Le 13 décembre 2017, le Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie de la Chambre des communes a présenté son rapport sur la Loi canadienne anti-pourriel (communément appelée la « LCAP ») intitulé La Loi canadienne anti-pourriel : des précisions s'imposent. Ce rapport a été élaboré dans le cadre de l'examen de la LCAP qui devait être effectué, selon les termes de cette loi, trois ans après son entrée en vigueur.
Avant de rendre son rapport, le Comité a entendu 41 témoins et a reçu 29 mémoires déposés par différents intervenants, dont le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (« CRTC »), des entreprises et des organismes sans but lucratif. Un désaccord important entre les témoins a été constaté tant à l'égard de l'efficacité de la législation que des solutions à privilégier pour l'avenir, notamment en ce qui a trait au droit d'action privé (dont l'entrée en vigueur a été suspendue). Le Comité a formulé une série de recommandations demandant la clarification du texte législatif, la publication de documents d'orientation sur son interprétation et davantage de transparence dans son processus d'application.
Un des thèmes principaux mis en valeur par le rapport et les recommandations qu'il contient est la préoccupation relative aux « coûts de conformité indus » : le manque de clarté de la LCAP et de la réglementation connexe alourdit le coût de la conformité qui pourrait atteindre, selon les estimations de certains témoins, plusieurs millions de dollars pour les organisations de plus grande taille. Il a également été noté que, dans certains cas, ce manque de clarté a pour effet de décourager le recours aux messages électroniques commerciaux.
Recommandations
Sans surprise, compte tenu du titre du rapport, le Comité s'est joint au groupe réclamant la clarification de certaines dispositions clés de la LCAP. Dans son rapport, 13 recommandations sont présentées au gouvernement, dont les principales sont les suivantes :
- Il convient de clarifier la définition de « message électronique commercial », y compris la manière dont les messages de nature administrative ou transactionnelle et les messages entre entreprises doivent être traités;
- Il convient de clarifier les dispositions se rapportant au « consentement exprès » et au « consentement tacite »;
- Il convient de clarifier la manière dont la LCAP s'applique aux organismes de bienfaisance et aux organismes sans but lucratif;
- Le gouvernement du Canada et le CRTC doivent rechercher ensemble des solutions permettant d'améliorer la transparence des méthodes, des enquêtes et de la détermination des sanctions, ainsi que de la collecte et de la communication des données sur les plaintes des consommateurs et les tendances en matière de pollupostage.
De plus, le Comité recommande que :
- La mise en œuvre de ces clarifications soit une condition préalable à l'entrée en vigueur du droit d'action privé;
- La suspension de l'entrée en vigueur du droit d'action privé soit maintenue jusqu'à ce que l'incidence de la mise en œuvre d'un tel droit ait fait l'objet d'une analyse approfondie et que le gouvernement détermine si l'octroi de dommages-intérêts doit être fondé sur une preuve tangible de préjudice.
En ce qui concerne plus particulièrement la question de la mise en œuvre de la loi, le Comité souligne que le CRTC dispose d'un large pouvoir discrétionnaire quant au choix des organismes sur lesquels il fait enquête et à la manière dont il veille à l'application de la LCAP. Plusieurs témoignages ont d'ailleurs été entendus à ce sujet. Toutefois, le Comité est d'avis que « l'application de ce pouvoir discrétionnaire n'empêche pas [le] personnel [du CRTC] de l'exercer avec transparence », ce qui sous-entend que les décisions du CRTC devraient être davantage motivées. À cet égard, un témoin a suggéré que les raisons justifiant le montant de toute sanction soient données. Depuis l'entrée en vigueur de la LCAP, le CRTC a mené plus de 30 enquêtes, envoyé 22 lettres d'avertissement et perçu la somme de 468 000 $ à titre de sanctions. Le CRTC a également émis trois procès-verbaux de violation qui ont donné lieu au même nombre de décisions du Conseil. Dans deux de ces décisions, le CRTC a réduit de façon significative la sanction administrative pécuniaire imposée initialement : de 640 000 $ à 50 000 $ dans un cas et de 1,1 million de dollars à 200 000 dollars dans l'autre.
Conclusion
Les recommandations du Comité sont sans équivoque : le régime actuel de la LCAP doit faire l'objet de clarifications, en particulier pour éviter les coûts de conformité indus que doivent assumer les organismes. Le Comité a demandé au gouvernement de déposer une réponse globale à ce rapport. Nous surveillerons au fur et à mesure l'évolution de la situation et, le cas échéant, les modifications apportées à la LCAP.
Pour en savoir plus au sujet de la conformité à la LCAP, nous vous recommandons de lire le rapport du sondage sur la LCAP effectué par Fasken Martineau, Bridging the Gaps in Understanding and Compliance (disponible en anglais seulement).