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Se préparer aux tarifs : Planification des effectifs en période de ralentissement économique

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Espace RH

Le Canada a passé les deux dernières années à se remettre des taux d’intérêt élevés et de la forte inflation qui ont entraîné un ralentissement de la production économique. L’économie canadienne fait par ailleurs face à de nouvelles incertitudes à la lumière d’une éventuelle élection fédérale, de la nouvelle administration présidentielle américaine et de différends commerciaux à l’échelle internationale.

Le 1er février 2025, l’administration Trump a annoncé qu’elle imposerait des tarifs de 25 % sur les produits canadiens (10 % sur les exportations d’énergie) à compter du 4 février 2025. Le gouvernement du Canada a annoncé qu’il riposterait par l’application de contre-mesures, à commencer par des tarifs de 25 % sur 30 G$ de produits américains, lesquels entreraient également en vigueur à compter du 4 février 2025. Les deux gouvernements ont également déclaré que d’autres modifications tarifaires et contre-mesures étaient envisageables.

Mise à jour (3 février 2025) : À la suite de la publication de ce bulletin et de discussions entre les deux nations le 3 février 2025, le Canada et les États-Unis ont convenu de suspendre les tarifs et les contre-mesures pendant « au moins » 30 jours.

Les conséquences économiques de ces tarifs sur l’économie canadienne ne sont pas encore connues, pas plus que leur durée, mais les entreprises canadiennes doivent néanmoins se préparer à faire face aux éventuels changements qu’elles entraîneront sur leurs effectifs.

Le présent bulletin aborde certaines solutions dont disposent les employeurs pour faire face à des ralentissements imprévus et, si nécessaire, réduire leur personnel. Toutes ces solutions peuvent faire l’objet de restrictions dans une convention collective en milieu de travail syndiqué, et dans un contrat de travail en milieu de travail non syndiqué. Toute solution devrait être examinée attentivement en tenant compte des risques évoqués ci-dessous.

Mises à pied temporaires sur une base volontaire et involontaire

La législation provinciale sur les normes d’emploi comporte des dispositions relatives aux différentes situations de mises à pied temporaires. Certaines prévoient des exigences précises. D’autres sont plus souples. L’Ontario, par exemple, a adopté des dispositions relatives aux mises à pied temporaires allant jusqu’à 35 semaines sur une période de 52 semaines (sous réserve d’un certain nombre de conditions) et jusqu’à 13 semaines sur une période de 20 semaines (sous réserve de conditions nettement moins nombreuses). Entre temps, la Colombie-Britannique a seulement adopté des dispositions relatives aux mises à pied temporaires allant jusqu’à 13 semaines sur une période de 20 semaines. De son côté, le Québec a adopté des dispositions permettant à un employeur de mettre à pied un salarié temporairement pour une durée de moins de 6 mois sans avoir à lui donner de préavis de cessation d’emploi ou d’indemnité tenant lieu de préavis. Les mises à pied temporaires qui respectent les dispositions légales n’enfreignent pas la législation sur les normes d’emploi. En général, si une mise à pied dure plus longtemps que ce qui est autorisé par cette législation, la cessation d’emploi sera considérée comme étant effective. Toutefois, en ce qui concerne les salariés non syndiqués dans les provinces de common law, une mise à pied temporaire de quelque durée que ce soit peut être considérée comme un congédiement déguisé, à moins que l’employeur ne dispose d’un droit contractuel de mise à pied ou que ce droit ne soit implicite dans les pratiques antérieures. Par contre, au Québec, ce droit contractuel et ces pratiques antérieures ne sont pas obligatoires.

Les conventions collectives prévoient habituellement des dispositions relatives aux mises à pied. Ces dispositions s’appliquent généralement aux mises à pied temporaires et aux rappels de salariés syndiqués.

Autres mesures volontaires visant les salariés

Des mesures volontaires consenties par les salariés peuvent aider les employeurs. En voici des exemples :

  1. Accord volontaire de réduction de salaire;
  2. Accord volontaire de réduction des heures hebdomadaires, ou mise en place de postes de travail alternés (p. ex., une semaine de travail, une semaine de congé, etc.);
  3. Accord volontaire de congé sans solde (permission);
  4. Accord volontaire de travail partagé (voir ci-dessous pour de plus amples renseignements);
  5. Accord de séparation volontaire.

Toutes ces mesures volontaires devraient faire l’objet d’accords écrits. Les employeurs devraient par ailleurs déterminer, dans le cadre de ces accords, ce qu’ils pourraient offrir en échange à leurs salariés (p. ex., une indemnisation). 

Autres mesures involontaires visant les salariés (sauf la cessation d’emploi ou la mise à pied)

Outre la mise à pied temporaire, les employeurs peuvent disposer des mesures suivantes sans le consentement du salarié si le changement n’est pas majeur :

  1. Réduction de salaire;
  2. Réduction des heures.

Les employeurs devraient néanmoins demander des conseils juridiques à cet égard avant de procéder à tout changement unilatéral de cette nature.

Travail partagé

Le gouvernement fédéral a mis en place un programme de travail partagé à l’intention de certains employeurs et salariés admissibles. Dans le cadre de ce programme, si les employeurs et un groupe précis de salariés sont d’accord, ces derniers peuvent « partager » le travail effectué en réduisant la semaine de travail de chaque salarié jusqu’à 60 % afin d’éviter des mises à pied.

Conformément au programme, si un accord reconnu par Service Canada est en place entre ces employeurs et ces salariés, Service Canada versera des prestations d’assurance-emploi aux salariés pour suppléer à une partie ou à la totalité de leur revenu manquant.

Les accords de travail partagé doivent faire l’objet d’une demande de l’employeur, du consentement des salariés, de l’approbation par Service Canada et d’autres critères d’admissibilité. De plus, il existe des obligations de déclaration. 

Cessation d’emploi (salariés non syndiqués)

Les employeurs conservent le droit de mettre fin à l’emploi de leurs salariés en raison de la conjoncture économique à condition de leur fournir un préavis de cessation d’emploi. Le cas échéant, les droits contractuels ainsi que les droits civils ou de common law équivalents ou supérieurs aux droits conférés par les normes d’emploi s’appliqueront.

L’environnement économique pourrait avoir une incidence sur le délai de préavis accordé aux salariés ayant droit à un préavis en vertu de la common law et aux salariés du Québec ayant droit à un préavis raisonnable en vertu du Code civil du Québec. Dans un contexte de pénurie de travail, ce délai de préavis pourrait être prolongé étant donné qu’il faudra en principe plus de temps au salarié pour trouver un autre emploi en période de ralentissement économique.

Si le nombre de salariés mis à pied est considérable, il pourrait également être nécessaire de tenir compte des dispositions relatives au licenciement collectif prévues par la législation provinciale sur les normes d’emploi. La Colombie-Britannique et l’Ontario, par exemple, exigent un préavis de licenciement collectif lorsque 50 salariés ou plus travaillant au même endroit ou dans un même établissement sont mis à pied au cours d’une période déterminée. Le Québec, pour sa part, exige un avis de licenciement collectif lorsque 10 salariés ou plus travaillant dans le même établissement sont licenciés ou mis à pied pour une durée de 6 mois ou plus au cours d’une période de 2 mois.

Les employeurs devraient demander des conseils juridiques précis s’ils prévoient un éventuel licenciement collectif, car des exigences particulières doivent être respectées dans certaines circonstances.

Prestations d’assurance-emploi, relevés d’emploi et prestations supplémentaires

Si un salarié est mis à pied temporairement, s’il conclut un accord de travail partagé approuvé ou si son emploi prend fin, un relevé d’emploi (« RE ») de Service Canada doit être émis. Dans de nombreux cas, les salariés pourraient être admissibles à des prestations d’assurance-emploi.

Les employeurs pourraient souhaiter verser à leurs salariés des prestations supplémentaires pendant leur mise à pied ou pendant la période où ils reçoivent des prestations d’assurance-emploi. Pour s’assurer que ces prestations supplémentaires ne sont pas visées par des récupérations de l’assurance-emploi ou d’autres déductions, il est recommandé que l’employeur examine les exigences relatives à l’inscription aux prestations supplémentaires de chômage (« PSC») de Service Canada et demande à inscrire ses PSC ici

Points à retenir

Les employeurs disposent de nombreuses solutions pour la gestion de leurs effectifs et la planification en cas de ralentissements économiques temporaires ou prolongés. Les solutions présentées ci-dessus peuvent engendrer des circonstances dans lesquelles un salarié pourrait alléguer un congédiement déguisé et faire valoir des droits de cessation d’emploi, entre autres risques.

Il est vivement conseillé aux employeurs d’obtenir des conseils juridiques sur les solutions qui s’offrent à eux, ainsi qu’une évaluation des risques connexes avant de prendre toute mesure. Dans tous les cas, les employeurs devraient élaborer des communications claires à l’intention de leurs salariés et les mettre à jour lorsque la situation évolue.

 

Contactez les auteurs

Si vous avez des questions à ce sujet ou avez besoin d’aide avec la planification des effectifs, n’hésitez pas à communiquer avec les auteurs de ce bulletin ou avec votre avocat(e) attitré(e) chez Fasken.

Contactez les auteurs

Auteurs

  • Andrew J. Gould, Avocat | Travail, emploi et droits de la personne, Toronto, ON, +1 416 865 5413, agould@fasken.com
  • Clayton Jones, Associé | Travail, emploi et droits de la personne, Vancouver, BC, +1 604 631 3207, cjones@fasken.com
  • Florence Gauthier, Avocate | Travail, emploi et droits de la personne, Montréal, QC, +1 514 397 7550, flgauthier@fasken.com
  • Rachel Younan, Associée | Travail, emploi et droits de la personne, Toronto, ON, +1 416 868 3478, ryounan@fasken.com

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