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La Cour supérieure du Québec accorde le remboursement de la totalité des frais d’expertise engagés dans le cadre de la contestation constitutionnelle du CEPMB

Fasken
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Bulletin Litiges et résolution de conflits

Le 6 juillet 2023, la Cour supérieure du Québec a rendu une décision sans précédent en concluant que les sociétés demanderesses de l’affaire Merck Canada inc. c. Procureur général du Canada ont droit au remboursement de la totalité de leurs frais d’expertise, soit près de 800 000 $. L’adjudication des frais par la Cour supérieure fait suite au jugement de la Cour d’appel du Québec rendu en 2022, lequel avait invalidé en partie les modifications apportées en 2019 au Règlement sur les médicaments brevetés.

Nous avons déjà analysé la décision de la Cour supérieure du Québec, la décision de la Cour d’appel du Québec et la décision de la Cour fédérale.

Le contexte

En 2019, le gouvernement fédéral a proposé des modifications au Règlement sur les médicaments brevetés. En 2020, le secteur pharmaceutique a contesté la validité de la réforme par voie de contrôle judiciaire en Cour fédérale et simultanément par voie de contestation constitutionnelle en Cour supérieure du Québec. Fasken a représenté une coalition de cinq grandes sociétés pharmaceutiques dans le cadre de la contestation constitutionnelle au Québec.

En 2022, la Cour d’appel du Québec a conclu que la majorité des modifications réglementaires étaient inconstitutionnelles. Elle a notamment confirmé la décision de la Cour supérieure de déclarer invalides les dispositions relatives à la divulgation des rabais confidentiels négociés avec les provinces et assureurs privés et a poussé la note encore plus loin en déclarant invalide le recours aux facteurs pharmacoéconomiques. La Cour d’appel a toutefois validé la modification au bassin de pays de comparaison. À la suite du jugement rendu en appel, le gouvernement fédéral a abandonné la majeure partie de la réforme, ne laissant en place que la liste actualisée de pays de comparaison. Divers changements au sein de la direction et parmi les membres du CEPMB ont lieu depuis. En outre, le CEPMB a récemment publié un projet de lignes directrices provisoires, qui est actuellement en phase de consultations.

L’adjudication des frais

Dans une décision sans précédent, la Cour supérieure du Québec a accordé le montant extraordinaire de 781 540,79 $ aux demanderesses, lequel comprenait la totalité des frais d’expertise réclamés.

Le caractère justifié des experts retenus par les demanderesses est souligné dans le jugement. La Cour a conclu non seulement que les rapports d’expertise (trois présentés en preuve principale, trois en réplique et un en contre-réplique) étaient utiles et nécessaires à la décision de la juge de première instance, mais que la totalité des frais d’expertise étaient proportionnels et raisonnables dans les circonstances, même si le Procureur général du Canada avait engagé la somme plus modeste de 83 583 $ en frais d’expertise. Et fait surprenant, la Cour n’a pas réduit le montant des frais d’expertise réclamés par les demanderesses malgré cet écart important.

Il convient également de souligner que la juge de première instance avait consacré pas moins de 67 paragraphes de sa décision aux témoignages d’experts des demanderesses. De même, le Procureur général du Canada avait aussi souvent et favorablement cité les experts des demanderesses dans ses mémoires de première instance et d’appel et n’avait pas exprimé son opposition à la nécessité de l’adjudication des frais.

Les répercussions plus larges

Il est extrêmement rare que la Cour supérieure du Québec accorde la totalité des frais d’expertise réclamés, surtout pour un montant aussi élevé.

Les plaideurs devraient garder à l’esprit plusieurs éléments de cette décision lorsqu’ils réclameront des frais d’expertise dans le cadre d’un litige de cette nature et envergure. Premièrement, lors de la sélection et de la rétention d’experts, il faut considérer la proportionnalité de leurs frais en fonction de l’ensemble des frais en jeu. En l’espèce, environ 10 milliards de dollars étaient en jeu pour le secteur pharmaceutique, selon les déclarations publiques du gouvernement – les frais accordés ne représentaient donc qu’une petite fraction de cette somme.

Deuxièmement, les rapports d’expertise devraient être rédigés de manière à pouvoir être facilement cités par les tribunaux, ce qui contribuera à prouver leur utilité et leur nécessité plus tard. En l’espèce, le recours par le tribunal – et même par le défendeur – aux experts des demanderesses a facilité la justification de ces derniers.

Avec la décision de la Cour d’appel sur le fond, cette décision met en évidence les conséquences financières et politiques auxquelles s’exposera le CEPMB s’il s’aventure sur une voie qui attire d’autres litiges dans la prochaine phase de l’adoption des lignes directrices.

La date limite pour porter en appel la décision de la Cour supérieure sur les frais est maintenant passée, ce qui signifie que la décision est finale.

L’équipe de Fasken, dirigée par Marc-André Fabien, Julie Desrosiers, Michael Shortt, Eliane Ellbogen, Mathieu Gagné et Dara Jospé pour les procédures de fond et d’appel, et Eliane Ellbogen pour les soumissions relatives aux frais, a été heureuse de représenter les demanderesses, qui ont eu gain de cause.

Contactez les auteures

Si vous avez des questions au sujet cette décision ou votre stratégie de litige, n’hésitez pas à communiquer avec l’equipe Fasken charges des litiges or des sciences de la vie.

Contactez les auteures

Auteures

  • Dara Jospé, Associée, Montréal, QC, +1 514 397 7649, djospe@fasken.com
  • Eliane Ellbogen, Avocate | Agente de marques de commerce, Montréal, QC, +1 514 397 5130, eellbogen@fasken.com
  • Geneviève Shemie, Avocate, Montréal, QC, +1 514 397 7660, gshemie@fasken.com

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