Lorsqu'un employé occupe un emploi de façon parallèle à son emploi principal, une augmentation des revenus tirés de ces sources après le congédiement peut-elle être appliquée en atténuation des dommages-intérêts? Dans la décision Pakozdi v. B&B Heavy Civil Construction Ltd, 2018 BCCA 23 (PDF - disponsible en Anglais seulement), la Cour d'appel de la Colombie-Britannique a répondu par l'affirmative à cette question. Ces revenus viennent mitiger le préjudice subi et seront donc déduits de toute condamnation en dommages-intérêts pour congédiement illégal.
Les faits
Le demandeur était un estimateur de soumissions qui avait commencé à travailler pour l'employeur, B&B, à titre de travailleur autonome et qui est par la suite devenu un employé permanent. Au cours de son emploi chez B&B, il a continué, durant ses temps libres, à fournir à d'autres entreprises des services à titre de consultant autonome. B&B était au courant du fait que le demandeur fournissait ses services à temps partiel à titre de travailleur autonome à d'autres entreprises et ne s'y opposait pas.
Après une année de service, B&B a congédié le demandeur en lui donnant un préavis de deux semaines. Après son congédiement, le demandeur a augmenté son nombre d'heures de travail à titre de consultant autonome, améliorant par le fait même son revenu à ce titre.
Le demandeur a par la suite poursuivi B&B pour congédiement illégal. Le tribunal a accueilli sa plainte et a condamné B&B à lui verser l'équivalent de cinq (5) mois de salaire à titre de préavis raisonnable de fin d'emploi. Compte tenu de l'état de santé du demandeur et des difficultés engendrées par cet état de santé dans la recherche d'un nouvel emploi, le délai de préavis a été prolongé de trois (3) mois supplémentaires pour s'établir à un total de huit (8) mois de salaire.
La juge de première instance a rejeté l'argument de B&B selon lequel le demandeur, consécutivement à son congédiement, avait mitigé le préjudice qu'il avait subi en augmentant son nombre d'heures de travail à titre de consultant autonome et, donc, son revenu. Pour ce faire, elle s'est appuyée sur la décision de la Cour suprême de la Colombie-Britannique dans l'affaire Redd's Roadhouse Restaurants Ltd. v. Randall , 2014 BCSC 1464 (PDF - disponsible en Anglais seulement), qui était venue établir qu'il convenait d'exclure les revenus d'un second emploi du calcul des dommages-intérêts pour congédiement illégal du premier emploi lorsque l'employé, à la connaissance de l'employeur, occupait le second emploi pendant la durée de l'emploi principal.
La décision de la Cour d'appel
B&B a eu gain de cause en appel devant la Cour d'appel de la Colombie-Britannique.
La Cour d'appel a jugé que la juge de première instance a erré lorsqu'elle a omis de comptabiliser l'augmentation des revenus à titre de consultant autonome en atténuation des dommages-intérêts. La Cour a confirmé que, lorsqu'un employé congédié atténue ses pertes par le remplacement de son revenu d'emploi par un nouveau revenu qui n'aurait pas pu être gagné si la relation d'emploi s'était poursuivie, ce nouveau revenu doit être comptabilisé en mitigation du préjudice subi. Par conséquent, ce nouveau revenu doit être déduit du calcul de toute condamnation en dommages-intérêts pour congédiement illégal de l'employé. De façon générale, une augmentation du revenu dans le cadre de tout emploi secondaire ou à titre de consultant autonome, entre autres, doit être prise en compte à titre de nouveau revenu gagné en mitigation du préjudice subi. Évidemment, cela prend pour acquis que l'augmentation du revenu peut s'expliquer par une augmentation des efforts déployés qui a été rendue possible par le congédiement de l'employé de son emploi principal. Si l'augmentation de revenu est reliée à des facteurs autres que les efforts consacrés par l'employé, c'est-à-dire que l'employé aurait eu la même augmentation de revenu même si la relation d'emploi s'était poursuivie avec l'employeur principal, le revenu supplémentaire ne doit alors pas être pris en considération dans l'atténuation des dommages-intérêts.
La Cour d'appel a également conclu que, bien que le délai de préavis accordé par la juge de première instance, soit cinq (5) mois, se situe dans la fourchette raisonnable pour un employé dans la cinquantaine ayant eu une relation d'emploi de courte durée avec l'employeur, l'état de santé du demandeur ne constituait pas un motif valable de prolongation du délai de préavis de cinq (5) à huit (8) mois puisque le demandeur était en mesure de continuer à travailler durant ledit délai de préavis.
À retenir
Les employeurs doivent prendre acte du fait que, dans le calcul du revenu gagné après la cessation de l'emploi de l'ancien employé aux fins de la mitigation du préjudice subi dans la perspective d'une poursuite éventuelle en congédiement illégal, il est primordial d'évaluer si ce revenu gagné après la fin de l'emploi l'aurait été si l'employé n'avait pas été congédié. Autrement dit, la personne a-t-elle été en mesure de gagner ce revenu en raison de son congédiement ou est-ce que ce revenu aurait probablement été gagné nonobstant sa relation avec l'employeur principal? Le revenu qui aurait été gagné en dépit de la relation avec l'employeur n'est pas à comptabiliser et, donc, ne doit pas être déduit du calcul des dommages-intérêts attribués dans une poursuite pour congédiement illégal.
Cette décision est aussi utile pour les employeurs dans la mesure où elle confirme que l'existence de problèmes de santé n'engendrera pas automatiquement une prolongation du délai de préavis. Afin qu'ils soient considérés dans l'évaluation du délai de préavis à accorder, les ennuis de santé en cause doivent avoir une incidence défavorable sur la capacité de l'employé à se trouver un autre emploi.