Aucun projet de production d’énergie, d’exploitation minière ou d’infrastructure ne peut être mené à bien au Canada aujourd’hui sans l’appui des peuples autochtones touchés. Dans ce contexte, un plus grand nombre de communautés autochtones veulent acquérir une participation dans ces projets, et un plus grand nombre de promoteurs de projets ou de propriétaires d’installations souhaitent s’associer à ces groupes autochtones pour faciliter la réconciliation économique et gérer les risques liés aux projets.
La participation de groupes autochtones aide à harmoniser les intérêts des parties prenantes du projet ou de l’installation, à partager les avantages directs et à renforcer les capacités. Par conséquent, de nombreux programmes, dont des programmes de financement, ont été élaborés pour soutenir ces investissements, mais ils ne sont pas encore pleinement déployés. Nous nous attendons à voir dorénavant beaucoup plus d’activités liées à de telles transactions.
Fasken a suivi l’évolution des transactions dans ce domaine au fil de ses mandats auprès de clients des secteurs de l’énergie, des mines et des infrastructures. À la lumière de ce que nous observons sur le marché en ce qui a trait à la prise de participation par des Autochtones, nous pouvons prévoir où se présenteront les occasions pour nos clients et à quoi ils peuvent s’attendre dans la gestion de leurs projets et de leurs priorités d’affaires.
Voici les quatre principales tendances observées au cours des cinq dernières années :
1. La plupart des transactions dans lesquelles les Autochtones ont une participation sont liées au secteur de l’énergie en Alberta et en Colombie-Britannique
Parmi les transactions que nous avons examinées (soit celles visant des projets dans lesquels des Autochtones ont une participation et qui ont été annoncés publiquement, sont en cours de construction, ont été achevés au cours des cinq dernières années ou sont en exploitation), toutes visaient le secteur de l’énergie ou des infrastructures connexes; particulièrement l’énergie renouvelable. D’ailleurs, l’énergie renouvelable (plus précisément l’énergie éolienne, l’hydroélectricité et l’énergie solaire) menait le bal des projets les plus courants, suivi du transport d’électricité. Toutefois, par rapport aux dix dernières années, nous constatons une diminution des projets d’énergie éolienne, mais une augmentation des projets de transport d’électricité et autres.
Ce degré de concentration peut être lié à la disponibilité d’initiatives de financement visant à faire intervenir les groupes autochtones dans le secteur de l’énergie au moyen de financement ou de subventions, ainsi qu’à l’attrait de tels projets pour les groupes autochtones. Par exemple, le First Nations Clean Energy Business Fund de la Colombie-Britannique prévoit l’octroi par la province d’un financement des capacités et de la prise de participation aux « bandes » des Premières Nations au sens de la Loi sur les Indiens ou aux corps dirigeants autochtones admissibles, situés en Colombie-Britannique [1].
Des transactions que nous avons examinées, c’est en Alberta (30 %) que le plus grand nombre de transactions ont eu lieu, puis en Colombie-Britannique (20 %), en Ontario (15 %), en Saskatchewan (10 %), au Nouveau-Brunswick (10 %), au Manitoba (7,5 %), au Québec (5 %) et au Nunavut (2,5 %). Il s’agit d’une diminution importante pour l’Ontario par rapport aux 10 dernières années, et d’une augmentation considérable pour l’Alberta.
2. Le nombre de groupes autochtones varie selon le type de projet
Nous avons constaté qu’il y avait une répartition presque égale entre les projets auxquels un seul groupe participe et ceux auxquels plusieurs groupes participent.
Le nombre de groupes variait selon le secteur. Dans notre échantillon de projets, le nombre moyen (par projet) de communautés autochtones ayant une participation était le suivant :
- Infrastructures linéaires (p. ex., pipelines, lignes de transport) : 15,4
- Lignes de transport : 12,7
- Oléoducs et gazoducs : 19,5
- Infrastructures non linéaires (p. ex., installations de production d’électricité) : 1,9
- Production d’hydroélectricité : 2,5
- Production d’énergie solaire : 2
- Production d’énergie éolienne : 1,6
- Autre : 2,1
Comme on pouvait s’y attendre, les projets linéaires et les autres projets qui s’étendent sur une plus grande superficie, comme les lignes de transport et les pipelines, tendent à faire intervenir un nombre plus élevé de groupes autochtones, puisque le projet pourrait avoir une incidence sur plusieurs communautés autochtones. De plus, nous constatons que les projets de plus grande valeur semblent faire appel à un plus grand nombre de groupes autochtones pour aider avec le financement et le partage des coûts, tandis que seulement un ou deux groupes interviennent dans les projets à site unique ou nécessitant des investissements de moindre envergure.
3. Les sociétés en commandite sont le véhicule le plus utilisé pour la participation des Autochtones au capital
Bien que les structures examinées varient, les sociétés en commandite semblent être la structure la plus courante en raison de la responsabilité limitée assumée par les commanditaires et des avantages fiscaux potentiels pour le commanditaire autochtone. Dans certains cas où plusieurs groupes autochtones sont concernés, les groupes étaient directement titulaires de parts de la société en commandite ou de l’autre véhicule; dans d’autres cas, ils avaient formé une société en commandite collective ou un autre véhicule qui était titulaire de leur participation globale dans le projet ou l’installation.
4. Les groupes autochtones sont surtout titulaires d’une participation minoritaire
Nous avons remarqué que, dans 25 % des projets que nous avons étudiés, les Autochtones étaient titulaires d’une participation majoritaire dans le projet ou avaient propriété absolue sur le projet. La participation moyenne d’une participation minoritaire (lorsque publique) était de 21 %. Il s’agit d’une augmentation importante par rapport à la moyenne de 14,2 % (selon les données publiques) des dix dernières années.
Ce que nous réserve l’avenir
Au cours de la prochaine année, nous surveillerons l’incidence potentielle du financement disponible sur la participation des Autochtones au capital.
Le financement de la participation des Autochtones dans des projets provient actuellement de diverses sources, comme de subventions gouvernementales, la Banque de l’infrastructure du Canada [2] et des prêts privés. Bien qu’il existe de multiples sources potentielles, un certain nombre d’entre elles ne semblent pas encore être entièrement utilisées.
En Alberta, un soutien important est offert par l’entremise de l’Alberta Indigenous Opportunities Corporation (AIOC), un programme de garantie d’emprunt qui offre des prêts allant de 20 millions de dollars à 250 millions de dollars pour des projets admissibles [3]. Pour être admissible, un projet doit comprendre l’investissement par un ou plusieurs groupes autochtones d’au moins 20 millions de dollars, être un projet autorisé et concerner les ressources naturelles ou une infrastructure connexe [4].
Fait intéressant, dans la moitié des transactions comprenant une prise de participation autochtone que nous avons examinées et qui ont été réalisées en Alberta au cours des cinq dernières années, on avait fait appel à l’AIOC. Nous nous attendons à ce que d’autres grands projets reçoivent un soutien financier dans le cadre de ce programme. Nous constatons qu’il existe des programmes semblables en Ontario. D’autres régions canadiennes pourraient créer des organismes analogues pour aussi appuyer la propriété autochtone.
En effet, nous nous attendons à ce que différentes administrations dévoilent de nouveaux programmes et incitatifs (ou décident d’élargir ou de modifier des programmes existants) dans un avenir rapproché, ce qui pourrait continuer de faire bouger les choses en ce qui concerne la participation des Autochtones au capital de projets partout au pays.
Veuillez noter que notre analyse est fondée uniquement sur des renseignements publics concernant des transactions récentes faisant intervenir la propriété autochtone dans des projets d’énergie et d’infrastructure qui ont été annoncés publiquement, sont en cours de construction ou ont été achevés au cours des cinq années précédant la date de publication du présent bulletin. Notre analyse ne reflète pas un examen exhaustif de toutes ces transactions. Étant donné le peu de renseignements disponibles, il est probable que certaines de ces observations ne soient pas statistiquement significatives.
[1] « First Nations Clean Energy Business Fund » (2022) en ligne : gouvernement de la Colombie-Britannique https://www2.gov.bc.ca/gov/content/environment/natural-resource-stewardship/consulting-with-first-nations/first-nations-clean-energy-business-fund (disponible uniquement en anglais).
[2] « Infrastructures autochtones » (2022), en ligne : Banque de l’infrastructure du Canada https://cib-bic.ca/fr/secteurs/infrastructures-autochtones/.
[3] « Alberta Indigenous Opportunities Corporation » (2022), en ligne : AIOC https://www.theaioc.com/ (disponible uniquement en anglais).
[4] « Alberta Indigenous Opportunities Corporation » (2022), en ligne : AIOC https://www.theaioc.com/ (disponible uniquement en anglais).