Introduction
La Cour d’appel du Québec dans l’affaire 2177 23rd Avenue Holdings c. Pival International inc., 2025 QCCA 19 précise qu’une clause d’« option de renouvellement » de bail au taux du marché ne constitue pas, dans les faits, une véritable option et que l’obligation de négocier de bonne foi ne peut forcer les parties à renouveler le bail.
Résumé des faits
Pival International inc. (le « Locataire ») a conclu un bail commercial avec 2177 23 rd Avenue Holdings ULC et BP Cognac Canada Owner Limited Partnership (les « Propriétaires ») relativement à des locaux industriels situés à Lachine.
L’interprétation quant à la portée de la clause ci-dessous est en litige :
« 27.6 Option de renouvellement
À la condition que le Locataire remplisse, de bonne foi et ponctuellement, toutes les obligations qui lui incombent en vertu du bail et qu’il ne soit pas en défaut en vertu de l’une quelconque d’entre elles pendant le terme du bail, il pourra renouveler le présent bail pour une (1) période additionnelle de cinq (5) ans, soit pour la période débutant le 1er janvier 2023 et se terminant le 31 décembre 2028. Un avis écrit, au moins neuf (9) mois avant l’expiration du présent bail, devra être donné au Bailleur. À défaut d’avis par le Locataire, le présent bail prendra automatiquement fin à l’arrivée du terme fixé.
Si le Locataire désire se prévaloir de l’option, le nouveau prix fixé pour son loyer devra être négocié dans un délai de soixante (60) jours de l’avis, et une nouvelle entente de location devra avoir été conclue entre les parties à l’intérieur du même délai, à défaut de quoi, l’option de renouvellement deviendra nulle et non avenue à l’expiration dudit délai de soixante (60) jours. Les taux applicables pour fixer le loyer seront les taux du marché et/ou de l’Immeuble alors en vigueur pour un terme équivalent et pour un espace comparable et d’usage similaire aux Lieux Loués et situés dans le même secteur de la ville de Montréal. »
[Caractères gras ajoutés]
Décision de première instance
La Cour supérieure a jugé que la clause 27.6 constituait une véritable option de renouvellement et a conclu que Cominar, l’auteur des Propriétaires, avait manqué à son obligation de négocier de bonne foi le prix du loyer. En conséquence, le juge a ordonné aux parties de reprendre les négociations de bonne foi.
L’arrêt de la Cour d’appel
La Cour d’appel a infirmé le jugement de première instance et a conclu que la clause 27.6 ne conférait pas au Locataire une véritable option de renouvellement, mais plutôt un simple droit de préférence.
Puisque la clause en litige ne prévoyait pas un loyer fixé à l’avance, ni un mécanisme objectif de détermination de ce dernier, le loyer n’était donc pas déterminable au sens des articles 1373 et 1374 C.c.Q.
Par conséquent, à défaut d’une entente entre les parties dans le délai prévu à la clause en litige, soit un délai de 60 jours de l’avis de l’exercice de l’« option », le bail a pris fin à l’arrivée du terme fixé.
La Cour d’appel a par ailleurs souligné que la sanction d’un manquement à l’obligation de négocier de bonne foi devrait se traduire par l’octroi de dommages-intérêts plutôt que par l’exécution forcée en nature.
Commentaire des auteurs
Cet arrêt a un impact significatif sur l’interprétation de ce type de clause, régulièrement qualifiée, à tort, d’« option », que l’on retrouve dans d’innombrables baux commerciaux.
Bien que les parties demeureront libres de conclure ou non une entente de renouvellement en présence d’une telle clause, les négociations devront être menées de manière honnête et transparente à défaut de quoi elles pourraient s’exposer à devoir payer des dommages-intérêts.