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La législation ontarienne qui limite les hausses salariales dans le secteur public est jugée inconstitutionnelle

Fasken
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Bulletin RH

En juin 2019, le gouvernement de l’Ontario a présenté le projet de loi 124, la Loi de 2019 visant à préserver la viabilité du secteur public pour les générations futures (le « projet de loi 124 »). Le projet de loi limitait les augmentations de salaire d’environ 780 000 travailleurs syndiqués et non syndiqués du secteur public à 1 % par an pour une période de trois ans. Le projet de loi 124 s’appliquait :

  • aux personnes dont le salaire était payé directement par le gouvernement de l’Ontario; et
  • aux personnes dont le salaire était payé indirectement, en totalité ou en partie, par le gouvernement (p. ex., employés d’une université, employés d’un foyer de soins de longue durée).

Les organisations syndicales ont été nombreuses à contester la constitutionnalité du projet de loi 124. Elles revendiquaient surtout que le projet de loi 124 violait le droit à la liberté d’association de leurs membres, qui est prévu à l’alinéa 2d) de la Charte canadienne des droits et libertés (la « Charte »).

La décision

Dans une décision rendue le 29 novembre 2022, un tribunal ontarien a conclu que le projet de loi 124 portait atteinte au droit à la liberté d’association protégé par l’alinéa 2d) de la Charte et que l’article 1 de la Charte ne pouvait pas être invoqué pour justifier cette atteinte.

Le tribunal a rappelé que la liberté d’association comprend les droits suivants :

  • le droit à un véritable processus de négociation collective qui permet aux travailleurs de rencontrer les employeurs en étant plus sur le même pied d’égalité, de leur présenter les propositions qu’ils souhaitent et de voir ces propositions évaluées en toute bonne foi;
  • le droit à la grève.

Le tribunal a souligné qu’il y a atteinte à la liberté d’association lorsqu’une action du gouvernement porte substantiellement atteinte au processus de négociation collective. Cela comprend les cas où une loi interdit ou limite certains sujets, y compris la question importante des salaires, qui peuvent être discutés ou négociés dans le cadre du processus de négociation collective.

C’est pourquoi le tribunal a jugé que le projet de loi 124 portait substantiellement atteinte au processus de négociation collective en limitant les négociations pour des augmentations de salaire à un plafond de 1 %. Cette restriction a eu d’autres répercussions importantes sur le processus de négociation collective, dont la limitation de la capacité des syndicats à échanger des revendications salariales contre des avantages non pécuniaires et la diminution de l’utilité du droit à la grève.

En raison de cette conclusion, le gouvernement devait justifier l’atteinte en vertu de l’article 1 de la Charte. Le tribunal a conclu que le gouvernement n’y était pas parvenu. Plus précisément, le tribunal a souligné ce qui suit :

  • Sauf dans les cas d’urgences financières évidentes, les considérations budgétaires ne permettent habituellement pas de justifier une violation à la Charte. La situation économique de l’Ontario en 2019 n’était pas dans un état suffisamment critique pour justifier une atteinte au droit à la liberté d’association.
  • Le projet de loi 124 était trop large. Il s’appliquait à des salaires qui : 1) n’étaient pas liés au budget ou au déficit de l’Ontario (p. ex., les salaires des employés d’Ontario Power Generation); et 2) étaient liés seulement indirectement au budget provincial, mais pour lesquels le gouvernement disposait d’autres moyens de plafonner sa contribution (p. ex., les employés d’une université).
  • Pendant les négociations collectives, le gouvernement aurait pu adopter la position selon laquelle il ne pouvait pas payer des augmentations salariales de plus de 1 %. Il ne l’a pas fait par crainte que cette position entraîne des grèves. Le droit à la grève est protégé constitutionnellement et la tentative du gouvernement d’éviter des grèves en légiférant sur les augmentations salariales ne pouvait pas être justifiée.

Et maintenant?

Le projet de loi 124 n’a plus force de loi en Ontario et n’a plus aucun effet. Cela dit, le gouvernement de l’Ontario a annoncé son intention de porter cette décision en appel. Il pourrait demander à ce que la décision du tribunal, à savoir que le projet de loi 124 n’a aucun effet, soit suspendue (ou « mise en pause ») en attendant l’issue de l’appel.

La décision soulève des considérations importantes pour les employeurs du secteur public dans son ensemble. En particulier, les employeurs devront se poser les questions suivantes :

  • Quelle sera l’incidence de la décision sur les stratégies qui seront employées, les positions qui seront adoptées et les propositions qui seront faites lors des prochaines rondes de négociation collective?
  • Les conventions collectives actuelles contiennent-elles des dispositions de réouverture en ce qui concerne les salaires ou d’autres avantages pécuniaires ou non pécuniaires?
  • Comment aborder les augmentations salariales des employés non syndiqués dans le contexte économique actuel?

Pour obtenir des conseils sur l’incidence que cette décision pourrait avoir sur votre organisation ou sur la façon d’élaborer une stratégie efficace en réponse à cette décision, n’hésitez pas à communiquer avec les auteurs du présent article ou avec votre avocat(e) attitré(e) chez Fasken.

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Auteurs

  • Gillian Round, Associée, Toronto, ON, +1 416 865 5469, ground@fasken.com
  • Christopher Pigott, Associé, Toronto, ON, +1 416 865 5475, cpigott@fasken.com

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