Nous débutons aujourd'hui une série de quatre bulletins concernant la Loi sur la réduction de l’inflation, l’Inflation Reduction Act (IRA) signée par le président Biden le 16 août 2022. La grande majorité du contenu de cette série reprend les propos du bulletin publié par le cabinet d'avocats américain Beveridge & Diamond, un cabinet de premier plan en droit de l’environnement. Nous avons ajouté des mentions de notre cru entre crochets ou dans des encadrés pour faciliter la compréhension du texte par un public canadien.
Le premier bulletin, publié aujourd'hui, inclut des remarques introductives, les points clés à retenir et les mesures à prendre, ainsi que la toile de fond de l’IRA.
Le deuxième bulletin inclura les trois premières catégories du résumé des dispositions clés sur le climat et l'énergie : l’énergie éolienne extracôtière et les règles fédérales sur le pétrole et le gaz extracôtier et sur terre, les émissions de GES et les émissions atmosphériques et les programmes de réduction des émissions de méthane.
Le troisième bulletin inclura les huit catégories suivantes du résumé des dispositions clés sur le climat et l'énergie : l’agriculture et la sylviculture, le transport d’électricité, la fabrication et la décarbonation, les combustibles de remplacement et le programme de soutien aux technologies pour des émissions à faible teneur en carbone du secteur aéronautique, les infrastructures hydrauliques, les autres dispositions sur les changements climatiques, les autorisations environnementales et les révisions et, enfin, la résilience climatique.
Le quatrième et dernier bulletin inclura la dernière catégorie du résumé des dispositions clés sur le climat et l'énergie : les crédits d'impôt de même que la conclusion de cette série de bulletins.
Remarques introductives
L’IRA contient une panoplie de programmes ayant pour but de répondre à la problématique des changements climatiques et à la production d’énergie.
Ces programmes comprennent, par exemple, un financement considérable nouveau ou élargi pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES), comme le méthane ou les hydrofluorocarbures (HFC), pour encourager les chaînes logistiques nationales pour les véhicules électriques et les systèmes de stockage de l’énergie, pour promouvoir les pratiques agricoles qui capturent le dioxyde de carbone dans les sols, pour accroître la production extracôtière d’énergie (tant les sources fossiles que l’énergie éolienne) et pour fournir un support de la part du gouvernement fédéral américain pour améliorer l’efficacité énergétique. L’IRA contient également des douzaines de mesures nouvelles ou étendues concernant des crédits fiscaux pour l’énergie renouvelable, les véhicules électriques, le transport de l’électricité et les secteurs industriels accessoires. L’IRA est sans contredit la plus importante initiative du gouvernement fédéral américain pour lutter contre les changements climatiques.
Points clés à retenir – actions clés
- Même si l’IRA constitue une réduction significative des dispositions relatives aux dépenses et des dispositions de fond par rapport au projet de loi Reconstruire mieux (Build Back Better) adopté par la Chambre des représentants en novembre 2021, l’IRA constitue néanmoins l’initiative la plus considérable du gouvernement fédéral américain pour répondre à la problématique des changements climatiques de toute l’histoire et elle va ouvrir la voie aux mesures de fond concernant la manière dont les États-Unis produisent de l’énergie pour la prochaine décennie. Les dispositions les plus significatives incluent celles-ci :
- La production d’énergie éolienne extracôtière et la production de combustibles fossiles. L’IRA va étendre considérablement les parcs éoliens en mer à la condition toutefois que soient en même temps offerts des baux pétroliers ou gaziers extracôtiers sur d’importantes étendues du plateau continental extérieur des États-Unis.
- Émissions atmosphériques. L’IRA contient d’importantes dispositions qui ont pour but de réduire les émissions de GES, comme les réfrigérants HFC, de même que les émissions de ce que l’on appelle aux États-Unis les « Criteria Air Pollutants » ou contaminants nommés (selon notre traduction), lesquelles font traditionnellement l’objet de réglementation sous l’autorité du Clean Air Act.
Les « Criteria Air Pollutants », pour employer l’expression du Clean Air Act des États-Unis, sont les six contaminants suivants : les matières particulaires, les oxydants photochimiques (incluant l’ozone), le monoxyde de carbone, le dioxide de souffre, le dioxyde d’azote et le plomb. L’Agence de protection de l’environnement des États-Unis appelle un polluant des « Criteria Pollutants » parce qu’elle adopte des normes nationales de qualité de l’air ambiant (National Ambient Air Quality Standard) à leur endroit, lesquelles normes sont basées sur des critères eux-mêmes fondés sur l’information scientifique la plus récente concernant les effets sur la santé ou le bien-être. |
- Méthane. L’IRA augmente considérablement le soutien à l’Agence de protection de l’environnement [des États-Unis] concernant les efforts déployés par celle-ci pour répondre à la problématique des émissions de méthane et également pour mettre en place un système de tarification en vue d’imposer des frais aux propriétaires d’infrastructures gazières ou pétrolières dans le cas où se produisent des émissions de méthane en provenance de celle-ci au-delà de certains seuils précis.
- Agriculture et sylviculture. L’IRA contient plusieurs programmes ayant pour but de réduire les émissions de GES du secteur agricole, de promouvoir la séquestration du carbone, tant par le moyen des sols qu’au moyen des forêts et d’améliorer la résilience aux changements climatiques des fermes et des forêts.
- Les combustibles de remplacement. L’IRA augmente considérablement les mesures fédérales de soutien pour les biocombustibles, les carburants durables, l’hydrogène en tant que carburant et les carburants d’aviation durables.
- Le secteur de la fabrication. L’IRA contient des mesures de soutien pour la décarbonation de secteurs industriels à forte intensité de GES par le biais d’initiatives telles que l’efficacité énergétique, la transition vers des intrants à faible intensité en carbone et l’utilisation de matériaux qui captent de fortes quantités de carbone pendant les processus de fabrication.
L’IRA contient également des révisions substantielles du système de crédits fiscaux des États-Unis pour la production d’énergie renouvelable, la capture et la séquestration du carbone et la fabrication de pointe. L’IRA va étendre le système existant des crédits fiscaux à l’investissement et les crédits fiscaux à la production et il va maintenir ou augmenter les crédits fiscaux pour la construction dans la mesure où l’on paiera des salaires courants [La notion de « prevailing wages », que nous traduisons par « salaire courants », est une notion de doit du travail américain : un salaire est dit « prevailing » ou courant s’il correspond au taux horaire établi pour certains types de travail, notamment des travaux publics, dans certaines régions. Il ne faut pas confondre cette notion avec celle de salaires minimums.] et que l’on se conforme avec des programmes d’apprentissage reconnus. L’IRA va également mettre en place d’autres crédits fiscaux comme pour le carburant d’aviation renouvelable ou pour l’hydrogène dit « propre ». Finalement, après 2025, l’IRA va progressivement mettre un terme au système existant de crédits en faveur d’un nouveau système qui accordera des crédits pour les technologies nouvelles qui produiront de l’énergie sans carbone et elle gardera ce système en place jusqu’à ce que le secteur électrique aux États-Unis réduise ses émissions de GES de 25 % par rapport à 2022.
Toile de fond
L’IRA est la pièce législative d’accompagnement longuement retardée de la loi bipartite Infrastructure Investment and Jobs Act (IIJA), une corbeille législative d’importance adoptée en novembre 2021 avec l’appui de plusieurs sénateurs républicains. L’IRA – la réplique du Sénat à l’initiative législative plus ambitieuse Reconstruire mieux (Build Back Better) adoptée par la Chambre des représentants – a été adoptée sur une base strictement partisane en utilisant ce que l’on appelle en droit parlementaire américain les règles de la réconciliation, c’est-à-dire des règles qui permettent dans certains cas d’adopter des lois sur une base strictement partisane sans avoir à faire face à ce qu’il est convenu d’appeler un « filibuster » ou une « flibuste » en français, ces cas étant limités à des mesures de nature fiscale. La Chambre des représentants prévoit tenir un vote sur l’IRA le jeudi 12 août 2021 [tel a été le cas] et l’on présage que la Chambre va bel et bien adopter cette loi et qu’elle sera entérinée peu après par le président des États-Unis [tel a été le cas].
Qu’est-ce que la « flibuste »? Voici comment le site web du Sénat des États-Unis l’explique : La tradition sénatoriale de débat illimité a permis l’utilisation de la « flibuste » ou l’obstruction systématique, un terme vaguement défini pour désigner une action conçue pour prolonger le débat et retarder ou empêcher un vote sur un projet de loi, une résolution, un amendement ou une autre question sujette à un débat. Avant 1917, le Règlement du Sénat ne prévoyait pas de moyen de mettre fin au débat et de forcer le vote sur une mesure. Cette année-là, le Sénat a adopté une règle permettant à une majorité des deux tiers de mettre fin à une telle flibuste ou obstruction systématique, une procédure connue sous le nom de « clôture ». En 1917, le Sénat a réduit le nombre de votes requis pour la clôture des deux tiers des sénateurs votant aux trois cinquièmes, soit 60 % des membres du Sénat. |
Tout comme l’Infrastructure Investment and Jobs Act, l’IRA traite d’un large éventail de sujets ayant trait à la production d’énergie et à la politique climatique et elle prépare le terrain pour une implication considérable du gouvernement fédéral américain dans le secteur de l’énergie cette implication ayant pour objectif l’accélération de la transition à des systèmes de production d’électricité faible en carbone ou carboneutre de même que l’électrification du système de transport à l’échelle des États-Unis. Plusieurs des dispositions d’ailleurs affectent ou dirigent des fonds au bénéfice de communautés à faible revenu ou désavantagées, sur la base de préoccupation de justice environnementale de la campagne électorale et de l’Administration Biden-Harris. Qui plus est, plusieurs dispositions contiennent des exigences de contenu national ayant pour objectif de renforcer l’industrie américaine, de même que des exigences sur les salaires courants et sur les programmes d’apprentissage exigences destinées à favoriser les emplois syndiqués et à augmenter les salaires des cols bleus.
Le prochain bulletin inclura trois catégories du résumé des dispositions clés sur le climat et l'énergie : l’énergie éolienne extracôtière et les règles fédérales sur le pétrole et le gaz extracôtier et sur terre, les émissions de GES et les émissions atmosphériques et les programmes de réduction des émissions de méthane.