comme la Securities and Exchange Commission (« SEC ») des États-Unis ou la Listing Authority du Royaume-Uni, les provinces prennent des mesures pour coordonner et harmoniser la réglementation. Grâce au régime de passeport, fondé sur la reconnaissance réciproque des systèmes de réglementation et sur la délégation des pouvoirs, ainsi qu’aux Autorités canadiennes en valeurs mobilières, un organisme-cadre regroupant les organismes provinciaux et territoriaux de réglementation des valeurs mobilières, les participants du marché peuvent généralement traiter avec un seul organisme. Par conséquent, l’approbation d’une commission en valeurs mobilières d’une province ou d’un territoire permet l’inscription dans une autre province ou un autre territoire.
L’Ontario ne participe pas au régime de passeport, mais elle peut constituer un organisme de réglementation principal, donnant ainsi aux participants au marché de la province accès aux marchés financiers dans les territoires visés par le passeport en traitant uniquement avec l’Ontario.
Le gouvernement fédéral a déjà mis de l’avant un projet de loi visant la mise en place d’un organisme national de réglementation en valeurs mobilières; toutefois, la Cour suprême du Canada a conclu en décembre 2011 que la loi ne respectait pas la répartition constitutionnelle des compétences.
À la duite de ce revers, le gouvernement fédéral, de concert avec les gouvernements de l’Ontario et de la Colombie-Britannique, a annoncé en septembre 2013 la création d’un régime coopératif en matière de réglementation des marchés des capitaux (« CRMC ») afin d’harmoniser les différentes lois provinciales en matière de valeurs mobilières tout en remplissant un rôle de surveillance des marchés de capitaux.
Actuellement, les gouvernements de la Colombie-Britannique, de l’Ontario, de la Saskatchewan, du Nouveau-Brunswick, de Terre-Neuve-et-Labrador, de la Nouvelle-Écosse, de l’Île-du-Prince-Édouard, du Yukon ainsi que le gouvernement fédéral participent conjointement à la mise en place du CRMC et ont invité les gouvernements des autres provinces et territoires à se joindre à eux. En 2018, la Cour suprême du Canada a conclu que la mise en place du CRMC était constitutionnelle. La pandémie de COVID-19 a toutefois retardé cette mise en place.
Les obligations en matière d’inscription et d’information
Afin de protéger les investisseurs et l’intégrité du marché, on impose certaines obligations aux sociétés par actions et aux autres entités émettrices. Les émetteurs et les vendeurs doivent respecter les obligations en matière d’inscription et d’information.
La personne physique ou morale qui veut effectuer des opérations sur titres, agir à titre de placeur ou exercer l’activité de conseiller aux tiers d’acheter ou de vendre des titres doit être inscrite ou bénéficier d’une dispense prévue par la loi ou d’une ordonnance de dispense discrétionnaire.
Au Canada, le placement de titres crée des obligations d’information. On entend par « placement de titres » l’émission de titres par un émetteur, la négociation de titres par des actionnaires détenant un bloc de contrôle ainsi que la revente de titres initialement émis dans le cadre d’opérations dispensées. À moins qu’une dispense de prospectus ne soit accordée, pour le placement de titres, il faut généralement déposer un prospectus qui révèle de façon complète, véridique et claire tout fait important relatif aux titres émis. Lorsque le prospectus contient une information fausse ou trompeuse (un énoncé faux d’un fait important ou une omission), les souscripteurs qui ont acquis des titres pendant la période du placement disposent de certains recours prévus par la loi : un droit de résolution ou, subsidiairement, d’un droit d’action en dommages-intérêts contre l’émetteur et ses administrateurs, les placeurs qui ont signé le prospectus et tous les experts qui ont donné leur consentement aux termes du prospectus.
Il existe plusieurs dispenses aux exigences en matière d’inscription et de prospectus. Les dispenses de prospectus sont en grande partie harmonisées au Canada. Certaines d’entre elles ont été mises en place parce que certains souscripteurs sont des professionnels avertis qui n’ont pas besoin des renseignements que l’on retrouve dans un prospectus. À titre d’exemple, mentionnons la « dispense pour placement auprès d’investisseurs qualifiés » qui s’applique aux personnes physiques qui satisfont au critère de l’actif net ou du revenu net et à diverses personnes morales ainsi que la « dispense pour investissement d’une somme minimale » qui s’applique aux personnes morales qui achètent des titres pour un coût total d’au moins 150 000 $. D’autres dispenses indiquent que le souscripteur pourrait déjà connaître l’émetteur et/ou ses titres. Citons comme exemple la « dispense relative à l’émetteur fermé » qui permet aux émetteurs fermés de vendre des titres à certaines catégories de souscripteurs (comme des administrateurs, des dirigeants et des employés) sans avoir à déposer de prospectus.
Les sociétés qui se prévalent de dispenses de prospectus fournissent souvent des documents d’information volontaire, comme une notice d’offre. Comme dans le cas d’un prospectus, une personne qui souscrit des titres en se fondant sur une notice d’offre contenant une information fausse ou trompeuse dispose d’un droit d’action prévu par la loi ou encore d’un droit de résolution. Les titres émis en vertu d’une dispense de prospectus peuvent être assujettis à des restrictions de revente (et sont donc parfois vendus à escompte en raison de leur non-liquidité), tandis que les titres placés au moyen d’un prospectus sont généralement librement négociables.
Le placement de titres par voie de prospectus déclenche l’application d’autres obligations de divulgation. Les sociétés ouvertes, appelées « émetteurs assujettis », sont tenues de divulguer immédiatement tout « changement important » dans les affaires de l’émetteur assujetti qui pourrait raisonnablement avoir une incidence considérable sur le cours ou la valeur marchande de ses titres. Cela comprend, entre autres, la divulgation de tout changement réel ou proposé dans le contrôle de l’émetteur assujetti, de l’acquisition ou de la cession d’actifs importants, d’une augmentation ou d’une diminution significative des bénéfices prévus à court terme et des variations en matière de dividendes.
Les marchés boursiers
Les marchés boursiers canadiens ont été consolidés lorsque la Bourse de Montréal et la Bourse de Toronto (« TSX ») ont fusionné en 2008. La TSX est aujourd’hui la seule bourse canadienne destinée aux grands émetteurs. La Bourse de croissance TSX se concentre sur les sociétés à petite capitalisation et la Bourse des valeurs canadiennes se concentre sur les sociétés à microcapitalisation et les sociétés émergentes.
La Bourse de Montréal s’occupe du commerce des produits dérivés. Elle a également créé le Marché climatique de Montréal, un marché canadien de produits environnementaux, en collaboration avec la Chicago Climate Exchange.
L’accès par les émetteurs étrangers aux marchés des capitaux canadiens
Le régime d’information multinational (« RIM ») adopté par la SEC et les Autorités canadiennes en valeurs mobilières élimine bon nombre d’obstacles auxquels faisaient face les émetteurs américains offrant des valeurs mobilières au Canada. Il facilite les placements de valeurs mobilières, les offres de rachat, les offres publiques d’achat et les regroupements d’entreprises transfrontaliers ainsi que le dépôt des documents d’information continue.
Le RIM permet aux émetteurs canadiens et américains admissibles de répondre à certaines exigences relatives aux placements et à la communication d’information en soumettant des documents d’information conformes aux exigences du pays de l’émetteur et à certaines exigences supplémentaires d’information. Aux termes du RIM, un émetteur américain peut effectuer le placement de valeurs mobilières au Canada sans devoir produire un prospectus entièrement nouveau conforme aux exigences et aux obligations prévues par la législation canadienne en valeurs mobilières.
Les capitaux privés et le capital de risque
Les sociétés peuvent également obtenir du financement au moyen de fonds de capital-investissement privé. Ces fonds fournissent du financement à diverses étapes de la croissance, y compris les capitaux destinés au démarrage, à l’expansion des activités et aux fusions et acquisitions.
Les sociétés de capital de risque investissent dans les entreprises en démarrage et les petites entreprises qui, selon elles, ont un potentiel de croissance à long terme. Elles acquièrent généralement une minorité des actions de la société en échange d’un droit de regard sur les décisions de cette dernière.