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La Cour suprême des États-Unis resserre les critères d’admissibilité au brevet pour les procédés informatiques

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Bulletin Propriété intellectuelle

Le 19 juin 2014, la Cour suprême des États-Unis a rendu sa décision dans l'affaire Alice Corp. v. CLS Bank International (PDF - disponible en anglais seulement). Cette décision était très attendue du fait qu'elle traite de la brevetabilité des procédés informatiques. Dans sa décision, la Cour a soutenu que les revendications visaient un objet inadmissible au brevet étant donné qu'elles portaient sur une idée abstraite.

Alice Corp. (« Alice ») était propriétaire de plusieurs brevets visant des procédés permettant d'atténuer le « risque de règlement » (c.‑à‑d., le risque qu'une seule partie à une opération financière soit en mesure de s'acquitter de son obligation) au moyen d'un ordinateur à titre de tiers intermédiaire . CLS Bank International (« CLS Bank ») exploitait un réseau global qui intégrait des procédés informatiques pour exécuter des opérations monétaires. CLS Bank a intenté une poursuite contre Alice en vue d'obtenir une déclaration selon laquelle les brevets d'Alice étaient invalides; Alice a présenté une demande reconventionnelle en contrefaçon.

En termes généraux, les revendications portaient sur ce qui suit : (1) un procédé permettant d'échanger les obligations (les revendications de procédés); (2) un système informatique configuré pour exécuter le procédé susmentionné (les revendications portant sur le système) et (3) un support lisible par un ordinateur contenant un code de programmes permettant d'exécuter la méthode (les revendications visant le support informatique). Toutes ces revendications sont mises en œuvre au moyen d'un ordinateur.

Cette affaire a été suivie avec beaucoup d'intérêt et plusieurs parties intéressées ont déposé des mémoires à titre d'intervenants non-partie à la procédure, notamment d'importantes entreprises spécialisées dans la technologie provenant des deux camps. D'une part, les entreprises spécialisées dans la technologie (souvent les défendeurs dans le cadre de poursuites en contrefaçon de brevets intentées par des « patent trolls ») qui ne souhaitaient pas que les brevets qui visent des procédés informatiques soient accordés de façon trop généreuse. D'autre part, des sociétés dotées d'importants portefeuilles de brevets qui ne souhaitaient pas que la validité de leurs brevets soit remise en question et qu'ainsi la valeur potentielle de leur portefeuille puisse être sensiblement réduite.

En fonction d'un précédent jurisprudentiel[1], la Cour a soutenu qu'il existe une approche en deux temps pour évaluer si une revendication d'un brevet est inadmissible. Premièrement, la Cour doit déterminer si la revendication en question vise l'une des exceptions implicites aux objets admissibles à un brevet (c.‑à‑d., les lois de la nature, les phénomènes naturels ou les idées abstraites). Dans l'affirmative, la Cour se demande si les éléments de la revendication, lorsqu'ils sont examinés individuellement et « selon une combinaison ordonnée », ont pour effet de transformer la nature de la revendication de sorte qu'elle soit considérée comme brevetable.

En appliquant cette approche en deux temps, la Cour a d'abord décidé que les revendications de procédés visaient l'idée abstraite du règlement au moyen d'un intermédiaire, c.‑à‑d. à l'aide d'un tiers (en l'espèce, l'ordinateur) pour atténuer le risque de règlement. Deuxièmement, les revendications de procédés fournissaient simplement des directives pour mettre en œuvre l'idée abstraite du règlement au moyen d'un intermédiaire sur un ordinateur générique; par exemple, elles n'amélioraient pas la fonctionnalité de l'ordinateur ni n'avaient pour effet d'améliorer une autre technique ou un autre domaine technique. Ainsi, les revendications de procédés ne transforment pas l'idée abstraite en une invention brevetable.

En ce qui concerne les revendications portant sur le système et les revendications visant un support informatique, la Cour, en utilisant une approche « privilégiant le fond plutôt que la forme », a soutenu qu'elles sont essentiellement les mêmes que les revendications de procédés et, en conséquence elles sont inadmissibles pour les mêmes motifs.

En résumé, la Cour a conclu que les revendications visaient un brevet dont l'objet est inadmissible. Les brevets étaient donc invalides.

Le résultat lui-même n'était pas surprenant étant donné que les tribunaux inférieurs avaient également conclu que l'objet des réclamations était invalide (bien que même la décision majoritaire rendue par la cour d'appel affichait une division à l'égard des motifs). Néanmoins, cette décision pourrait, du moins éventuellement, avoir des répercussions vastes pour les brevets américains visant des procédés informatiques. Il reste maintenant à voir quelle incidence cette décision aura sur la pratique du bureau des brevets américains en ce qui concerne les examens et la façon dont les tribunaux appliqueront la décision dans d'autres cas portant sur la validité des brevets visant des procédés informatiques. Dans tous les cas, on doit probablement s'attendre à un examen plus minutieux des brevets et des demandes de brevets aux États-Unis en ce qui concerne les procédés logiciels ou informatiques.


[1] Mayo Collaborative Services v. Prometheus Laboratories, Inc. 566 U.S. __ (2012)

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Auteur

  • Ling F. Wong, Avocat-conseil | Agent de brevets | Agent de marques de commerce, Vancouver, BC, +1 604 631 4738, liwong@fasken.com

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