Fasken a plaidé et obtenu gain de cause devant la Cour suprême du Canada dans la plus importante cause en matière de droits linguistiques en vertu de la Loi sur les langues officielles canadienne.
« Cette décision historique est également susceptible d’avoir une incidence sur de nombreuses lois provinciales », a déclaré Martin Sheehan, cochef du groupe de pratique Litiges et résolution de conflits de Fasken. « Son incidence se fera aussi sentir sur la façon dont les droits linguistiques entrent en jeu dans les tribunaux québécois en vertu de l’article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867 ».
De prime abord, l’action initiale de Kassem Mazraani contre le ministre du Revenu national devant la Cour canadienne de l’impôt (CCI) en 2016, n’avait rien à voir avec les droits linguistiques. La question était de savoir s’il était un employé ou un entrepreneur indépendant. L’employeur de Mazraani, notre cliente, Industrielle Alliance, Assurance et services financiers inc. (IA), est intervenue car le verdict risquait d’engendrer des conséquences majeures pour l’entreprise, qui emploie 400 autres représentants en assurance à titre d’entrepreneurs indépendants.
Au procès, le premier témoin de l’IA a demandé à témoigner en français. Bien que le juge ait dit que l’on pouvait retenir les services d’un interprète, il a ensuite ajouté que le temps consacré à trouver un interprète retarderait l’audience. Sous la pression du juge, on en est venu à un compromis hâtif pour le premier témoin, qui a accepté de parler anglais. Malheureusement, ce compromis a ensuite été imposé à d’autres francophones sans avoir obtenu d’abord leur consentement libre et éclairé. Au cours des six jours suivants, lorsque d’autres témoins d’IA s’exprimaient en français, le juge les interrompait et continuait à parler en anglais ou insistait pour que ces témoins fassent de même – ce qui a eu pour effet de transformer le fond du litige, qui ne portait plus sur les questions fiscales, mais sur les droits linguistiques. M. Mazraani a eu gain de cause devant la CCI et IA a interjeté appel avec succès devant la Cour d’appel fédérale. M. Mazraani a ensuite présenté une demande d’autorisation de pourvoi devant la Cour suprême du Canada, qui lui a été accordée.
Selon la Cour suprême, « les violations des droits linguistiques ont été nombreuses et, dans certains cas, graves et persistantes, et elles ont contribué à déconsidérer l’administration de la justice ». La décision précise également que « le juge aurait dû intervenir pour expliquer que le droit de témoigner dans la langue officielle de son choix est inconditionnel ». La décision Mazraani c. Industrielle Alliance, Assurance et services financiers inc., 2018 CSC 50, a non seulement préservé le droit d’IA d’obtenir un nouveau procès équitable, mais est également venue confirmer la large protection accordée aux droits linguistiques des minorités dans le système fédéral de justice civile.
Yves Turgeon, Michael Shortt et Paul Côté-Lépine sont intervenus dans ce dossier devant la Cour suprême. Grâce à leur travail, désormais, lorsqu’une personne demandera à un juge la permission de s’exprimer dans la langue officielle de son choix, la réponse du juge devra toujours être « oui » .