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Cession ou sous-location d’un bail commercial : une décision qui suit la tendance, mais qui doit être réfléchie

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Bulletin droit immobilier

Dans un contexte teinté par la prédominance du travail à distance et l'appréhension d'une deuxième vague de la Covid-19, nombreux sont les dirigeants d'entreprises qui songent au transfert de bail. D'ailleurs, aux États-Unis et au Canada, on observe déjà une hausse du nombre de locaux offerts en sous-location sur les différents marchés. Ce phénomène s'explique notamment par l'accueil favorable du travail à distance de la part d'un grand nombre d'employés, mais également parce que la soudaine popularité du travail à la maison est perçue par bien des employeurs comme une opportunité de réduire leur fardeau financier à long terme en diminuant les coûts associés au loyer. De surcroît, une transition vers un milieu de travail plus adapté au contexte de la pandémie pourrait favoriser la sécurité des employés et ainsi satisfaire ces derniers et leurs employeurs.

Lorsqu'un transfert de bail est envisagé, il importe tout d'abord de bien cibler l'objectif de ce changement. Puisque la majorité des baux commerciaux contiennent des dispositions encadrant leur transfert, une analyse minutieuse des droits et obligations de chacun est requise avant d'entamer toute négociation. Une bonne connaissance des intérêts de chaque partie favorisera la conclusion d'une entente. Vous trouverez ci-dessous un bref survol des éléments à considérer lors d'un transfert de bail.

Objectif visé

Généralement, les transferts de baux visent à permettre la réduction de la superficie locative des lieux loués et conséquemment le loyer payable. Dans certains cas, l'objectif est de cesser complètement les activités d'un locataire à une adresse donnée. Un transfert pourrait également se conclure afin de créer des espaces de travail partagés avec un sous-locataire avec qui il existe une certaine synergie et un bénéfice mutuel d'affaires. 

Véhicule approprié

Mentionnons que le transfert d'un bail commercial peut prendre deux principales formes, soit la cession et la sous-location.

Rappelons qu'il existe une distinction élémentaire à faire entre une sous-location et une cession de bail et qu'un choix devra être fait à cet égard par les parties envisageant le transfert d'un bail. Dans le cas d'une sous-location, le lien contractuel existant entre le bailleur et le locataire demeurera en vigueur alors qu'un troisième joueur, le sous-locataire, s'engagera envers le locataire à respecter diverses obligations afin de pouvoir utiliser en tout ou en partie les lieux loués. Dans le cas d'une cession, le lien contractuel existant entre le bailleur et le locataire sera rompu et un nouveau joueur, le cessionnaire, s'engagera envers le bailleur à respecter les obligations du bail à la place du locataire.

À la lumière de ce qui précède, soulignons simplement l'importance de bien réfléchir à l'objectif poursuivi et au véhicule le plus approprié pour concrétiser un transfert de bail.

Les droits et obligations prévus au bail

La majorité des baux commerciaux contiennent une clause spécifique relative au transfert du bail. Une lecture de cette clause permet rapidement de déterminer s'il existe des restrictions à la sous-location ou à la cession du bail et donc de connaître les droits et obligations de chaque partie à cet égard. À titre d'exemple, les éléments suivants se retrouvent fréquemment dans les baux commerciaux:

Le locataire ne doit pas être en défaut au moment du transfert

Ainsi, dans la majorité des cas, le rapport de force du locataire et son droit de transférer le bail seront affectés ou carrément mis en péril s'il se trouve en défaut aux termes du bail, d'où l'importance de bien connaître et comprendre l'ensemble des obligations qui découlent dudit bail. Avant d'entamer les négociations, un bailleur devrait par conséquent porter une attention particulière à la situation du locataire afin de déterminer si l'ensemble des obligations de ce dernier sont rencontrées ou, selon le cas, ont bien été rencontrées par le passé, par exemple en requérant l'avis du personnel en charge de l'immeuble où se trouvent les lieux loués et en obtenant un état de compte à jour des sommes dues par le locataire.  

Le locataire devra demeurer solidairement responsable des obligations prévues au bail

Effectivement, la décision de transférer un bail peut être lourde de conséquences, car tout dépendamment de l'entente entre les parties et des termes utilisés à la documentation légale, un locataire pourrait être tenu responsable des actions (et des défauts) du sous-locataire ou du cessionnaire, et ce, même après le transfert. La durée d'un bail commercial s'étendant souvent sur plusieurs années, il pourrait s'agir d'un lourd fardeau légal et financier à porter alors qu'une négociation adéquate permet souvent de trouver un compromis sur cet aspect.

Consentement du bailleur et garanties financières

Lors d'un transfert de bail, le bailleur s'expose aux risques de se retrouver avec un locataire qui a un comportement problématique, un locataire inapproprié pour le local convoité ou encore un locataire qui fait défaut de payer son loyer. Par conséquent, les termes du bail assujettiront souvent le transfert à l'obtention du consentement du bailleur et à l'octroi de garanties financières en faveur du bailleur.

Entente écrite

La rédaction d'une entente écrite de sous-location ou de cession de bail pourrait être exigée afin de consigner par écrit l'ensemble des modalités régissant le transfert du bail. Quoi qu'il en soit, cela constituerait une bonne pratique, car comme le dit l'adage, « les écrits restent et les paroles s'envolent ».

Dans tous les cas, une lecture approfondie du bail est de mise et pourrait permettre d'identifier d'autres obligations qui, bien que n'ayant pas spécifiquement pour objet le transfert du bail, devraient néanmoins être considérées (par exemple, une clause d'usage ou un droit de résiliation). Comme toujours, dans l'éventualité où aucune clause n'est prévue au bail, les dispositions du Code civil du Québec devraient guider les parties dans le cadre de leurs négociations.

Les intérêts de chaque partie

Outre les droits et obligations de chacun, de nombreux facteurs peuvent influencer les parties et apporter une plus-value à la négociation. C'est pourquoi avant toute négociation, chacun des locataires et bailleurs devrait se pencher sur les intérêts et motivations de leur(s) interlocuteur(s) à procéder à un transfert de bail, puis chercher des solutions appropriées. En voici quelques exemples :

  • Un bailleur inquiet de perdre un locataire fiable pourrait être rassuré si le sous-locataire proposé, ou, selon le cas, le cessionnaire proposé, est une personne qu'il connaît (par exemple, parce que cette dernière loue déjà un local à ce même bailleur);
  • Pour éliminer les pertes du bailleur, le sous-locataire pourrait assumer les frais liés à la rédaction des documents légaux;
  • Le transfert peut constituer pour le bailleur une occasion intéressante de négocier une durée plus longue du bail;
  • Advenant un locataire ayant des difficultés financières, le bailleur pourrait être favorable à un transfert de bail plutôt que de prendre le risque de se retrouver avec un locataire insolvable.

Mise en garde concernant l'admissibilité à l'AUCLC

Dans le contexte bien particulier de la pandémie de Covid-19, il serait judicieux de la part d'un locataire faisant l'objet d'une demande d'aide d'urgence du Canada pour le loyer commercial (AUCLC) de consulter un conseiller juridique avant de procéder à tout transfert de son bail. Selon la situation particulière de chaque locataire, une telle décision pourrait le rendre inadmissible à l'AUCLC ou rendre nécessaire la conclusion d'une entente supplémentaire, par exemple.

Conclusion

En conclusion, que vous soyez locataire ou bailleur, assurez-vous d'identifier les objectifs poursuivis par le transfert de bail, de choisir le bon véhicule (cession ou sous-location), de bien déceler les clauses du bail qui s'appliquent et surtout d'en comprendre les tenants et aboutissants avant d'entamer toute négociation qui devrait être guidée par les intérêts et les motivations de chaque partie. En cas de doute ou pour obtenir de l'aide quant à la préparation ou la révision des documents légaux qui découlent d'une sous-location ou d'une cession de bail, référez-vous à vos conseillers juridiques.

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